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Billet de blog 26 mai 2008

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La fronde des indiens de la réserve de Soboba

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La réserve de Soboba se trouve au sud-ouest de San Bernardino, dans la pointe sud de l'état de Californie. C'est là que vivent environ 900 indiens descendants de la tribu des Luisenos. Le président de cette tribu, Robert Salgado, considère d'une part que la situation à laquelle les membres de la tribu sont soumis ressemble à une guerre, d'autre part que les effectifs du sheriff du comté de Riverside se comportent comme la cavalerie, référence faite à celle qui, dans la construction des Etats-Unis, est intervenue pour massacrer les indiens sans discernement.

Le problème a été relaté dans l'édition du 15 mai du Los Angeles Times. Le conflit et les mauvaises relations entre la police locale et la réserve semblent remonter au mois de décembre 2007, d'après le journaliste du LATimes, David Kelly, et demeurent six mois plus tard relativement confus. Mais la véritable escalade a eu lieu le 14 mai. Ce jour-là les adjoints du sheriff du comté de Riverside sont entrés dans la réserve en voiture pour appréhender deux suspects. De quoi ces deux suspects étaient-ils soupçonnés ou accusés ? Probablement de problèmes de droit commun, mais le LATimes n'en dit mot. Toujours est-il que les deux adjoints ont été accueillis par des tirs nourris d'armes automatiques. Ils ont alors demandé et obtenu le renfort de plusieurs voitures et d'un hélicoptère. Et le résultat ne s'est pas fait attendre : les deux présumés suspects, un homme de 36 ans et une femme dont l'âge et l'identité n'ont pas été révélés, ont été froidement abattus et laissés sur place sans que leurs proches soient autorisés à approcher les dépouilles pour leur rendre le dernier hommage selon le rite indien.

Les membres de cette réserve rejettent tous et en bloc la responsabilité de cette situation sur les troupes du sheriff, d'autant qu'en 2002 un homme avait été déjà abattu sans raison apparente et sans sommation. Selon le témoignage du frère d'une des deux victimes de la tuerie du 14 mai, l'attitude de la police pose problème depuis longtemps : "These guys are running around here with assault rifles like they are in Iraq. They shoot first and ask questions later.", ce qui signifie "Ces types viennent toujours ici avec des fusils d'assaut comme s'ils étaient en Irak. Ils tirent d'abord et posent leurs questions après."

Cette confrontation remet en lumière deux questions essentielles dans la vie américaine quotidienne : d'une part l'usage et la vente libre des armes, revendication ardemment soutenue en permanence par la NRA, National Rifle Association, qui vient d'apporter son soutien au candidat républicain, McCain, pour la prochaine élection présidentielle de novembre ; d'autre part le triste sort réservé aux quelques indiens américains. En décembre 1981, les indiens de la tribu Lakota avaient organisé, dans la ville de New York, une campagne de sensibilisation à leur vie quotidienne, en projetant notamment un film. Le New York Times avait rendu compte d'un dialogue impromptu et terriblement révélateur, devant le cinéma qui projetait le film, entre une new yorkaise d'âge moyen, vêtue d'un manteau de fourrure et couverte de bijoux, et un jeune indien en habits traditionnels : "How do you like my town, young man?" avait-elle lancé avec condescendance, "Comment trouvez-vous ma ville, jeune homme ?". Le jeune indien avait eu cette extraordinaire réplique :"And how do you like my country, madam?", "Et comment trouvez-vous mon pays, madame ?".

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