Les bénévoles, militants et cadres de l’ONG britannique Save the Children, association caritative créée en 1919 pour apporter une aide sanitaire, économique et éducative aux enfants du tiers-monde, ne décolèrent pas depuis le 19 novembre. Date à laquelle la branche américaine de Save The Children a pris l’étrange et unilatérale initiative de remettre, au cours d’une cérémonie en grande pompe au Plaza Hotel de New York, un prix spécial à l’ex-premier ministre travailliste Tony Blair in recognition of his leadership on international development, c’est-à-dire à titre de reconnaissance pour sa gestion du développement international. STC US évoque deux sommets du G8 organisés par Blair à Londres, au cours desquels un allégement de la dette des pays pauvres a été proposée. Il n’est pas inutile à l’explication de cette indécente remise de prix entre amis de préciser que cette même branche américaine de l’ONG en question est dirigée, depuis 2010, par Justin Forsyth qui a travaillé préalablement — de 2004 à 2010 — dans l’équipe de Blair à Downing Street.
Les réactions ont été à la fois vives, véhémentes et violentes au Royaume-Uni, où une pétition de STC UK a été immédiatement mise en ligne, signée par plus de deux cents cadres, et a déjà recueilli plus de 81000 signatures, pour que cette récompense, considérée comme morally reprehensible soit retirée des mains du récipiendaire. Le très controversé député, ex-membre du Labour, George Galloway, a dénoncé le paradoxe d’une grotesque award to a child-killer. Quant à Kenneth Roth, l’actuel président de Human Rights Watch, il a réagi tout aussi violemment en décrivant Blair comme the man who defends any dictator who’ll pay him, littéralement l’homme qui défend tout dictateur qui veut bien le payer. Soit STC US est très mal informée, soit elle arrive d’une autre planète. En effet Tony Blair ne traîne pas seulement le souvenir honteux et calamiteux de son alignement sur la décision de George Bush d’envahir l’Irak, en mars 2003 sur la base du mensonge éhonté des armes de destruction massive, invasion qui a coûté la vie à de nombreux civils, parmi lesquels des enfants.
De plus, le même Blair, depuis qu’il a quitté Downing Street, a été nommé — on ignore toujours sur quelles compétences — médiateur entre Palestiniens et Israéliens, brève et inconsistante tâche dans laquelle il a montré très clairement ses positions pro-israéliennes. Enfin, pour couronner ce « brillant » parcours, en 2010, il a créé Tony Blair Associates, une entreprise de consultants, par laquelle il a signé un contrat très juteux de plusieurs millions de livres sterling pour conseiller le dictateur du Kazakhstan, Nazarbayev, dont le Guardian avait parlé le 24 août. Les autres contrats de Tony Blair Associates ont été passés avec le Koweit, la Colombie et les Emirats Arabes Réunis, des pays qui ont avec la démocratie les mêmes rapports que la Corée du Nord. On avait déjà remarqué, lors de son passage au pouvoir, que Tony Blair n’était pas plus travailliste que la reine, on sait désormais, au vu de ses relations douteuses, qu’il est vraiment le digne héritier de Margaret Thatcher.