En ce 27 mai, dans leur mouvement de protestation contre l'augmentation du prix des carburants, les chauffeurs de poids lourds britanniques ont viré en tête de la contestation européenne. Plusieurs convois de camions ont pratiquement bloqué la nationale A40, l'accès à Londres intra muros et ont sérieusement ralenti la circulation sur l'autoroute M4 jusqu'à Cardiff, par le biais d'une procession "escargot" de plus de 5 kms de longueur. Les routes du Kent entre Londres et Canterbury et celles de l'Essex ont été totalement bloquées également. Al'intérieur même du Pays de Galles les ralentissements ont conduit à des bouchons de 80 à 100 kms, comme le relate BBC News.
Pour donner un aperçu de la situation, les conducteurs de poids lourds sont encore plus mal lotis que leurs homologues français et doivent payer le gazole entre un équivalent de 1,68 à 1,96 euro le litre. Ce qui, bien évidemment, constitue un handicap considérable pour la plupart des entreprises britanniques. Le chancelier de l'échiquier, ministre des finances britannique, porte bien mal son patronyme, Alistair Darling, car il est détesté par les représentants des routiers et des entreprises, pour avoir plusieurs fois changé de discours sur le sujet et pourrait aisément faire partie du gouvernement Fillon, tant ses "blunders", couacs ou gaffes en bon français, ont été légion jusqu'à présent. Mais il est surtout devenu encore plus impopulaire récemment en soutenant l'idée d'une taxe supplémentaire sur un carburant au prix déjà exorbitant pour pénaliser les véhicules les plus polluants, à telle enseigne que 44 députés travaillistes ont mené une fronde contre leur ministre pour qu'il renonce à cette nouvelle hausse.
Au-delà de la question du coût des carburants qui frappe le monde occidental, cette confrontation entre routiers et pouvoir politique au Royaume-Uni met en lumière un autre problème sous-jacent, que Gordon Brown élude savamment pour l'heure, à savoir la saturation des routes britanniques. Quiconque n'a pas eu la joie, lors d'un bank holiday, un jour férié cumulé à un week-end, de tenter de se rendre de Douvres à la magnifique petite ville de Cornouaille, St Yves en passant par Londres, par exemple, ne peut comprendre la gravité du problème : 568 kms que l'on peut raisonnablement parcourir en 5h30 sur le continent, en l'occurrence il faut prévoir le double. Il n'est pas du tout exclu qu'un jour le système routier et autoroutier britannique ressemble au célèbre film de Comencini, Le grand embouteillage. Enfin il s'agit là sans doute du prélude à une protestation beaucoup plus vaste qui ne fait que commencer.