Jean-Louis Legalery (avatar)

Jean-Louis Legalery

professeur agrégé et docteur en anglais retraité.

Abonné·e de Mediapart

552 Billets

20 Éditions

Billet de blog 29 mars 2014

Jean-Louis Legalery (avatar)

Jean-Louis Legalery

professeur agrégé et docteur en anglais retraité.

Abonné·e de Mediapart

Quand Le Monde sort de l'amnésie...

Jean-Louis Legalery (avatar)

Jean-Louis Legalery

professeur agrégé et docteur en anglais retraité.

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Lorsqu’en 2004, Edwy Plenel quitta Le Monde, las de l’action de sape conjuguée du tandem Colombani-Minc qui roulait déjà ouvertement pour le futur candidat Sarkozy, ce fut à la fois la fin de la période la plus exaltante et la plus belle du quotidien – avec des chiffres de vente jamais égalés depuis — et le début d’une immense tristesse et d’un grand désarroi, pour celles et ceux (dont l’auteur de ce blog) qui étaient abonnés de longue date et se retrouvaient tristement seuls face aux fossoyeurs de la presse indépendante. Lorsque commença la formidable aventure Mediapart, en décembre 2007 avec le projet, puis définitivement le 16 mars 2008, Le Monde avait déjà complètement oublié le nom de son ancien brillant directeur, c’était presque du « Edwy qui ? ». Puis lorsque Mediapart entama sa série de remarquables enquêtes, si salutaires pour la démocratie, cette fois l’amnésie du Monde était tellement profonde que l’absence du nom de Plenel et du titre de Mediapart, dans les articles du Monde — alors que le reste de la presse faisaient référence aux deux —semblait relever, de toute évidence, du mot d’ordre.

Or voilà qu’aujourd’hui, samedi 29 mars 2014, jour de grâce où le journal déjà nommé semble retrouver la mémoire —c’est sans doute l’incidence du prochain changement d’heure— une journaliste, Judith Perrignon, a été envoyée en mission pour authentifier l’incroyable découverte faite par son journal, à savoir que cet Edwy Plenel-là qui a lancé avec succès Mediapart —conjointement avec Laurent Mauduit, François Bonnet, Gérard Desportes et Marie-Hélène Smiéjan— serait le même que celui qui a si brillamment présidé aux destinées du même journal entre 1996 et 2004. Au-delà de ce miraculeux retour de la mémoire, on a, quand même, le sentiment que Le Monde vole au secours de la victoire, pour utiliser une terminologie politique, car Mediapart, aujourd’hui, c’est plus de 88.000 abonnés réguliers. Donc, alors que tous les media invitent Mediapart à parler de ses enquêtes —à la notable exception de France Inter, dernier bastion des obligés de Sarkozy— Le Monde restait dans un silence pesant.

Certes l’article de Judith Perrignon est honnêtement rédigé et bien documenté, mais, néanmoins, on a le sentiment que les mots d’ordre n’ont pas complètement disparu, car titrer en « une » qu’Edwy Plenel est « un croisé  du journalisme » est aussi inepte que peu objectif et confraternel. Le terme de « croisé » fait, bien évidemment, référence aux croisades, expéditions entreprises par les chrétiens coalisés pour délivrer les lieux présumés saints qu’occupaient les musulmans. On voit par là que l’intention péjorative de Judith Perrignon, et donc du Monde, est évidente et que, malheureusement pour elle et son journal, elle n’a pas bien compris que les valeurs que Mediapart défend la concernent aussi, ainsi que son journal, à savoir la recherche de la vérité, la transparence au service du lecteur et du citoyen. Mediapart appartient à ses fondateurs, à ses journalistes et à ses abonnés et enquête en toute indépendance sur tous les sujets, Le Monde appartient à trois mécènes, qui continuent d’ancrer ce quotidien dans la presse industrielle, et avec qui Judith Perrignon devra peut-être composer si elle se lance dans une investigation qui gêne les intérêts économiques et politiques des trois susnommés, auquel cas elle partira sans doute en croisade…

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.