Cela fait des années, au moins de puis 2018, que les sri lankais aux fortes traditions socialistes et de combat, se battent en nombre et de manière quasi continue par des grèves et manifestations contre les multiples attaques des gouvernements contre les travailleurs. Mais l'intensification des manifestations de ces derniers jours, et la participation massive des couches les plus pauvres, débordant littéralement les partis d'opposition par leur énergie ainsi que par leur radicalité malgré le couvre feu et la répression, essayant par exemple de prendre d'assaut la résidence personnelle du président comme celles des plusieurs ministres, témoigne d'une nouvelle étape dans la lutte, celle d'une lutte contre la faim, car on meurt littéralement de faim au Sri Lanka, du fait d'une hausse vertigineuse des prix et des pénuries d'aliments, de médicaments, de carburants, de gaz et des coupures d'électricité.
C'est l'étape d'après les manifestations plus classiques contre la hausse des prix qu'on voit se dérouler actuellement en Grèce ou au Pérou. C'est un soulèvement qui exige le départ immédiat du président Gotabaya Rajapaksa et de son frère, le premier ministre, qui vient de faire tomber tous les ministres du gouvernement à part le premier ministre, et qui continue de plus belle avec des manifestations partout, mobilisant aussi aux côtés des plus pauvres, les travailleurs sur leurs bases professionnelles et à partir de leurs lieux de travail : travailleurs de la santé, enseignants, étudiants, avocats, etc... Bref, le prolétariat sur ses propres bases, qui ont aussi l'objectif de renverser le gouvernement, de faire payer les riches, de récupérer tout ce qu'ils ont volé...
La hausse des prix mondiale qui s'annonce et qui a déjà commencé, vient d'ajouter à la crise sanitaire du covid et à des années d'attaques contre l'emploi, les salaires, les services publics, les protections sociales, les droits ouvriers et démocratiques. Ces attaques avaient déjà provoqué des ripostes populaires nombreuses de 2018 à 2019 mais aussi et encore en 2020-2021. La hausse des prix et les crises de la faim qu'elle va entraîner va amplifier et élargir la colère et la détermination des classes populaires comme au Sri Lanka, posant clairement la question non seulement du renversement du gouvernement mais aussi celle du système capitaliste et de la prise en main de la société par les producteurs associés eux-mêmes.
Le socle de révoltes actuelles très importantes en Asie du Sud - Inde, Pakistan et Sri Lanka -où les mouvements sociaux sont en train de s'entraîner et s'enrichir mutuellement en ce moment par delà les frontières ainsi que les prises de conscience et d'auto-organisation qui se sont développées dans ces révoltes et qui vont continuer à s'y développer, vont nécessairement poser la question de la prise en main de la société par les travailleurs.
Nous pouvons nous instruire et instruire les travailleurs ici en contribuant à montrer comment les travailleurs font ce chemin là-bas, les difficultés qu'ils rencontrent, les obstacles qu'ils surmontent, en en relayant toutes les étapes, en en faisant connaître toutes les péripéties, en relayant au maximum les informations de cette révolution sociale et politique en marche. Notre futur à tous.
Jacques Chastaing le 7 avril 2022
Photo : manifestation ce 7 avril 2022 à Talawakelle au Sri Lanka pour exiger le départ du président : "Ghota go home"

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