Des grèves partout durant deux jours (avec 200 millions de grévistes seulement le premier jour et des Etats qui ne sont entrés dans le mouvement que le second jour comme le Sikkim et l'Arunachal Pradesh) - ce qui est une première historique depuis l'indépendance - dans toutes les professions, tous les milieux, toutes les castes, dans tous les Etats, avec des manifestations traditionnelles, des manifestations de femmes, d'étudiants, de paysans, des indigènes, des processions aux torches, des rassemblements en motos et vélos, du théâtre de rue, des peintures murales de manière extensive, des sit-in, des meetings, des blocages de routes, de ports et de voies ferrées avec le plus souvent des actions communes paysans et ouvriers, ce qui est un grand acquis de la période.
Les États du Kerala, Tamilnadu, Puducherry, Andhra Pradesh, Telangana, Odisha, Assam, Jharkhand et l'Haryana ont été complètement paralysés avec y compris la participation des commerçants et artisans. Le Bengale occidental et le Tripura ont été témoins d'une grève presque totale dans tous les secteurs. Les autoroutes nationales ont été bloquées dans tout le pays et les voies ferrées ont été bloquées à de nombreux endroits comme presque tous les grands ports.
Les paysans et les travailleurs agricoles ont rejoint les protestations ouvrières un peu partout. Ainsi, le Bengale occidental a quasiment été bloqué par les paysans et les pauvres des campagnes en bloquant le fonctionnement de l'Etat à plus de 700 endroits, bloquant les routes et les trains. De même, défiant les menaces et l'intimidation ainsi que la répression de l'État avec de nombreuses arrestations un peu partout, l'Etat du Tripura a lui aussi été quasi complètement paralysé
Au Tamilnadu, il y a eu plus de 500 manifestations avec une participation énorme. Plus de 1 200 000 personnes ont pris part à des piquets de grèves devant les entreprises de l'Etat. Les bus n'ont quasi pas circulé en aucun endroit. Les taxis et même les pauvres des rickshaw ont fait grève et manifesté en nombre. Au Maharashtra, au Karnataka, en Andhra Pradesh et au Telangana, des manifestations communes massives ouvriers-paysans ont été organisées également. Au Jharkhand, les paysans de la coordination paysanne SKM ont bloqué toutes les routes. En Assam, dans l'Uttar Pradesh, le Gujarat, le Madhya Pradesh et l'Utarakhand, le Chhattisgarh, le Bihar et dans le Jammu & Cachemire la participation a été massive tant dans les centres urbains que dans les campagnes.
Les travailleurs des principales entreprises privées internationales ont arrêté le travail dans toutes les grandes zones industrielles de Goa, du Karnataka, Maharashtra, Chhattisgarh, Punjab, Bihar, Rajasthan, Bengale Occidental, Meghalaya, Arunachal Pradesh, Tamilnadu, Telangana et Haryana comme dans toutes les grandes villes ouvrières. Les banques et les assurances ont été quasi arrêtées à 100% tout comme les électriciens en grève à 100%. A Gurugram, banlieue à la fois chic et ouvrière de Delhi, ce sont les femmes, les ouvrières de maison, qui ont mené la lutte. A Mumbai (Bombay), les citoyens eux-mêmes sont descendus dans les rues pour apporter leur soutien aux ouvriers en grève. Le Tamilnadu a vu une manifestation de 50 000 employés de banques et une grève de 100 000 employés du gouvernement. Les ouvriers des plantations de thé ont été nombreux à faire grève environ à 60% et même 70% pour le Darjeeling. Pareil pour la jute, la canne à sucre... Partout, les travailleurs précaires sans aucun droits ont aussi participé en nombre, les ASHA sans statut, les travailleurs et les aides d'Anganwadi, les travailleurs des repas de mi-journée, les employés de MGNREGA, les contractuels, les travailleurs de la construction, du nettoyage, les manœuvres de base, les travailleurs saisonniers, occasionnels, les travailleurs journaliers et les ouvriers agricoles étaient bien présents.
Partout, c'était la joie, un sentiment de victoire malgré la répression, d'un immense succès et d'une énorme claque au gouvernement de Modi et sa politique réactionnaire de division et de haines au service des capitalistes.
La suite à cette double journée est annoncée par le SKM, la coordination paysanne, avec une semaine d'actions du 11 au 17 avril. Et pour faire le lien, les femmes dans la filiation du grand mouvement féminin de Shaheen Bagh en 2019-2020, les anganwadi (employées de crèches rurales, aides maternelles et sanitaires), les premières aux côtés du soulèvement paysan et en lutte dans quasi tout le pays pour les salaires et leurs statut depuis des mois, qui viennent d'organiser un mahapanchayat (AG de démocratie directe) commun en Haryana (Etat où le SKM joue un rôle central) entre ouvriers, paysans, étudiants, femmes pour mener la lutte tous ensemble.
Le mouvement paysan et loin d'être fini, le mouvement ouvrier vient de montrer sa force, Modi finira-t-il son mandat ?
Jacques Chastaing, le 29.03.2022
Photo : manifestation dans l'Andhra Pradesh ce 29 mars 2022

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