Ce 31 décembre m’invite à jeter un regard sur cette année 2010. Et ce qui s’impose à moi est moins les traces de mon parcours personnel, éclairées par l’heureux cheminement de mes proches, que l’ensemble du paysage entrevu.
Mon statut, heureux, de « retraité » a fait de moi un observateur disponible et plus souvent désolé de la marche du monde. Il m’a rendu plus attentif aux affaires de l’Europe, dont la France, et donc il m’a jeté dans la perplexité :
Sarkozy, le démagogue, ayant séduit le peuple, n’a cessé cette année de piller le Pays, de détruire systématiquement ses valeurs ancestrales. Il a continué à s’attaquer à la liberté en peaufinant son réseau policier, en imposant des lois assassines. Il a mis à mal le principe d’égalité, en favorisant les copains, riches bien sûr, et en appauvrissant les autres. Il a déchiré le tissu fragile de la fraternité en pourchassant des pauvres du seul fait qu’ils appartenaient à une communauté autre que la sienne, les roms, en stigmatisant des pans entiers de la population qu’il pousse à la délinquance par l’entretien du chômage, et de la déscolarisation.
En résumé, cet homme n’a cessé durant cette année 2010 de brouiller l’image que la majorité des citoyens ont de leur pays, la France, et que les étrangers aimaient à y trouver.
Ce bilan lamentable aurait de quoi désespérer : des gens souffrent, meurent, de par la simple bêtise, de par la fatuité et la propension perverse à détruire d’un petit bonhomme qui se les joue à la Napoléon.
Or la lecture d’une farce vient de balayer ma désespérance.
Il s’agit d’une pièce hilarante écrite en 425 avant J.C. par un certain Aristophane qui brocarde allégrement Cléon, le démagogue qui règne alors sur Athènes, et qui est décrit par certains comme « un parvenu sans éducation, violent, vantard et concussionnaire » (Wikipédia)
http://remacle.org/bloodwolf/comediens/Aristophane/cavaliers.htm
Deux compères, Démosthène et Nicias se lamentent des conditions dans lesquelles vivent les athéniens, Cléon, l’homme fort du moment ayant abêtit le peuple (représenté par le personnage de Démos).
Ces deux citoyens expriment d’abord timidement leurs craintes puis s’enhardissent pour finir par ourdir un complot qui devrait renverser Cléon, « ce paphlagonien !», au profit d’Agoracritos, le marchand d’andouilles. Ce dernier qui doute de ses capacités à diriger, devrait pourtant faire l’affaire car il présente le même profil que Créon : « Es-tu de gens beaux et bons ? » l’interroge Démosthène. « J’en atteste les dieux, je suis de la canaille…Je n’ai pas reçu la moindre éducation ! » et Démosthène de lui répondre : « La démagogie ne veut pas d’un homme instruit, ni de mœurs honnêtes, il lui faut un ignorant et un infâme !... »
Et le complot réussira. Cléon sera renversé, le peuple (Démos) comprendra qu’il s’était fait roulé et reprendra le pouvoir, en en délégant toutefois une partie au marchand d’andouilles !
Quant à Cléon (qui mourra au combat quelques années plus tard) il utilisera, dans la pièce, ses talents oratoires à vendre des andouilles faites de viande de chien et d’âne, qu'il ne vendra qu'à des étrangers, ces gens qu'il a honnis, se contentera de prostituées et boira l’eau sale des baignoires !
On imagine facilement la joie du public qui, face à une telle pantalonnade, se vengeait d’un personnage autoritaire et méprisant. Aussi pouvons-nous comprendre que devant cette leçon de démocratie subversive, les maîtres d’aujourd’hui puissent interdire aux jeunes l’accès à l’apprentissage du grec ancien, ou simplement à l’instruction (16.000 postes d’enseignants seront supprimés en 2011 !) Pas question de rendre les jeunes trop intelligents, si l’on veut diriger en paix.
Sauf que les Cléon, les Sarkozy, ça passe. Et que la vie, la générosité, la soif de liberté, d’égalité, de fraternité ne s’éteint pas si facilement chez une peuple.
Alors, espérons. Ne nous leurrons pas par des vœux qui tenteront d’exorciser l’ « annus horribilis » 2011 qui nous attend. Un peu de patience et Démos revivra. C'est mon voeu, non pour 2011(faut quand même pas rêver) mais pour la suite, et ça, c'est possible.