Le don qui est susceptible de faire naitre un pardon, reste un geste emblématique. Dans la mesure où, la faute avérée, engendre une culpabilité. Il advient que ce don souligne cette responsabilité, envers l'autre. Le fautif cherche par l'échange a apaiser la situation, en brisant le silence, qui entache sa position sociale dans le groupe. Hormis la valeur de l'objet, la symbolique du pardon, est un enjeu central dans ce type d'échange, parce qu'il appelle à la bienveillance du receveur du don, quant à l'égarement du fautif, de lui accorder ou non, son pardon. Quoi qu'il en soit, la personne blâmable aura entamé par le fait d'admettre ses torts, le chemin de la reconnaissance. D'où la transgression apparaît comme un mal nécessaire, pour les individus qui peinent, en premier lieu à discerner, l'utilité des règles sociales. Le pardon incarnant un geste fort qui dépasse les incompréhensions, des futiles humeurs passagères, non pas par faiblesse, mais par clairvoyance.
« Les esprits des morts, et les dieux sont les véritables propriétaires des choses, et des biens du monde. C'est avec eux qu'il était le plus nécessaire d'échanger, et le plus dangereux de ne pas échanger1. »
Qui a t-il de plus fort que le pardon, si ce n'est le fait d'aimer, bien que l'un n'est pas indissociable du second. N'a t-on jamais pardonné, par amour ( filiale, conjugale, amical) ? Les raisons d'aimer, tout comme celles de pardonner ne manquent pas. Elles ne sont cependant pas exemptes de limites, disons plutôt d'un « seuil de tolérance » subjectif, ou collectif. Sans compter que, c'est un message universel, diffusé à l'unisson, par différentes religions, comme celui de pardonner, via un amour inconditionnel envers son prochain. Avec le don sacrificiel du Christ comme figure de proue. Dans la logique religieuse, pardonner c'est se rapprocher de l'éternel, l'homme n'étant pas foncièrement bon, il est depuis sa création un transgresseur. Il doit suivre les enseignements sacrés, qui lui garantissent une prédestination, qui selon la somme de ses actes, sera plus ou moins heureuse. Le Pardon est une caractéristique de la sagesse divine, celle qui excuse la perdition des hommes, vraisemblablement indignes de ce privilège. Pardonner, c'est faire acte de paix, c'est retrouver un équilibre qui a été rompu par la présumée « ignorance » de l'individu répréhensible . Si aimer c'est s'abandonner à l'autre, le pardon rejoint cette forme d'aveuglement, car en passant outre le préjudice subie, on court le risque d'encore souffrir.
Dès lors, le don qui implore un pardon, tente de renouer un lien social 2. Toutefois, le pardon n'est pas systématique puisque bien au delà de la valeur du don, le trouble commis, n'est pas oublié pour autant. Celui qui s'est joué des règles garde une position fragile. Il doit être conscient que sa présence n'est que tolérée. Il a failli quant à sa responsabilité envers un autre, envers le groupe voire envers le(s) dieu(x). Aucun objet, ne peut incarner la valeur de la relation qui a été bafouée. Néanmoins, l'offrande met en lumière une honte, un calvaire, un « chemin de croix », dont l'intéressé cherche à se délivrer. Le pardon est un geste d'amour, qui donne l'occasion à l'autre d'être à nouveau aimé, puisqu'être pardonné, c'est avant tout, être touché par la grâce.
1 Marcel Mauss, Cit, Essais sur le don.
2 Dans le cas, ou ce don n'est motivé par une perfidie.