La libération de Ross Ulbricht, fondateur de Silk Road – le "eBay de la drogue" où étaient librement échangées drogues, armes et autres produits illégaux – et la grâce accordée aux Proud Boys, un groupe suprémaciste blanc impliqué dans l’assaut du Capitole, exposent les profondes contradictions et injustices systémiques des États-Unis. Ces individus, coupables de crimes graves ou d’actes terroristes, sont aujourd’hui libres, des militants comme Mumia Abu-Jamal, qui ont dénoncé les oppressions raciales et défendu les droits civiques, continuent de purger de lourdes peines, souvent pour des accusations controversées.
L’hypocrisie est d’autant plus flagrante lorsqu’on imagine ce qu’il serait advenu si le mouvement Black Lives Matter avait tenté ne serait-ce que le quart de ce qu’ont accompli les Proud Boys en prenant d’assaut le Capitole. Les activistes du mouvement Black Lives Matter n’auraient pas parcouru 500 mètres avant d’être arrêtés ou abattus, sans avoir pu approcher l'institution concernée. Cette violence disproportionnée illustre comment les inégalités sociales et raciales, loin d’être résolues, structurent une société américaine qui se présente démocratique mais réagit différemment selon la couleur de peau ou les idéologies de chacun.
Face à l’émergence des BRICS et à une contestation grandissante de son hégémonie, les États-Unis se replient sur leurs fondations historiques : des inégalités sociales et raciales ancrées qui, malgré des apparences progressistes, n’ont jamais été surmontées. Dont Donald Trump incarne la version brute et sans filtre d’un pays qui, depuis sa création, a maintenu son pouvoir par la violence et la terreur, que ce soit à l’intérieur de ses frontières ou par son interventionnisme extérieur.
Après sa première mandature, Trump a conservé des dossiers top secrets et menaçait de les divulguer par peur de répondre devant la justice, lui qui est visé par plusieurs affaires. Par la suite, il a orchestré l’attaque du Capitole, un acte que ses détracteurs qualifient de terroriste, malgré tout, il investit aujourd'hui une seconde fois la présidence des États-Unis. Ce comportement contraste avec l’expérience de Nelson Mandela, qui passa une grande partie de sa vie en prison pour des actes, qualifiés de terroristes dans sa lutte contre l’apartheid, avant de devenir le président qui tenta de rassembler un pays divisé.
Ceci dit, avec Trump on est plus proche dans la forme et le fond d'un Silvio Berlusconi que d'un Nelson Mandela. Surtout que contrairement à Mandela, Trump n’a jamais vu la couleur d’une cellule ni les dures réalités du quotidien des populations opprimées, et doit encore moins savoir cultiver les tomates lui ayant un visage qui pourtant en arbore la couleur. Ceci dit, Mandela œuvrait pour unir une nation meurtrie suite à un régime d’apartheid sans merci, Trump lui, divise en promouvant une vision d’une « Amérique monochrome » où les inégalités se creusent encore davantage.
Cette comparaison inattendu, entre ces deux chefs d'États, Trump et Mandela, se dessine en partie autour d’Elon Musk. Le fait que certains voient ce dernier comme un digne héritier des idéaux d’apartheid, qui aujourd’hui réapparaissent sous des formes nouvelles. En effet, ses prises de position controversées, ainsi que son soutien à des mouvements d’extrême droite – par exemple, l’appui de Musk au parti allemand AFD, accusé par ses détracteurs de faire revivre certains échos du nazisme qui plus est à la maison mère – viennent renforcer cette image d’une convergence entre des élites technocratiques et des forces autoritaires.
Ces éléments illustrent une tendance inquiétante dans le paysage politique contemporain. Alors que certains dirigeants, en usant de méthodes extrêmes et en menaçant l’ordre démocratique, défendent une vision autoritaire et clivante, d’autres, à l’image de Nelson Mandela, ont incarné la lutte pour l’unité, la justice et l’émancipation des opprimés. On observe ainsi un véritable deux poids deux mesures dans le fonctionnement de l'actuelle présidence américaine. Tandis que des militants des droits civiques ou des citoyens issus des minorités subissent une répression féroce, les actes terroristes des Proud Boys, ou les activités illicites de Ross Ulbricht, sont traités avec clémence.
Autant dire que derrière le masque de la liberté et de la démocratie se cache un système inégal, bâti sur les oppressions et la violence. L’Amérique que Trump incarne, avec ses grâces sélectives et ses manœuvres politiques, n’est rien d'autre qu’un miroir déformé, à savoir la caricature d’un pays que dis-je d'un empire qui règne d’injustices institutionnalisées et où certains, toujours les mêmes, ont plus de droits que de devoirs.
Aussi, les paradoxes semblent être à leurs combles quand on sait que Trump tient, comme forme d'invasion, les clandestins en horreur. Mais, suite à ses dernières sorties, il s'est mis en tête à huis clos de faire de Gaza la côte d'Azur du Moyen-Orient, voire d'occuper toute la région. En premier abord, développer Gaza qui est devenu un endroit inhabitable, comme si les États-Unis, depuis une décennie en soutenant l'État d'Israël, n'y étaient pour rien. Il compte rebâtir Gaza pour en faire un nouveau Cancún pour springbreaker qui viendront se vider la bile comme pour vider les espoirs des gazaouis et de l'humanité, à nues face à un empire qui ne fait plus semblant et qui quoi qu'on dise n'a jamais eu le rôle du sauveur.
Le regretté Mandela avait proclamé que " nous ne serons jamais libres tant que le peuple palestinien, le Timor Oriental et le reste du monde ne le sont pas ". Au nom d'une liberté qui brille de devoirs envers l'ensemble du vivant et non une liberté comme justification d'expropriation et de massacres de masses. Car, la violence bien qu'elle soit camouflée sous des idéaux humanistes qui dans les faits sont expansionnistes, n'a jamais honoré aucun empire, ni aucun peuple, ni hier et encore moins aujourd'hui.