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Billet de blog 8 décembre 2021

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Non à l'indépendance kanak, mais oui au racisme

Les clips du voix du non à l'indépendance

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Pour voir le clip en question : https://www.youtube.com/watch?v=tANNTIEZY4A

Les clips des voix du non ponctuent un recroquevillement vers sa communauté politique. Un choix politique qui est prôné haut en couleur, à savoir non à l’indépendance kanak, mais oui au racisme. Le vilain mot est lâché le « racisme » celui qui fait tâche sur la fresque du vivre-ensemble encore non aboutie. Du fait d'une identité néo-calédonienne, soliptique, alors que la jeunesse calédonienne en général, et les océaniens en particulier végètent (discrimination à l'embauche, accès au logement, inégalités sociales, etc.). L'intersectionnalité est à l'honneur dans ce clip où les clichés pleuvent en pagaille. À vrai dire, on en attendait pas moins du collectif de la voix du non. À l'image du magazine Valeurs Actuelles qui peigna un portrait plus que douteux de la députée de la France Insoumise, Danielle Obono. C’est dire la suffisance des campagnes loyalistes promouvant du pathos (essentiellement de la peur) . Leurs discours, dénotent de la discrimination, via la chosification du communautarisme kanak qui témoigne d'une stigmatisation prononcée, à l'encontre du projet souverainiste indépendantiste kanak, justifiant sans vraiment le justifier, un racisme systémique. Si bien que le choix du non à l'indépendance de la Kanaky-Nouvelle-Calédonie, consiste à réaffirmer un ordre social préétabli, comme empreinte coloniale.

Le temps colonial se juxtapose entre territoires occupés et anciennement occupés (indépendant administrativement, mais toujours occupés par l'ancien colonisateur économiquement). Les plaies engendrées par l'impérialisme d'hier restent encore aujourd'hui ouvertes. Cependant, la France favorise un « rééquilibrage », en subventionnant par exemple des programmes de formations visant à établir une « classe moyenne indigène » , comme le programme Cadre avenir qui permet à l'ancienne puissance coloniale d'instituer, à travers la méritocratie, son manifeste bon vouloir. Et ce, dans le but de « colorer » les administrations, former des cadres qui rempliront des rôles de compradores, de sous-chefs, visant à faire admettre aux subalternes la réalité de l’ascenseur social. Ce processus, relèverait-il d'une forme, de social/racial washing ? Ce social/racial washing se justifie également dans la comparaison et hiérarchie morbide qui est encore faite des peuples colonisés par rapport aux préjudices subis pendant le temps colonial, avec pour référence ici, l’holocauste des Aborigènes. Cette hiérarchie sert à passer outre les violences subies par les Kanak lors de la colonisation en Nouvelle-Calédonie-Kanaky, faisant la timide éloge de l'exception française, via la méritocratie qui fait le jeu d'une égalité de façade. Étant donné que celle-ci sert a faire s'estompé les violences subies lors de la colonisation en Kanaky-Nouvelle-Calédonie, du moins d'envisager de les relativiser.

Sans parler de la méconnaissance crasse qui suinte le débat quant à l'indépendance ou non de cet archipel. Elle a tendance de manière faussement arbitraire d'érigé l'exemple de l'indépendance vanuataise en tant que la Cuba du Pacifique Sud, occultant par confort intellectuel  toute formes d'oppressions systémiques émanant d'anciennes puissances coloniales a déstabilisé les pays nouvellement indépendants  et/ou renouveler leur domination Elle a tendance de manière faussement arbitraire d'érigé l'exemple de l'indépendance vanuataise en tant que la Cuba du Pacifique Sud, occultant toute formes d'oppressions systémiques émanant d'anciennes puissances coloniales a déstabilisé les pays nouvellement indépendants et/ou renouveler leur domination (franc CFA). L'usage de cet exemple sert davantage une hypothèse essentialisante voir négrophobe . Le Vanuatu serait alors le Cuba du Pacifique Sud en évoluant en marge des recommandations de certaines institutions internationale comme la Banque Mondiale, et le FMI. Suivi de près par l'argument de l'ogre chinois, marquant la séduisante facilité de faire un amalgame de plus en citant ces deux phénomènes. Soulignant surtout la difficulté d'élever le débat à un niveau macro-social. La menace chinoise aussi terrifiante soit-elle est présenté comme telle, en Occident expliqué par le détrônement de celui-ci dans l’échiquier du leadership mondial. L'Occident a déjà vécu sa révolution industrielle et peine désormais à se renouveler, il flirte avec les questions identitaires (débats sur l'identité nationale) et pointe du doigt les communautarismes comme obstacle à un rayonnement national. Marquant ainsi la difficulté de l'Occident de se réinventer ce qui cristallise ses inquiétudes face à la montée des puissances émergentes comme la Chine. La doxa néo-libérale qui a pourtant pris vie en Occident est en train d'asphyxier celui-ci. Pour le sociologue américain Anthony Giddens, « l'Occident souhaite la mondialisation alors que celle-ci affaiblit son pouvoir ».


L'antagonisme de la tradition vs la modernité, trouve un écho dans ce débat relatif à l'autodétermination de cet archipel, faisant office de comparaison entre sociétés matérialiste et non matérialiste. D'où la difficulté d'un entre deux, tant la vision bi-polaire obscurcie le débat. L'argument caricatural du « retour à un âge de pierre » est naïvement prédisposé. Comme si le passage de l'un à l'autre était possible, et aussi simple. Cela est révélateur d'un souhait univoque de mettre de côté tous les aspects négatifs de la colonisation, dans le but de se concentrer sur les bienfaits de la colonisation afin que l'individu emprunt de nostalgie retrouve la raison quant à sa vision fantasmé ou non du passé, qu'il n'aurait pas ou peu connue et dont il ne peut que s'imaginer les contours. De ce fait, il (s'il retrouve la raison), pourra (s'il le souhaite) prêter allégeance à la société de la consommation de masse, autant dire l'apothéose de la civilisation contemporaine, et dont le mérite constituerait le tapis rouge menant vers la lumière de la superbe occidentale, adressé aux indigènes qui sont encore réfractaires, ou pour ceux d'entre eux qui songeraient (dans l'obscurité) timidement à l'emprunter.


La majorité du corps électoral, est contre l'indépendance, celle-ci entend préserver l'identité néo-calédonienne, de commodités administratives, propre au fait de rester français. Une majorité électorale qui éclipse un tant soit peu les minorités en général, et en particulier, les indépendantistes. Non sans rappeler les propos d'un Pierre Desproges qui avançait que « La démocratie est la pire des dictatures parce qu'elle est la dictature exercée par le plus grand nombre sur la minorité ». Ainsi, on peut se représenter la démocratie comme étant la dictature de la pensée unique. Cette dernière pensée qui consiste à croire (de façon plus ou moins crédule) que le système politique occidental, constitue le meilleur système. Alors que pour Winston Churchill « La démocratie est le pire système de gouvernement, à l'exception de tous les autres qui ont pu être expérimentés dans l'histoire ». Nos sociétés contemporaines se sont inspirés à leurs fondements, de la démocratie athénienne Ecclesia qui fut le paravent de l'aristocratie, à savoir préserver une paix sociale, pour que la classe dominante prospère paisiblement. De nos jours, l'éviction de la figure d'un État souverain au profit du secteur privé a creusé des écarts sociaux tels que la paix sociale demeure fragile. De plus, l'État ostracise ses citoyens pour mieux les stigmatiser (relatif à certaines banlieues françaises), en leurs fermants des portes (stigmatisation à l'embauche, intersectionnalité, etc.), afin de mieux justifier leurs oppressions. Faisant écho aux propos, de Blaise Pascal concernant l’ambiguïté du peuple, quant à son besoin de croire que le système dans lequel il évolue, est légitime, sans quoi il ne peut accepter de s'y soumettre. Quand bien même les minorités soient oppressées, par le système, le peuple (à savoir la majorité) préfère fermer les yeux.


Le cadre discursif tourne autour de la question (de façon plus ou moins implicite) raciale, via des questions identitaires, mobilisées sous fond d'ethnocentrisme (sous couvert de projet de société), ce qui a tendance à rendre le débat relatif à un dialogue de sourds. Une future qualification ( indépendance ou non-indépendance) qui réfléchit un « concours de prestige essentialiste » un ethno-nationalisme kanak d'un côté, et de l'autre un ethno-nationalisme français. Relatif au bi-partisme de la classe politique local qui s'amorce par des prénotions propres à un différentiel civilisationnel insoluble pour les loyalistes, tandis que les indépendantistes dénoncent une radicalisation de la figure de l'autre, comme source d'exclusion sociale (du moins de certaines strates sociales). Le vivre-ensemble en Nouvelle-Calédonie-Kanaky se fait l'écho d'une dissonance cognitive, car la classe politique attise les foules et ne constitue pas le peuple, causé par une ambition électoraliste binaire, lié au calendrier référendaire prépondérant qui conforte une crispation politique/sociale, tuant l'identité néo-calédonienne dans l'œuf.

Il faut dire que le bipartisme néo-calédonien, comme norme binaire irrigue l'ensemble de la société, car il détermine les rapports de pouvoir comme fondement de la société néo-calédonienne. Les identités politiques, découlant du bipartisme (loyaliste vs indépendantiste), apparaissent comme des représentations sociales figées. Dans le cas où la binarité politique comme représentation sociale serait questionnée, cela reviendrait pratiquement à remettre en cause l'identité même, de l'individu qui aurait du mal à se construire, en dehors de ce schéma politique intrinsèque. Ainsi, les référendums enferment, les individus, dans des identités politiques. Par conséquent, nous ne pouvons avoir une vision claire de ce vœu unitaire qu'est le destin commun, car nous sommes cristallisés, dans une identité politique qui prend le dessus sur tout le reste. Dans le but d'inverser cette tendance, il conviendrait, de déconstruire les représentations sociales qui nous cristallisent dans la binarité. Autrement dit déconstruire les différences, alimentant le confort appauvrissant, de l'entre-soi. D'où le fait que, cette contribution insinue que le terme de commun, vis-à-vis du destin auquel il se rattache ici, reste ambigu. La volonté de faire commun, incombe notamment, à la société civile. Celle-ci peut manifester ce souhait via des réseaux de solidarités collectifs, hors des sentier battues électoralistes binaire qui sont alimentés de façon sous-jacente, par la question raciale (français loyaliste blanc vs indépendantistes kanak).

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