Qu'est ce qu'être néo-calédonien ? Ce qui découle de l'imaginaire collectif, c'est qu'être néo-calédonien s'inscrit dans une perspective progressiste tandis que la question identitaire kanak via son souhait d'une plus grande reconnaissance de sa culture, est perçue comme régressive. Est-ce que le fait d'être kanak signifie systématiquement d'être calédonien, ou est-ce que l'individu d'origine kanak, selon sa capacité, a vacillé entre tradition et modernité lui permet d'être kanak, et à la fois calédonien, car ces deux identités semblent renvoyer à un idéal politique différent ( progessiste-calédonien contre traditionnaliste-kanak). Pourtant ces deux bords politique ne remettent pas vraiment en cause, le patriarcat1 qui semble « faire bon ménage », à la fois avec la construction d'une identité néo-calédonienne, pourtant supposé progressiste, et d'une identité kanak qui se revendique comme tribaliste. Cette dernière remarque tend à nuancer la représentation progressiste de la modernité occidentale, car la question de l'égalité homme/femme a toujours constitué le talon d'achille, de la modernité2. Toutefois la société mélanésienne n'est certainement pas parfaite, sa structure clanique engendre aussi des inégalités, certes moins importantes. On lui reconnait un ancrage démocratique important via une recherche prononcé du consensus, bien que la position de la femme paraît diminué. Cependant il faut souligner le fait que la société mélanésienne recense une féminisation croissante, de son intelligentsia, apportons de fait un discrédit, quand à une représentation de la femme kanake, soumise. Il n'est pas question, ici de faire le procès de telle ou telle culture, cependant de prendre du recul, face aux points de vue ethnocentriques qui consistent à croire que seulement la culture, les valeurs de l'un seraient meilleures que celle de l'autre. Étant donné que le projet indépendantiste kanak, comme le projet loyaliste sont au nom de la mondialisation, sous le joug du surproductivisme. C'est en cela que les questions identitaires sont constamment ressassés qu'il y est contexte décolonial ou pas 3 , elles servent de cache misère au capitalisme patriarcal qui lui quel que soit le contexte politique est conforté.
Dès lors, la cristallisation politique néo-calédonienne, n'est-elle pas le reflet d'une certaine suffisance patriarcal 4 , sous couvert de pseudo « bonne gouvernance » ? Suffisance, d'une vision apologétique marxiste qui consiste à contrôler le processus de transformation du nickel. Certes viable, mais au combien aliénante via une perception émancipatrice du surproductivisme, au grand dam, de la biosphère. Et pour cause, cela dénote le discours de certains indépendantistes vantant le rapport privilégié à la terre du peuple premier, qu'eux mêmes ( sous couvert de modernité) contribuent à pervertir. Suffisance à « rester » français qui n'exempte, en aucuns cas de « devoir » porter un projet de société ( quand bien-même) ambitieux, répondant ainsi à des enjeux contemporain ( exemple, le réchauffement climatique). Suffisance, du fait de ne pas, envisager de manière ferme, un « après nickel », traduisant une certaine tiédeur politique, d'aborder cette question. Et enfin suffisance d'évoquer le destin commun, telle une formule magique unitaire qui revêtirait d'avantage la forme d'une « thérapie de groupe stérile », renvoyant chacun devant sa volonté de tendre ( ou non) la main à l'autre. Et pour cause cette suffisance, revêt la forme d'un capitalisme patriarcal qui quel que soit l'issue référendaire, sera lui, conforté. A l'image du remous que suscita la découverte du nouveau gouvernement en date ( suite aux retrait des indépendantistes, le 2 février 2021, du gouvernement de Thierry Santa) ne comportant pour l'instant que peu de femmes.
L'humilité apparaît comme le fond de commerce du capitalisme patriarcal. Une « valeur slogan » qui permet d'assoir le respect, voire de taire la violence de la subordination. Si l'on considère la définition A, de l'humilité, d'après le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales ( cnrtl.fr) qui nous explique la chose suivante « Disposition à s'abaisser volontairement (à faire telle ou telle chose) en réprimant tout mouvement d'orgueil par sentiment de sa propre faiblesse ». Quant à la définition C qui fait référence à la modestie ( d'une profession), « Caractère de ce qui a peu d'importance, peu d'envergure, peu d'éclat ». En ces termes on peut se représenter l'humilité comme une forme de résilience, une sorte de capacité des subalternes, à relativiser la domination. Pourtant ce que l'on aime à retenir de l'humilité, en tout cas ce qui est « vendeur » dans ce terme érigé en vertu, c'est son aspect servile qui a coutume de plaire par la révérence qu'elle suppose. Elle est un trait des perdant(e)s magnifiques, taisant un tant soi peu, la violence de la subordination. Tout autant qu'une grâce qui se joue de l'orgueil étant la promesse, d'un imposant silence qui enseignent aux téméraires, à se passer de mots, pour éprouver de l'empathie via un regard, un hochement de tête qui se plait à cligner les yeux. Malgré sa grandeur, elle est une simplicité, une présence réconfortante, une force tranquille, tel un charisme qui tait son nom. Vous l'aurez compris ici, n'est pas question de faire le procès de l'humilité, plutôt de dénoncer une instrumentalisation de celle-ci par le capitalisme patriarcal. De sorte que, cette instrumentalisation servirait à ne pas, dénoncer le système de domination perpétué par le capitalisme patriarcal, en saluant la capacité des subalternes, à se faire oppresser, de préférence en silence ( d'où l'allusion aux perdant(e)s magnifiques ). Autrement dit, féliciter les subalternes d'être humble, revient en quelque sorte à cautionner le système de domination, donc ici le capitalisme patriarcal.
1 Du moins s'empare brièvement de la question d'inégalités hommes/femmes par opportunisme politique.
2 Il est intéressant de rappeler à ce titre que les noirs ont eu le droit de vote avant les femmes blanches, que ces dernières il y a une décennie ne pouvaient ouvrir de compte en banque sans l'autorisation de leurs conjoints.
3 Ceci dit amplifié en contexte décolonial par le « fantasme politique » d'un rixe ethnique, jugé probable.
4 Avec pour emblème les « deux pères » de cet archipel, j'ai nommé Jean-Marie Tchjibaou et Jacques Lafleur, avec cette image forte de leurs fameuses poignées de main.