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Billet de blog 23 juillet 2019

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La migration, comme quête de la modernité

L'avant propos

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Avant propos

«  Fuir, il faut fuir cette patrie volée où règnent les tyrans colonisateurs.

Malgré tout, on partira, et c'est la ruse, les milles stratagèmes, le stoïque et dur courage. En novembre 1924, à l'arrivée d'un paquebot à Marseille, on lance des jets de vapeur soufrée dans l'entrepont, pour le nettoiement. A moitié suffoqués, 57 Kabyles sortent chancelants, « comme des rats » disait « spirituellement » à l'époque Le Petit Parisien ! Ils avaient enduré, cachés, l'atroce traversée risqué la mort pour échapper, pour venir en France. Sans pitié, on les rapatria !

Puis le drame terrible du Sidi Ferruch, où 12 indigènes trouvèrent la mort après des souffrances inouïes, victimes des implacables règlements qui les réduisaient à se livrer à des trafiquants de leurs misère.

Nous ne parlons pas des drames du même genre qui arrivent toujours et sur lesquels on fait le silence.(...)

Alors hypocrite, la presse bourgeoise cache (sous) une feinte indignation « humanitaire » la responsabilité criminelle de la colonisation... »1

L’apanage du développement par les sciences dures, au grand dam des habitants du Tiers Monde a eu pour effet de mener des projets déphasé de la réalité sociale de ses bénéficiaires. Les développeurs ont cru bon de se basé sur la figure de l’homo oeconomicus2 pour peaufiner leurs modèles. Cette vision standardisée, ne correspond pas de manière significative à un agent vivant dans un pays du Tiers Monde, car ces pays (bien que pauvres) paraissent, être enclin à une certaine solidarité communautaire, bien loin donc d’un individu décontextualisé. L’empowerment se définit comme le fait de responsabiliser, d’autonomiser des individus en difficultés sociales. Cette volonté fait suite au constat, que les damnés de la Terre ne s’approprièrent pas les actions, que les bailleurs de fond occidentaux avaient formulées à leurs égards ( non sans rappeler que la vision apologétique des sciences dures notamment l’économétrie qui a contribué à un certain échec du développement). Cette approche techniciste a accentué ses efforts sur les effets, et non les causes de la pauvreté. La notion d'empowerment fut le fer de lance des programmes de développement dans les années 90. Le mot d’ordre était à l’époque la participation, se traduisant en pratique par l’implication des bénéficiaires (sensiblement des femmes) à l’élaboration, à la mise en œuvre des projets.

«  En intégrant les diverses parties du monde au marché mondial, l'Occident a fait plus que modifier leurs modes de productions, il a détruit le sens de leur système social auquel ces modes adhéraient très fortement. Dès lors, l'économique devient un champ autonome de la vie sociale et une finalité en soi. Aux formes anciennes d'être plus se substitue l'objectif occidental d'avoir plus. Le bien-être canalise tous les désirs (le bonheur, la joie de vivre, le dépassement de soi...) et se résume à quelques dollars supplémentaires...

Ainsi s'universalise l'ambition au développement. Le développement, c'est l'aspiration au modèle de consommation occidental, à la puissance magique des Blancs, au statut lié à ce mode de vie. Le moyen privilégié de réaliser cette aspiration est évidemment la technique. Aspirer au développement veut dire communier dans la foi en la science et révérer la technique, mais aussi revendiquer pour son propre compte l'occidentalisation, pour être plus occidentalisé afin de s'occidentaliser encore plus. »3

L’empowerment implique une allusion indirecte à une autre notion, bien connu dans le monde du développement, qui est celle de la capabilité. Ce concept se définit selon les capacités intrinsèques d’un individu à prendre sa vie en main, au même titre que l’empowerment. Cependant cette dernière se distingue par une forme participative, contrairement à la capabilité, qui relève dans un premier temps de caractéristique physique de l'individu ( un aveugle n'aura pas la même capabilité qu'un voyant, etc), dans un second temps de la liberté individuelle. Hormis cette différence ces deux notions se rejoignent sur un point, c’est qu’elles sont toutes deux dépendantes d’un cadre, d’une structure, qui va accorder ou non plus de moyens pour que les individus jouissent de leurs libertés. Ces deux concepts sont donc des construits sociaux qui vont permettre aux individus d’avoir un certain contrôle sur leurs vies, et de pouvoir envisager des lendemains sous un angle nouveau. L’empowerment oriente les individus vers une forme d’entreprenariat social, du moins dans le domaine du développement, car dorénavant cette notion trouve une certaine redondance dans le monde de l’entreprise, où ce concept prend des allures de management participatif. Elle s’apparente à un moyen de favoriser l’estime de soi, la confiance en soi, de favoriser l’initiative, pour ainsi permettre à l’entreprise de parvenir à ses objectifs. Quant à la capabilité elle répond surtout à une projection, un idéal, motivant la mise en place de politiques wellfaristes4.

« L’Occident se pense lui-même en tant que détenteur de la « Liberté » [Cesari 1998] et le développement est conçu comme une libération. Dans ces conditions quels choix de société reste t- il aux pays du Sud5 ».

Paradoxalement la capabilité dans son apogée et, un stade qui permettrait de se libérer des contraintes de l’Etat. Or elle a besoin de celui-ci pour mettre en place un cadre favorable à sa pleine expression. A aucun moment Amartya Sen6 ne fait mention d’une contrepartie, cette liberté serait alors sans condition, ni responsabilité. De cette nuance, on perçoit une vision romantique de la liberté, véhiculé par cette notion, qui s’inscrit dans la tradition de la pensée libérale. Compte tenu de quoi l’empowerment s’assimile à un processus et la capabilité en serait la vision, si ce n’est la finalité. Tout deux font référence aux libertés individuelles, et de ce fait ont une visée uniformisante. Si bien qu’à terme, ils tendent à diffuser un certain paradigme7 néolibérale, qui a triomphé, en se hissant sous la bannière de la liberté ; la libre entreprise, la libre concurrence, etc.. Les pays occidentaux sont des Etats de droits donc à juste titre garants des libertés individuelles. Ils exportent leurs standards de vies, via le développement, en prônant une vertu, qui se voudrait humaniste. Par delà ces allures philanthropiques, le développement semble avoir comme objectif d’ériger le marché libre. Perceptible à travers l’émergence d’un partenariat public-privé en matière d’Aide Publique au Développement, qui s’assimilerai à une forme de déterminisme technologique8. Dès lors la capabilité, tout comme l’empowerment sont des construits sociaux qui sous couvert de développement visent à introduire les habitants du tiers monde dans une logique d’économie de marché

« Dans la modernité, le sens de la mobilité est toujours, tôt ou tard, transmis par la destination ou l’objectif poursuivis, eux-mêmes fortement dépendants, dans leur signification, de l’idée de progrès. Comme l’a notamment souligné Koselleck, la conscience historique moderne s’est en effet constituée autour de trois éléments directeurs. D’abord, l’idée que le présent lui-même porte des promesses d’avenir, grâce à l’avènement d’une rupture originelle. Ensuite, l’idée d’une accélération du temps et de l’existence de diverses formes de discontinuité temporelle, toujours au sein d’une conception globale du « progrès ». Enfin, l’idée que l’homme est l’auteur de l’histoire, introduisant alors une vision épique et séculière de l’avatar social (Koselleck [1979], 1990) », Anne Barrère , Danilo Martucelli, La modernité et l'imaginaire de la mobilité : 'inflexion contemporaine.

Ce processus modernisateur plus communément appelé développement, qui définie une politique expansionniste du marché libre, par le biais d'un modèle économique visant à atteindre une situation de « plein emploi » du moins de s'en approcher, pour dynamiser une localité mais encore d'améliorer le bien-être, le mieux être des individus qui la composent. Quant au concept de sous-développement il trouve ses origines dans le discours d'investiture du deuxième mandat à la maison blanche, du président des Etats-Unis, monsieur Truman du 20 janvier1949. Lors de son discours9 il diffuse quatre points importants ; seul les pays du nord ( le centre ) sont développés, tandis que les pays du sud ( la périphérie, le reste du monde) sont sous-développés ; les pays sous-développés sont caractérisés par un manque de progrès technique ; les pays du nord se doivent d'accompagner les pays du sud dans le processus d'industrialisation ; démarche qui se veut humaniste, étant donné les enjeux (éradiquer la pauvreté, la maladie, etc.). Ce discours aura pour effet d'institutionnaliser une hiérarchisation du monde, basé uniquement sur des critères économétriques (PIB/hab), ne prenant pas en compte la diversité culturelle, et sociale des pays du tiers monde. Comme un prolongement des thèses naturalistes émanant du Siècle des lumières, qui implique une maîtrise de la nature, par le progrès scientifique. De mieux interpréter le monde, par le biais d'un essor de l'esprit rationnel, mais aboutira dans une certaine mesure, sur une hiérarchisation des races (exemple la craniométrie). Les pays du nord vont donc aider les pays du sud à « évoluer », étant donné qu'eux seuls ont le savoir-faire, et l'apport technique nécessaire, afin d'atteindre selon leurs critères, le statut de « pays développé 10».

« Ils inventaient, dans une langue qui n'étaient pas la leur, un récit d'émancipation dont la vision n'étaient pas alors obscurcie jusqu'à faire bon marché des hommes en chair et en os. Ils donnaient à leur engagement une double dimension, messianique par une sorte de culte de l'humanité libérée, laïque par un rêve de république dont ils deviendraient les vertueux fondateurs (...)11 ».

La modernité en tant qu'idéal de société ( caractérisé par un paradigme libéral) s'appréhenderait dans les consciences collectives , tel un phénomène descendant c'est à dire des pays du Nord vers le Sud. Selon le bon vouloir paternaliste des anciennes puissances coloniales, avec sans oublier le rôle prédominant de l'Eglise, qui ont civiliser les peuples autochtones en les libérant un tant soi peu de leurs « pensées sauvages ». Ils auraient alors réussi ce pari audacieux d'apprendre aux primitifs à se « tenir de l'intérieur ». De ce phénomène résulterait une superbe occidentale, qui aurait le monopole exclusif de cette dite modernité12 voir de cet élan humaniste. Hors des figures tels que Patrice Lumumba, Thomas Sankara, Ali Soihili, etc, tous ces personnages se sont battus contre le nouveau visage du colonialisme à travers la dette des pays du tiers monde, comme forme de néo-colonialisme. Ils ont observé que l'indépendance ne libère pas les peuples, mais permet bel et bien aux anciennes puissances coloniales de perpétuer leurs domination. L'indépendance ne sous-entend  pas l'émancipation, qui doit donc être en rupture avec le néo-colonialisme13.

« Il y a un peu plus de cinquante ans est née (...) une espérance aussi grande pour les nouveaux « damnés de la terre », les peuples du tiers monde, que le socialisme l'avait été pour les prolétariats des pays occidentaux. Une espérance peut être plus suspecte dans ses origines et ses fondements, puisque les Blancs en avaient apporté avec eux les graines et qu'ils les avaient semées avant de quitter les pays qu'ils avaient pourtant durement colonisés. Cette espérance, c'était le développement. Mais enfin, les responsables, dirigeants, élites des pays nouvellement indépendants présentaient à leur peuple le développement comme la solution de tous leurs problèmes14. »

Ces figures panafricaines sont à ce titre des figures modernes car elles ont bousculé aussi bien un modèle impérialiste, que leurs propre modèle traditionnel ( droit des femmes, travailler, s'instruire ). Moderne car ils portaient un projet de société durable qui fait écho aujourd'hui à des enjeux contemporains ( écologie, justice sociale, droit des femmes), et humaniste car ce combat transcendent les hommes, puisqu'animés par ce vœu pieu de disposer d'eux mêmes. La raison étant que les pays du Sud sont en majeur partie caractérisé par une forme de " croissance appauvrissante" selon Jaddish Bhagwati, qui ne leurs permettraient pas de s'établir en Etat Providence,  leurs économies étant basés sur l'exportation de matières premières ( donc pas créatrice de valeur ajoutée) . Même si en Algérie fut mis en place des "industries industrialisante", le coût du transfert de technologies du Nord vers le Sud est tel, qu'il est difficile de se défaire de l'emprise occidental. Ce scénario fut sciemment orchestré, afin que la mondialisation profite semble t-il, au seul Occident. 

« Cependant, le rôle de l'altérité comme élément de construction de soi a été bien différent, en fonction des acteurs sociaux et historiques en présence. Au cœur de sa fabrication, on a en général mis des « êtres » traditionnels, à qui, le plus souvent, on a dénié d'emblée les traits de la modernité, c'est à dire, en réalité, de l'individualité. Membres de sociétés rurales, traditionnelles, ou résidus au cœur de la modernité de modes de vie passéistes et groupaux, ils vivent tous sous le primat de la collectivité. On a jeté sur d'autres l'opprobre d'une perversité ou d'une stigmatisation, d'un discrédit moral et social, leur interdisant aussi d'être capables de se tenir de l'intérieur.

On pourrait bien entendu trouver maintes figures héroïques, à des périodes historiques et dans des traditions nationales différentes, visant à incarner cette représentation de l'individu souverain. (…) Là où l'individu est censé être capable de résister au monde, capable de tenir et de se tenir lorsque le monde, c'est à dire son monde social, s'effondre...15 ».

 La migration clandestine résulte du contexte précédemment cité, elle est sujet à un racisme institutionnel qui tait son nom. Les pays occidentaux pratiquant une politique d'extrême droite sur cette question, tout en s'acquittant d'une quelconque responsabilité face à l'origine de ses flux. De plus ils se renvoient la balle face à cette problématique, via des allégations directes aux vues de la « non-action » de certains chefs d'états membre de l'Union Européenne16. Non seulement ils dévient le regard, sur  cette « macabre situation » , mais encore dissuadent au niveau légal toutes initiatives qui  soulageraient les rescapés ( le « délit de solidarité » ). Les personnes venant en aide aux damnés de la terre, personnifient le "principe d'Antigone ", tiraillé entre les lois de la cité, et les valeurs humaines. D'où la métaphore prédisposé de forteresse européenne, face à cette « déferlante » venue d'ailleurs, qui tente de chambouler des identités ataviques, d'après le discours populistes ambiant dans les pays du nord. Le migrant est stigmatisé tout au long de son parcours, en interprétant le rôle malgré lui de « l'envahisseur17 ». Les médias occidentaux ont tendance à aborder cette question, comme un phénomène isolé, réduisant ainsi les interprétations, à celle d'une menace de la quiétude de la cité.

«  Les images et les attitudes politiques façonnées et manipulées par les médias ont été cruciales. En Occident, les représentations du monde arabe n'ont cessé, depuis la guerre de 1967, d'être grossières, réductrices et ouvertement racistes, comme beaucoup d'études critiques en Europe et aux Etats-Unis l'ont établi et vérifié. Les films et émissions télévisées présentant les Arabes en « chameliers » loqueteux, terroristes ou cheikhs d'une richesse scandaleuse n'en ont pas moins continué à bon rythme. Quand les médias se sont mobilisés derrière le président Bush pour préserver l'american way of life et faire reculer l'Irak, ils n'ont pas dit ni montré grand-chose des réalités politiques, sociales et culturelles du monde arabe ( dont beaucoup sont très influencées par les Etats-Unis) – (…) Certes, les médias sont infiniment mieux équipés pour la caricature et le sensationnel que pour les lents processus culturels et sociaux, mais la raison profonde de ces idées fausses est la dynamique impériale, et surtout sa tendance à la séparation, à l'essentialisation, à la domination et à la réaction. »18

Les migrants qui veulent rejoindre l'eldorado occidental, ont pour certains péri en route. Leurs exil a eu raison de leurs " terrible espoir". La migration clandestine est perçu comme le reflet d'une humanité fragile rappelons inconsciemment les deux guerres mondiales, il y a de cela à peine une génération.  Or la migration évoque avant tout l'histoire de l'humanité. Hier et encore plus aujourd'hui, les hommes et les femmes ont émigré, en espérant trouver de meilleures conditions de vie, vers un ailleurs fantasmé plus ou moins lointain19. La mondialisation a induit l'idée qu'individuellement, la révolution aujourd'hui consiste à changer de frontières. Selon Nacira Guénif Souilamas, il existe des « mobiles légitimes » ( les expatriés), et des « mobiles illégitimes » ( les sans-papiers), tout est question selon cette sociologue d'avoir le "bon passeport", qui facilitera selon la nationalité, l'obtention de visas. Si bien qu' il apparaît que cette aspiration d'ailleurs ne soit pas rendue possible légalement pour les « mobiles illégitimes », qui symboliserait alors,  une mondialisation à sens interdit .

« En agitant le tiers monde comme une marée qui menacerait d'engloutir toute l'Europe, on n'arrivera pas à diviser les forces progressistes qui entendent conduire l'humanité vers le bonheur. Le tiers monde n'entend pas organiser une immense croisade de la faim contre toute l'Europe. Ce qu'il attend de ceux qui l'ont maintenu en esclavage pendant des siècles c'est qu'ils l'aident à réhabiliter l'homme, à faire triompher l'homme partout, une fois pour toutes. Mais il est clair que nous ne poussons pas la naïveté jusqu'à croire que cela se fera avec la coopération et la bonne volonté des gouvernements européens. Ce travail colossal qui consiste à réintroduire l'homme dans le monde, l'homme total, se fera avec l'aide décisive des masses européennes qui, il faut qu'elles le reconnaissent, se sont souvent ralliées sur les problèmes coloniaux aux positions de nos maitres communs. Pour cela, il faudrait d'abord que les masses européennes décident de se réveiller, secouent leurs cerveaux et cessent de jouer au jeu irresponsable de la belle au bois dormant .» 20

Le développement, a eu pour effet d'instituer un nouvelle forme de domination, faisant les beaux jours du capitalisme qui s'est construit sur l'ossature colonial d'antan, et qui perdure via le néo-libéralisme. Compte tenu des morts qui s'engouffrent aux portes de l'Occident, comment peut-il se considérer comme  « civilisé », sachant que cet attribut, s'est construit sur la racialisation de l'autre comme source d'exclusion de la commune humanité. Au terme de quoi la migration clandestine semble davantage incarner la boite de pandore de la modernité. Cette dernière refermant alors, tout les maux de l'Occident , qui tait sa responsabilité face au modèle prédateur, qu'il a mit en place dans les pays du Sud, un modèle blanc euro-centré, qui précède d'un haut degré de racisme dissimulé, à savoir « un racisme de civilisation » ( Balibar, 2018) 22.

« Les personnes blanches ont dû mal à discuter de la blanchité et des privilèges qui sont liés à cette place parce qu’elles ne se voient pas comme racialisées. Le sujet blanc marque les autres sans se marquer. Or, il s’agit de réfléchir au fait que leur place de privilégiés n’a pas été naturellement fixée, figée. Leurs privilèges sont construits sur la base de l’oppression d’autres groupes. Et le fait que les individus blancs ne comprennent pas qu’eux aussi parlent d’une place, d’un lieu spécifique, fait qu’ils ne comprennent pas la place du Blanc comme métaphore du pouvoir. » Djamila Ribeiro, propos recueillis par Anne Bocandé, publié le 12 juin 2019 sur africultures.com .

La migration clandestine, serait alors le mal nécessaire, qui permettrait à l'Occident de prospérer, face à l'émergence de nouvelles puissances ( les BRICS ), qui menace de ternir sa superbe.

« Dans cette constellation imaginaire, l'espoir d'une vie meilleure, voire d'une découverte radicale de soi – tout voyage étant une forme de conversion personnelle – sont associés à l'existence, quelques part, d'un endroit, spécial et rare, où il s'agit de parvenir. L'idée est aussi vieille qu'une des dates de la naissance des temps modernes : la découverte de l'Amérique. La richesse, l'espoir, la liberté et le Paradis – l'Eldorado – sont quelque part. Il existe des terres « vierges » - en fait peuplées par des habitants bannis de l'histoire – qui permettent une autre vie , et sont indissociablement un refuge et une promesse, mais aussi une contrainte et un déracinement. Voulu ou forgé, le voyage a un but, parce qu'il est indissociable d'un imaginaire de l'ailleurs. La modernité fut ce qu'elle fut pendant des siècles en Occident parce qu'il y avait un dehors réel, parce que l' « Amérique » était immense et inépuisable, (Arendt (1958), 1994). » cité par Anne Barrère , Danilo Martucelli, La modernité et l'imaginaire de la mobilité : 'inflexion contemporaine.

1 Altman Georges, Indigènes, parias de la France « civilisatrice », 27 aout 1926, La question coloniale dans « L'Humanité ». 1904-2004, Ed La Dispute, 2005, p.425-426

2 Figure d’un individu qui cherche à maximiser la satisfaction de ses besoins, à travers le rapport couts/bénéfice.

3 Latouche Serge, L'occidentalisation du monde, Ed La Découverte, Paris, 2005, p.44-45.

4 Politique relative à l’Etat Providence, Enclin à institutionnaliser un bien être social, grâce à une société assurantielle selon Pierre Ronsavallon, c’est-à-dire une société redistributive..

5 Cesari cité par Lacroix Thomas, Les réseaux marocains du développement, Les presses Science Po, 2005, p230.

6 Economiste indien qui conceptualisa la notion de capabilité.

7 Relatif à un concept central, modèle courant de pensé, exemple ; le paradigme économique.

8 Perceptible à travers une forte mécanisation des outils productifs, une dépendance accrue à la technologie, ainsi qu'une spécialisation des tâches.

9 Qui est un discours impérialiste sous couvert de compassion...

10 Pour ce faire l'occident va exporter son modèle de développement, telle une mission messianique ( éradication par ce processus de la faim, de la pauvreté de la maladie), en incitant les pays du Tiers Monde, à augmenter leurs capacités productives, notamment via des politiques d'industrialisation pour ainsi améliorer la productivité, et principalement axé leurs économies sur l'exportation destiné aux industries occidentales qui transforment la matière première en produit finis et produisent ainsi de la plus value. L'occident va alors vendre des produits transformés aux pays du sud a des taux variables tandis que les matières premières elles se vendent à un prix stable, d'ou une certaine inégalité dans l'échange commercial en particulier qui est assez symptomatique du rapport Nord/Sud en général. Perceptible à travers la dette des pays du Tiers Monde, que certains qualifierait de néo-colonialisme, d'après certains discours de Sekou Touré ( ancien président de la Guinée), de Thomas Sankara ( ancien président de l'ancienne Haute Volta), pour ne citer qu'eux...

11 Ballandier Georges, Cit Civilisés dit-on p116, édition Presse Universitaire de France, 2003.

12Si on appréhende celle-ci en tant qu'idéal de société, dans le sens d'une société égalitaire garante de justice sociale..

13 Il apparaît alors qu'il faut émanciper les peuples pas seulement du colonialisme mais plus d'un modèle de domination.

14 Cit Serge Latouche, Survivre au développement, éd Mille et nuits, 2004 .

15 Cit Martucelli Danilo, Grammaires de l'individu, Gallimard, 2002, p.120, p121.

16 Les propos de plusieurs personnalités politiques italiennes destinés au président Macron en particulier et à l'histoire coloniale française en générale.

17 Posture ironique dans la mesure où les migrants occupent des postes peu gratifiant que les français ne paraissent pas vouloir occupés. De plus le « travail au noir » où les clandestins sont majoritairement représentés participent à un dynamisme national. Sans oublier que depuis une bonne dizaine d'années déjà le titre de meilleur ouvrier de France est continuellement attribué à un individu d'origine étrangère.

18Said Edward W, Culture et impérialisme, Fayard Le Monde Diplomatique, 2000, p.79.

19 Le rêve d'un ailleurs idéalisé n'est pas le monopole des habitants du Tiers-Monde, qui n'a jamais songer à migrer vers un idéal de vie incarné par des politiques appliqués dans un pays étranger ?

20Cit Fanon Frantz, Les damnés de la terre, François Maspero, p62, Paris, 1982.

21 Pour ainsi ériger l'humain en un être universel, par le biais de la rationalisation du monde comme processus modernisateur, libérateur d'une certaine forme d'obscurantisme incarné par les sociétés collectivistes.

22Balibar Etienne, Wallerstein Immanuel, Race, nation classe : les identités ambiguës La Découverte, Paris, 2018, p.65, p.66.,

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