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Billet de blog 23 août 2019

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L'avidité a eu raison de ce monde

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« Le témoignage très ancien de l'impérialisme est réuni dans les mémoires du capitaine Cook. Cet officier qui parcourt le monde n'est absolument pas surpris par ce qu'il découvre. Pourquoi ? Parce que ces îles et ces nouveaux peuples viennent s'installer dans la cartographie de ce monde unifié qu'il est en train de constituer. Et quand il bombarde quelques îlots sauvages, ce n'est pas du tout par méchanceté, mais par pédagogie. Les modernes n'ont jamais été vraiment méchants, ils ont fait des guerres, certes, mais toujours pédagogiques, puisqu'ils ne faisaient qu'enseigner l'évidence du monde commun qui était celui de la nature, de la technique. Or, cette position est bien évidemment devenue insensée. »1

Pour que le monde, redevienne monde, c'est à dire pluriel. Il doit se défaire de cette uniformisation, appauvrissante, qui travestit le lien social, en un calcul coûts/bénéfices. La mondialisation a libéré les primitifs et ruraux, de la misère 2, afin de les introduirent dans la pauvreté. D'une pauvreté asservissante pour le compte de notre nouveau dieu à tous, le « marché unique ». L'humanité est incité à prendre le train du rationalisme en marche vers la route du progrès incarné par la science. Il suffirait alors « simplement » d'abandonné tout particularisme ( croyances, pratiques culturelles). Pour le compte d'une technocratie qui nous érigerait tous en tant que technicien, afin que nous oeuvrions ensemble à ce projet « moderne », qui est celui de la totémisation de la science 3. Paradoxalement depuis la philosophie des Lumières4, c'est la raison qui a conduit le monde. Or dorénavant, la technique est synonyme de brevets, et/ou de monopoles. C'est dire si la raison a été pervertit par le schème de pensée du capitalisme 5. La raison et la liberté sont le monopole de l'Occident, bien que ce dernier ayant déjà vécu sa révolution industrielle, n'incarne plus le progrès, ni l'espoir. Désormais il s'enlise dans des questions identitaires atavique, en instituant de « faux problèmes » ; par le biais d'un opportunisme politique, que constitue l'ethnonationalisme, du fait de son essence démagogique.

«  Le soleil s'est couché depuis longtemps sur la veille Europe. Les croisades sont oubliées, et l'épopée coloniale a vieilli d'un seul coup de plusieurs années-lumière. La chrétienté marchande et industrielle n'a plus aucun secret pour dominer le monde, et la gloire des Blancs n'est plus qu'une survivance provisoire. Pourtant, la machine à déraciner pour s'être déracinée elle-même hors de son site natal reste plus jeune que jamais. Elle informe le monde en une vaste technopole, broyant les nations dans ses rouages implacables, écrémant les élites et abandonnant au rebut des corps exsangues et désarticulés. L'économie et la technique sont le cœur du système mais ce ne sont ni son commencement ni sa fin. »6

La société de consommation de masse aliène les individus. Les comportements grégaires, y sont tels, qu'Alain Deneault évoque des « êtres interchangeables », évoluant au sein de ce qu'il nomme la médiocratie. Dans le but de se défaire de l'emprise du consumérisme, et pour se réapproprier cette promesse démocratique " je veux être maître de mon destin" qui semble en échec aujourd'hui selon Pierre Henri Tavaillot. L'humanité doit renouer avec ses fondements, s'organiser et s'assoir au « coin du feu des paroles partagées », reconstituer un tout « pluriel », une démocratie au sens propre du terme, « pouvoir aux peuples ». En s'imprégnant, des valeurs collectivistes, et (re)découvrir ce monde pluriel, en appréhendant les différences comme autant d'étoiles, et les cultures comme autant de galaxies. À la fois si proche et si lointaine, qui s’observent, se croisent, mais avant tout s'illuminent ensemble, via la lumière de l'altruisme qui malgré les années, traverse les époques, et les générations.  

1 Latour Bruno, Un monde pluriel mais commun, Ed de l'Aube, 2005, p.13.

2 D'un point de vue matérialiste.

3 La révolution industrielle occidentale a induit un déterminisme technologique, qui semble se développer telle une sphère autonome, avec pour garant la techno-structure qu'est le « marché libre ».

4 Relative à la matrise de la passion par, la raison, de la nature par la technique.

5 A savoir que tout biens matérielles, immatérielles est considéré comme une marchandise.

6Latouche Serge, L'occidentalisation du monde, Ed La Découverte, Paris, 2005, p. 81.

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