Marine Le Pen arpente les rues de Nouméa telle une apparition spectrale. Il faut dire que ses cinq ans d'inéligibilité, lui donnent des allures de "dame blanche" ( le nom d'un esprit contés dans les légendes locales), qui cherche à occuper un terrain politique abandonné par une métropole qui tente de redéfinir sa relation avec ses territoires ultramarins. Cette visite intervient à un moment où Sonia Backes (LR), présidente de la Province Sud, voit son influence s'effriter jour après jour. Quant à Nicolas Metzdorf, le député de la première circonscription, est devenu persona non grata, et incarne désormais un loyalisme devenu encombrant. Notamment aux yeux du MEDEF local qui commence à prendre ses distances avec ces figures trop clivantes. Le Rassemblement National profite de ce vide politique, pour se positionner mais son timing suscite des interrogations. Les néo-calédoniens, marqués par trois référendums et des inégalités structurelles persistantes, se laisseront-ils séduire par ce "volontarisme" tardif ?
Il faut dire aussi que le piège néocolonial français se referme sur lui-même, quand Paris doit non seulement apaiser un territoire où le sentiment anti-français comme ailleurs, gagne du terrain, mais aussi éviter toute apparence de capitulation face aux indépendantistes, le tout en maintenant coûte que coûte des relais politiques crédibles. Or, ses anciens atouts (Backes, Metzdorf) sont devenus des boulets électoraux. Marine Le Pen tente alors de se positionner dans un trou de souris en tant qu'alternative citoyenne pour ne pas dire une troisième voie, mais son historique politique récent la dessert lourdement.
À croire que la Kanaky-Nouvelle-Calédonie est l'ultime tremplin des réprouvés ? Comme à l'accoutumée, ce territoire d'outre-mers sert de terre d'asile pour des fonctionnaires et politiques métropolitains discrédités. Notamment, avec un Manuel Valls qui tente en chapeaux de roue, une reconversion avortée. De quoi donner des idées, à une Marine Le Pen qui cherche désespérément une légitimité perdue dans l'hexagone. Cette stratégie pourrait s'avérer contre-productive, aux yeux de néo-calédoniens qui ne sont pas non plus dupes, quant au fait de servir de marchepied à ceux que la métropole rejète. À croire qu'entre fantômes politiques et espoirs trahis, la Kanaky-Nouvelle-Calédonie reste plus qu'une chasse gardée, le miroir brutal des contradictions néo coloniales françaises.