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Billet de blog 21 avril 2008

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Service minimum pour des «obsèques nationales»

Germaine Tillion, décédée samedi, et Pierre Aliker, seul dimanche à prononcer un hommage aux «obsèques nationales» d'Aimé Césaire, sont nés à trois mois d'intervalle en 1907. Des «centenaires», comme on dit. Mais ce qui a rapproché, ce week-end écoulé, l'ancienne résistante et militante contre la torture en Algérie, et le compagnon de route de toujours du poète et militant de la "négritude", ce n'est pas l'âge mais la désinvolture dont les chaînes d'information télévisée ont fait preuve à leur égard.

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Germaine Tillion, décédée samedi, et Pierre Aliker, seul dimanche à prononcer un hommage aux «obsèques nationales» d'Aimé Césaire, sont nés à trois mois d'intervalle en 1907. Des «centenaires», comme on dit. Mais ce qui a rapproché, ce week-end écoulé, l'ancienne résistante et militante contre la torture en Algérie, et le compagnon de route de toujours du poète et militant de la "négritude", ce n'est pas l'âge mais la désinvolture dont les chaînes d'information télévisée ont fait preuve à leur égard. De la première il ne fut que sporadiqueemnt question, comme si on se trouvait surpris qu'elle ne soit pas morte déjà. Du second, nous avons été privés de l'allocution qu'il prononçait, une fois déroulées les images de l'arrivée de Nicolas Sarkozy dans l'enceinte du stade qui, précisément, porte le nom de celui qui fut le premier martiniquais, interne des hôpitaux de Paris et co-fondateur du Parti progressiste martiniquais.

On nous avait annoncé la retransmission "en direct" des obsèques nationales d'Aimé Césaire, elle a été amputée de ce moment exceptionnel d'un homme portant la mémoire de plus d'un siècle, impeccable de dignité et de maintien dans son costume clair, qui lisait un discours écrit de sa main, célébrant ( du moins on l'imaginait) la vie et le combat de son "cadet" défunt. C'est un grand et rare privilège qui nous est offert de pouvoir recueillir de tels témoignages. Ils sont l'écho vivant et sensible de tant d'évênements révolus que l'on classe d'ordinaire dans les pages glacées des livres d'Histoire. Ils sont aussi une clairvoyance des temps présents, aiguisée par la mémoire longue du temps passé.

Dans cet esprit, Pierre Puchot et Thomas Cantaloube, de Mediapart, ont eu l'excellente idée d'aller interroger l'ancien diplomate Stéphane Hessel, sur les rapports israélo-palestiniens, lui qui revenait juste d'un séjour sur place, dans le cadre d'une de ces multiples actions au service de la défense des droits de l'Homme qu'il mène encore, à 90 ans passés. Je l'ai écouté avec d'autant plus d'intérêt que je viens de réaliser, avec lui, un livre d'entretiens paru chez Fayard ( "Citoyen sans frontière") et terminé avant qu'il ne se rende dans cette Palestine au partage de laquelle il assista de près, en 1948, alors qu'il était en poste à l'ONU. Le "zapping" dont a fait l'objet Pierre Aliker m'a d'autant plus choqué, que j'avais pu mesurer pour moi-même, durant les quelques mois de "conversations" avec Stéphane Hessel, tout ce que de tels témoignages peuvent nous apporter d'intelligence nouvelle, sur une Histoire que l'on croit pourtant connaître.

En ce dimanche soir, jour d'"obsèques nationales" d'Aimé Césaire, on en avait bien besoin. Le président de la République, venu sur place mais privé de discours officiel par la famille du défunt , a livré aux journalistes quelques propos de bon aloi sur l'humanisme et l'oeuvre d'Aimé Césaire, en évitant néanmoins toute référence explicite à son combat anticolonial. Un engagement ramené à la "manière un peu rebelle" dont l'ancien député et maire de Fort-de-France s'exprimait dans le débat public. Nicolas Sarkozy s'y connaît en service minimum.