Avant de déplorer le « dysfonctionnement » qui a permis à l’homme mis en examen pour le meurtre d’une jeune suédoise, d’échapper au fichier national des empreintes génétiques (FNEG), il faut se féliciter que, par les moyens « classiques » de la police, cette affaire ait quand même été résolue – du moins tout porte à y croire - dans des délais records.
Ce n’est bien sûr pas pour opposer une méthode à une autre, les deux sont complémentaires, mais l’on a parfois tendance à surévaluer l’efficacité de la première, en raison du caractère incontestable de la preuve par l’ADN. Or il faut bien établir, à partir de toutes les données recueillies par le FNEG, un « rapprochement » avec tel ou tel suspect dans une enquête judiciaire en cours. Et, pour ce faire, il faut que la police et la justice usent de tout l’arsenal des enquêtes traditionnelles, dont on sait que les moyens matériels et humains qui y sont alloués, sont déjà notoirement insuffisants.
Une carence aggravé par une autre, à l’origine du ratage concernant Bruno Cholet, l’auteur présumé du crime de Chantilly. Son empreinte génétique avait été prélevée en juin 2005, lors d’une interpellation pour attaque à main armée, mais elle n’est jamais parvenue au service qui gère le FNEG, du fait de sa surcharge et sa désorganisation, imputables au manque de crédits dont il est victime. Entre temps, plusieurs affaires de meurtres et de viols sont survenues, dont les similitudes avec l’affaire de Chantilly peuvent donner à penser qu’une interpellation du même Bruno Cholet, aux fins de vérifications, aurait été utile et peut-être évité le crime suivant, commis en avril 2008.
Michèle Alliot-Marie, la ministre de l’Intérieur,s’est empressée d’intervenir, hier, pour assurer que sa prochaine loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure attribuerait « plus de moyens humains et financiers » à la FNEG. Excellente nouvelle. Mais pourquoi la précédente loi de ce type, en date du 29 août 2002, n’avait pas été, sur le plan des crédits, à la hauteur des missions dévolues au FNEG ? Une question à poser au ministre de l’Intérieur de l’époque, entre temps devenu président de la République.
Cet article est paru dans le Républicain Lorrain le 29 avril 2008.