Il y aurait beaucoup à dire sur les commentaires qui fusent de derrière la main courante pendant les match de rugby, ils pourraient à eux seuls faire l'objet d'un billet, pour le moment il ne sera question que d'un seul entendu dimanche dernier - sans grand rapport avec la partie comptant pour le championnat du « Périgord-agenais » - en prise avec l'actualité et une question que posent les évènements de Bretagne : y a-t-il risque de contagion ?
« Si ça continue on va sortir les bérets noirs » proclamait un spectateur.
Si l'on se reporte à l'histoire au travers du dossier consacré par wiképidia à la révolte des bonnets rouges de 1675 – il ne manque pas de clins d’œils à la situation actuelle. Au plan des interprétations par les historiens par exemple trois sont proposées qui peuvent rappeler nos controverses actuelles. L'un peut en dire :
« Tant il est vrai que rien n'est nouveau sous le soleil et que les passions populaires, une fois affranchies du frein social, se précipitent d'un seul bond au gouffre de la barbarie »
pour un autre :
« Le rattachement définitif de la Bretagne à la France, confirmé par les États de Bretagne, avait eu lieu en 1532. Peut-on parler d'asservissement national et de lutte de libération nationale des Bretons, étant donné que la noblesse bretonne s'était déjà entièrement francisée et que, au fond, seuls demeuraient bretons les paysans ? La réponse est contenue dans l'état actuel du problème breton en France. En dépit d'une dénationalisation continue d'une partie des Bretons, ce problème demeure typique des « minorités nationales » et ne saurait être résolu dans les conditions d'un régime bourgeois »« Nous trouvons justement dans le XVIIe siècle les racines historiques lointaines de cette lutte». Enfin, pour lui, la révolte de 1675 annonce 1789.
un troisième fait lui aussi ce lien en y voyant :
« un affrontement entre la bourgeoisie et ses alliés d'une part, l'ancien régime d'autre part, comme lors de « la révolution française »
Celui conclut par « il n'y a d'ailleurs pas ailleurs l'équivalent des révoltes de 1675 » formule qui exclut la révolte des camisards en 1702 qui fait suite à la révocation de l'édit de Nantes et n'est effectivement pas du même ordre, mais qui en omettant la révolte des « invisibles » menée contre la gabelle en 1664 par Audigeos en Chalosse (sud-est de l'actuel département des Landes) est très discutable
Sous ce titre « Les invisibles » le dessinateur de bande dessinée Jean Harambat a publié un très bel album en 2008.
Voici quelques répliques qui en sont tirées. Celles avec lesquelles la mère de Bertrand 'Audigeos chevalier de petite noblesse « soldat sans emploi » de retour chez lui après plusieurs années de guerre, lui présente la situation :
« Ne vous réjouissez pas trop vite mon fils...ce n'est pas la paix que vous trouverez ici...mais la violence, la misère, les exactions. La gabelle a été mise en place* par le nouvel intendant, un nomme Pellot...un de ces bourgeois arrogants qui veulent au nom du roi mettre à pied la noblesse... »
Alors que les premières émeutes éclatent à Hagetmau, à la demande de sa mère Audigeos est reçu par le Duc de Gramont qui (dans la BD) lui tient les propos suivants :
« ...J'en viens au fait : installer les gardes de la gabelle à Hagetmau, chez moi, duc de Gramont, maréchal et pair de France est un défi à toute la noblesse. Cet intendant Pellot bafoue mes droits seigneuriaux ! J'ai toujours pris la défense de mes gens contre l'impôt de la gabelle ! Je suis intervenu à la cour après le massacre d'Hagetmau mais Pellot a ontenu l'appui de colbert...on vous prête du talent pour l'escarmouche Audigeos...Si jamais vous deviez mener les actions désordonnées des émeutiers...Vous auriez mon soutien...Notez que je ne vous y encourage pas officiellement... »
Pendant plusieurs mois de 1664 à 1665 la révolte fait rage, les troupes d'Audigeos insaisissables sont appelées « les invisibles ».
De tout cela il ressort que les révoltes contre la gabelle, encadrée par un noble sans le sous, menée par des paysans, encouragée en sous main par la haute noblesse qui visait le maintien de ses privilèges contre la bourgeoisie (c'est Colbert qui avait décidé d'appliquer la gabelle qui jusque là ne s'appliquait pas en Chalosse) ne sont pas épargnées par « la confusion » mais trouveront un sens tranché en 1789...
Mais l'histoire ne dit pas si les réminiscences ethno-historiques de notre spectateur vont se réaliser et si à la suite des bretons, les « sud-ouestien » vont, après les avoir précédé sous Louis XIV, recoiffer en signe de révolte leurs bérets d'autrefois.