Pour Juillard, Cambadélis, de nombreux commentateurs et sans doute de nombreux citoyens lecteurs ou non de Médiapart l'affaire est entendue, l'éditorialiste du Monde la résume clairement en parlant des instituteurs parisiens en grève hier: « Disons-le tout net : ce corporatisme étriqué est lamentable. »
Cette aversion qui semble dominer à l'égard de ce mouvement ne se retrouve pas dans les mêmes termes quand des ouvriers défendent (à juste titre) leur emploi dans des secteurs économiques objectivement en déclin, et les critiques qui ne manquent pas de leur être adressées, ne me semblent pas s'ordonner autant sous les accusations d'égoïsme, ou de passéisme que contiennent celles de corporatisme, à mon avis injustement, adressées aux instituteurs dans leur globalité.
Ce fait mérite-t-il au moins réflexion? Je le crois
Voici un extrait de la lettre adressée par B. Delanoé à l'intersyndicale parisienne:
« la ville prendra ses responsabilités pour élaborer un projet éducatif parisien et offrir aux enfants un temps périscolaire, utile te de qualité, plus conforme à leur chronobiologie... » quant au contenu concret du dossier, il consisterait en deux options:
« Option 1 : la classe se terminerait à 15 h 45, et des activités péri-éducatives seraient organisées de 15 h 45 à 16 h 30. Option 2 : ces activités prendraient place durant la pause de midi allongée de trois quarts d'heure – la cloche de l'école sonnant, comme aujourd'hui, à 16 h 30. » La deuxième option ayant la préférence de l'adjointe au maire chargée de l'enseignement.
Nous sommes face à deux évidences:
-le retour à 9 ½ journées de classe, contenu dans la réforme Peillon est nécessaire;
-Les communes, sollicitées non plus sous les formes contractuelles comme précédemment pour les «Contrats d'Aménagements des Rythmes de Vie des enfants et des Jeunes » mais dans le cadre cette fois ci de l'application d'un décret, ont toutes la main sur le cœur un grand souci des rythmes « chrono biologiques »...et elles n'en font pas mystère, des frais supplémentaires que l'augmentation du temps périscolaire va occasionner...
Quelle est la part de l'un et de l'autre dans l'option 2 de la Ville de Paris où le temps de pause méridienne passe de 2 heures à 2 h 45? Espérons que les concertations qui doivent suivre permettront de l'établir clairement car la question se pose légitimement.
L'intervention des Professeurs de la Ville de Paris dont Bertrand Delanoé rappelle dans sa lettre à l'intersyndicale qu'il acte un attachement fort de la Ville à la qualité de l'enseignement est aussi sujet à éclaircissement, eux mêmes se demandant s'ils continueront sur le temps scolaire.
Bref dans les propositions des uns comme dans les réactions des autres on peut chercher derrière les principes des interférences avec des préoccupations plus prosaïques ou même éloignées de ces principes... et on ne voit d'ailleurs pas comment il pourrait en être autrement.
D'où vient donc ce sentiment de malaise ou d'hostilité suscité par cette grève?
Plus que de corporatisme, les revendication corporatives, propres à ceux qui exercent une profession du fait même de l'exercer, n'ont rien de honteux, certes elles ne s'ajustent pas forcément exactement avec « l'intérêt général » mais le corporatisme consisterait à ce qu'elles s'opposent à une avancée nécessaire.
Le mouvement des instituteurs semble plus marqué par la confusion que par le « corporatisme ».
Les mots d'ordre de l'intersyndicale SNUipp-FSU, SNUDI-FO, SUD Education, CNT en témoignent :
« - Une amélioration des conditions d’apprentissage des élèves et d’exercice des enseignants ;
- des moyens qui répondent réellement aux besoins (baisse des effectifs, RASED, éducation prioritaire, remplacement…) ;
- Le ministre ne doit pas publier son projet de décret sur les rythmes scolaires ; » ces formulations faisant volontairement l'impasse sur le retour ou non à la semaine de 9 ½ ….portent leur part de responsabilité. je pense, et j'ai essayé de m'en expliquer sur ce blog, qu'elles sont loin d'être les seules.
Dans mon école et ma commune aux dimensions et aux moyens sans rapport avec Paris, on retrouve sous des formes différentes les mêmes interrogations et les mêmes risques de confusions, face auxquels pour ma (modeste) part j'incite, sans pour autant prêcher la moindre résignation, mes collègues à l'échange et à l'information afin d'en éviter les ornières.