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Billet de blog 19 décembre 2012

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Poésie & politique

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    Travailleurs, employés des ténèbres, extracteurs de pétrole, vendeurs de journaux, conducteurs, desservants de machines, peuple obscur des usines ! L’esclave avait peu d'espoir de racheter sa liberté à son maître, vous, vous n'achetez que votre vieillesse, à moins que vos modestes gains n'aillent au loin soutenir vos familles, car vous venez d'ailleurs, comme le café, et sans votre labeur que deviendrait notre aisance? Salut à vous dans l'esprit d'une paix future, noirs descendants des réquisitions coloniales, lorsque, devenus maîtres de vos conditions d'existence, il vous incombera, de concert avec ceux chez qui elle aura veillé, d'en manifester la conscience en fondant des lois nouvelles, où la terre n'étant pas aux hommes, ils en ont la garde — et peut-être qu'elle se remettra alors à leur parler !   

     Il te faudra traverser plusieurs mondes clignotants avant d'entrevoir la muraille au cœur de laquelle, très loin encore et dissimulé par les espaces où le néant régurgite la lumière, se tient le Prince des Ténèbres, maître des puissances sans morale d'où le manifesté ayant jailli, tout ce qui est en puissance devra surgir, et c'est un prodigieux théâtre pour lequel le Prince recrute, création et destruction œuvrent de concert, et nous n'avons rien vu si nous croyons avoir compris le sens du drame: car tout à son tour devra surgir, tout, et nous devons nous tenir prêts à chanter dans les flammes, pour la beauté de l'acte seule capable d'infléchir les puissances obscures !

     Danseuse, aux bras d'ailes, fine, fondue au mouvement qu'elle mène, au port noble, inventive, très haute, fille du Greco, blanche, affrontée à ce qui s'ouvre et l'offrant aux yeux épris de vide, intense, légère, rapide, entourée, multiple, déjà venue, en suspens, prête à rire, intriguée, fertile, maîtresse d'un souffle libre, dont le geste a pour écho le froissement de l'enfui, proche des traces, divine, toi dont l'art est l'air, puissent tes pas m'ouvrir le chemin où les visions s'éteignent !     

    Torride, en flux perpétuel, rouge, s'illuminant au soleil, et de noir devenant jaune avant de disparaître, fluide, comme une eau où des paysages se révèlent, né sur les hauts plateaux, dans les savanes, gorgé de lumière, dur, lisse, craquant, amer, pinceur de nerfs, lesquels à ton contact s'essorent tandis que dans l'âme aiguillonnée une sorte d'ouïe développe ses spirales en archipels, pointillé de fougère où l'instant brise et une idée germe, ayant corps, esprit, saveur, surtout saveur, ô café, crottin du soleil, nuit dans un bol à l'aube avant le travail !

    & Karl Marx assis à la terrasse du Némésis à Nîmes mangeait tout en observant les passants sa pizza, songeant : tout va de mal en pis (car assis il assimilait le prolétariat à ses furoncles) mais un livre peut changer la face du monde, pourvu que ce soit une fiction, et même quand tout sera détruit en fin de comptes un poète se souviendra de moi dans un autre monde où il n'y aura plus ni prolétariat ni bourgeoisie, seulement une immense masse laborieuse et le quotidien dans son insignifiance heureuse, tourné en spectacle (comme si je n'avais rien écrit!) sous la menace — qui fera son prix — des bombes...

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