… à qui ?
Revenant de Genève vers Lyon, mercredi soir, j’écoutais « Le téléphone sonne » à France-inter, où quelques spécialistes parlaient des conséquences de la démission de Benoît XVI et des différentes hypothèses en matière d’évolution possible de l’Eglise catholique après le prochain conclave.
La route était paisible, le sol était sec, la circulation était peu dense … heureusement … car je crois bien que j’ai dû faire une belle embardée en entendant l’un des participants dire très tranquillement que, quel que soit le futur Pape, celui-ci aurait droit de sa part à une « obéissance inconditionnelle ».
Quelle horreur !, quel conditionnement ! Et quelle différence avec ceux qui prétendent contraindre leurs concitoyens à se plier à une « charia » qu’ils affirment venir de Dieu lui-même ?
Il y a plus de quarante ans, l’un de mes collègues et instructeur en programmation informatique, me disait souvent : « Le fanatisme c’est de redoubler ses efforts alors qu’on a oublié ses objectifs ».
En écoutant cet homme, j’y ai repensé, mais en me disant que le marqueur du fanatisme, c’est aussi d’utiliser le terme d’inconditionnel pour définir son obéissance à un autre homme.
Totalement incroyant, je peux, cependant, comprendre que des croyants aient la volonté « d’obéir au Dieu » auquel ils croient. Mais le problème majeur du croyant c’est que son Dieu ne lui dit pas directement ce qu’il veut. Il fait donc confiance à un prêtre pour savoir ce que Dieu attend de lui … et alors là, bonjour les dégâts !
Que de malheurs sont arrivés du fait de ces intermédiaires entre les Dieux et les hommes ! Nous le savons tous et je ne fais qu’enfoncer des portes ouvertes. En 2013, conduisant ma voiture, je ne m’attendais pas à entendre un homme qui ne m’avait pas jusqu’à ce moment semblé plus bête qu’un autre, proférer ce que je ressens comme le comble de l’absurdité : « abdiquer de façon volontaire, toute contestation de ce que le futur Pape lui dira … car c’est à Dieu qu’il obéira en le faisant ».
Qu’y a-t-il de plus fanatique que de renoncer ainsi à tout esprit critique ?
A Genève, cet après-midi là, j’avais participé à une réunion organisée par le Conseil National de la Résistance Iranienne (CNRI). Le CNRI est totalement laïc, il respecte l’égalité homme-femme (Il est, d’ailleurs, présidé par une femme, Maryam RADJAVI), il refuse l’autorité sans partage d’une caste de mollahs prétendant détenir la vérité au travers du Coran. Le combat que mènent ces Iraniens contre un régime horrible aux mains dégoulinantes de sang, ne diffère pas dans ses fondements de celui que nous devons mener contre ceux qui nous parlent « d’obéissance inconditionnelle à un Pape ». Bien sûr, les Papes, depuis maintenant longtemps, n’ont plus de sang sur les mains, mais cela ne rend pas inoffensives les positions qu’ils prennent et qui peuvent entraîner des malheurs. En disant cela je pense, par exemple, à l’interdiction du préservatif comme moyen d’empêcher la propagation du SIDA.
Tout ordre, d’où et de qui qu’il vienne, n’est que de source humaine. Y « obéir de façon inconditionnelle » est inacceptable et n’exonère personne de sa responsabilité dans ce qui en découlera.
Les Iraniens risquent leur vie en s’opposant à la théocratie. Nous, nous ne risquons que le ridicule en ne nous dressant pas contre l’absurde … est-ce déjà trop espérer ?
Jean-Paul Bourgès 2 mars 2013