L’espace diplomatique et médiatique est obscurci par la situation du Proche-Orient et ses conséquences sur notre mental collectif, dans lequel monte l’idée d’un antagonisme fondamental entre un occident qui n’est plus très chrétien et un orient que l’on redécouvre très musulman.
Pourtant, il y a quatre-cent-quatre-vingt ans, le Roi François 1er et le Sultan Soliman-le-Magnifique, avaient signé ce que l’on dénomma « les capitulations » (Ce qui signifiait juste que c’était signé par les deux chefs … ou capituls), qui faisaient d’eux des alliés contre l’Empereur Charles Quint.
Cet accord, qui permettait, entre autre, aux navires français la possibilité de commercer et donc d’entrer dans tous les ports sous la domination ottomane, fut d’un effet exceptionnellement long puisqu’il ne fut rompu que par le déclenchement de la première guerre mondiale … qui vit d’ailleurs s’effondrer tous ces empires anciens du centre de l’Europe et du Proche-Orient.
Cet anniversaire me fait réfléchir à la tromperie qui est en train de s’installer dans nos esprits quant à l’importance des convictions religieuses en tant que facteur structurant de la géopolitique.
A l’époque de François 1er et Soliman, peu de temps avant le fameux « cujus regio ejus religio », il apparaissait difficilement concevable que la religion ne soit pas mise en avant en toute chose. Et, cependant c’est un Roi catholique qui conclut un accord aussi important avec un Sultan musulman, pour affaiblir l’héritier du Saint Empire Romain Germanique.
Menée de façon catastrophique, comme tout ce qu’il toucha, le vaste partenariat méditerranéen lancée en fanfare par Nicolas SARKOZY, « l’Union Pour la Méditerranée », s’est enlisée et plus personne n’y pense … sauf les cohortes de fonctionnaires pour lesquels cela représente un job bien sympathique.
Aujourd’hui nos Etats officiellement laïcs, comme la France, ou laïcs de fait comme l’Espagne, ne devraient-ils pas trouver plus facile de conclure des accords de collaboration avec les Etats du Sud et l’Est de la Méditerranée … qui sont les vraies cibles de l’intégrisme wahhabite attaché à l’application rétrograde de la charia dont Soliman-le Magnifique n’avait cure ?
L’effet le plus perversement négatif de l’intégrisme, aussi bien wahhabite que chiite, c’est que nous n’avons plus une approche laïque des relations internationales et que, dans nos esprits et dans notre vocabulaire, le mot « musulman » est redevenu une façon de définir des pays en créant ainsi une forme de barrage à l’idée d’accords possibles … sauf s’il s’agit de leur vendre des armes !
Jean-Paul BOURGЀS 4 février 2016