La noblesse de l’Europe est dans la particule
J’ai souvent eu l’occasion d’exprimer mes convictions européennes en espérant que toutes les raisons que nous avons d’aller toujours plus loin dans l’union l’emporteront sur les réactions du repli sur soi. Durant la campagne électorale, l’un des light motifs de l’UMP a consisté à expliquer qu’il serait vain et attentatoire à l’honneur de la France d’envisager une quelconque évolution à l’accord européen de décembre 2011. Ce qui s’est passé le week-end dernier à Bruxelles a montré que l’Union Européenne était un lieu où l’on parlait, où l’on négociait et où seuls ceux qui ne demandaient rien obtenaient totalement satisfaction. On y a vu, aussi, et c’est fondamental que la direction de l’Europe ne pouvait pas être assurée seulement par deux des pays … surtout si l’un des deux n’est qu’à la remorque du premier.
Mais pourquoi, une semaine après le sommet de Bruxelles, reviens-je sur ce sujet ?
Il se trouve que, cette semaine, vient d’être administrée une éclatante démonstration de la puissance de l’Europe concrète, celle qui travaille dans l’ombre et même en sous-sol, celle qui ne cède jamais au découragement et qui poursuit ses buts durant des années et même des décennies, celle qui est composée d’équipes venues de tous les pays européens.
Cette démonstration c’est celle de l’existence d’une particule, le boson de HIGGS, que des équipes du CERN cherchaient à vérifier depuis plus d’un quart de siècle. Jusqu’ici on pouvait tomber dans les pommes ou regarder tomber les pommes, comme NEWTON, sans comprendre les mécanismes fondamentaux de ce phénomène physique si courant. Désormais nous comprendrons enfin la gravitation que nous nous contentions de constater et d'utiliser.
L’exploit scientifique a une portée exceptionnelle, mais il serait tout aussi important que l’on tire toutes les leçons politiques de cette aventure.
Le CERN réunit les meilleurs scientifiques européens dans un but unique : faire progresser la connaissance humaine. Il a pu bénéficier d’investissements énormes qu’aucun pays n’aurait pu consentir, seul. Il a disposé du temps nécessaire sans être soumis à l’exigence du résultat immédiat. L’équipement qui a permis cette découverte, le LHC (Large Hadron Collider), immense anneau de vingt sept kilomètres de long, est situé à cheval sur la frontière franco-suisse … belle et symbolique démonstration que les idées, pas plus que les particules, ne s’arrêtent aux limites de « L’Espace Schengen » dont la Suisse ne fait, d'ailleurs, pas partie.
Il n’y a pas que les physiciens qui peuvent démontrer que l’union fait la force, surtout si l’on se rappelle la devise qui avait été prévue pour l’Europe : « Unie dans la diversité ».
Jean-Paul Bourgès 4 juillet 2012