Le 5 février est une date qui a une importance particulière pour moi. C’était, pour commencer, l’anniversaire de maman et je ne pense pas avoir jamais oublié de le lui souhaiter et plus de vingt-trois ans après sa mort, j’ai continué … dans ma tête … de lui souhaiter son anniversaire.
Aujourd’hui, Meilik, mon deuxième petit-fils, a dix ans et je suis content de le voir grandir et que nos liens, forts depuis sa petite-enfance, soient de plus en plus solides avec de nombreux moments passés ensemble à répondre à son inépuisable curiosité.
Et il y a quatre-vingt-quinze ans, Charlie CHAPLIN sortait son premier long métrage, « The kid ».
Ce film ne fut pas un coup d’essai, mais un coup de maître, où l’art de Charlie CHAPLIN éclata dès sa première œuvre et où naquit son personnage d’individu à la fois si fragile et pourtant d’une grande force morale.
On ne peut pas revoir ce chef d’œuvre sans éprouver de regrets devant l’irruption des dispositifs incroyablement sophistiqués et coûteux du cinéma moderne qui n’expriment qu’une faible partie de ce que CHAPLIN savait faire passer par une mimique ou un détail de mise en scène.
En vieillissant on devient souvent trop gros (Je sais de quoi je parle), un peu sourd aux bruits infimes du monde, sans souplesse … n’est-ce pas ce qu’est devenu le cinéma ?
Dans toutes ses composantes notre société est atteinte par la même surenchère résultant de l’idée folle que la vérité absolue se trouve dans le comportement d’un marché … qui n’est que l’expression de l’usage d’outils de manipulation mentale par les acteurs les plus puissants sur ce fameux marché.
Pensant à ma vie de jeune kid, auprès de maman, où j’appris la sobriété, aux joies que m’apporte ce kid qui s’appelle Meilik et à ce film, que j’ai une nouvelle fois regardé sur mon écran avant d’écrire ces quelques lignes, je me dis qu’il est impossible qu’avant peu on ne soit pas conduits, paisiblement ou du fait d’un drame extrêmement violent, à remettre en cause notre modèle de vie. Comment penser, en effet, que la Terre puisse produire dix fois ce dont profite un milliard d’hommes « privilégiés » ?
Ces propos peuvent apparaître un peu décousus, mais les trois aspects sont étroitement liés dans mon esprit.
Maman détestait les excès, le gaspillage et les inégalités entre individus ; Meilik ne manque de rien mais il sera adulte à un moment où les tendances actuelles auront dû s’inverser pour un indispensable ré-équilibrage ; l’art étant toujours un précurseur des évolutions, quand verra-t-on le cinéma retrouver un mode d’expression plus proche des arts premiers que de l’actuelle débauche de technologie affadie ?
Jean-Paul BOURGЀS 5 février 2016