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Billet de blog 6 février 2016

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A l’origine était le bulbe

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Les plantes à bulbe sont largement présentes dans nos jardins, mais aussi dans notre alimentation.

Une soupe à l’oignon, une sauce au vin et à l’échalote, un gigot d’agneau bien aillé … font nos délices.

Avec cette étrange saison d’hiver qui ne se décide pas à accueillir la froidure, nous voyons déjà se dresser les jonquilles avec un large mois d’avance, certaines jacinthes se manifestent et nous ne tarderons pas à voir les tulipes sortir de terre, suivies peu après par diverses sortes de lis.

Ah !, les tulipes, c’est justement d’elles que je voulais parler un peu aujourd’hui.

Cette fleur, originaire d’une vaste zone s’étendant de la Turquie aux contreforts de l’Himalaya, est devenue d’une telle banalité qu’on en trouve largement dans nos jardins où elle refleurit d’année en année sans nécessiter aucun soin.

Pourtant c’est l’oignon de tulipe qui est à l’origine de l’éclatement de la première bulle financière de l’histoire aux Pays-Bas.

La culture et le commerce des tulipes n’est, en effet, pas une spécialité récente des Pays-Bas dont la Mecque se trouve au parc du Keukenhof où l’on peut, au printemps, voir la plus extraordinaire exposition de tulipes au monde.

Cette passion des Hollandais pour la tulipe, découle de l’arrivée des premiers bulbes dans ce pays vers la fin du XVème siècle et il s’y développa très vite une économie fort complexe. A la base se trouvaient ceux qui cultivaient les bulbes, dont tout jardinier sait qu’ils ont la propriété de se multiplier … et par conséquent de fournir de nouveaux bulbes plus nombreux … qui peuvent donc être à l’origine d’une prospérité commerciale.

La tulipe étant devenue la fleur qu’il fallait absolument avoir et la diversité des tailles et des coloris favorisant l’émergence de formes plus rares que d’autres, les oignons de tulipe furent l’objet d’un commerce de plus en plus fou. L’achat des oignons en été, ne donnant des fleurs qu’au printemps suivant, fut à l’origine d’un marché spéculatif considérable où les espoirs de tulipes d’exception atteignaient des niveaux astronomiques. Des chaînes d’acheteurs et de vendeurs se mirent en place et, de façon immatérielle, l’oignon encore en terre chez le producteur pouvait avoir eu plusieurs dizaines de propriétaires successifs avant d’aboutir réellement chez celui qui le planterait pour faire trôner une fleur d’exception sur son rebord de fenêtre.

L’envol des prix se poursuivit jusqu’au 6 février 1637 où, pour des raisons inexpliquées, il y eut, en quelques heures, beaucoup plus de vendeurs que d’acheteurs … provoquant une panique financière et l’effondrement des cours de ce qui apparaît aujourd’hui comme l’une des premières explosions d’une bulle spéculative.

Depuis presque quatre siècles, les phénomènes similaires n’ont cessé de se reproduire, ruinant périodiquement ceux qui avaient tout tablé sur une rapide croissance ininterrompue d’un produit. Il y eut la crise du blé en Amérique, la crise du café au Brésil où l’on en vint à brûler le café dans les locomotives, il y eut, récemment, la crise des subprimes.

Et, cependant, malgré la sanglante démonstration de ce que le phénomène du marché n’est absolument pas un garant d’un système raisonnable, certains continuent à ne croire que dans ce processus pour dicter la politique économique à conduire.

Nous aimons décidément beaucoup les tulipes … et la folie consistant à mettre tous ses oignons dans le même panier, qui se balance au bras du marché.

Jean-Paul BOURGЀS 6 février 2016

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