… tout le monde n’est pas malheureux !
Qui sort victorieux du sommet budgétaire de Bruxelles ?
On a pu vérifier ce que j’annonçais hier en disant à propos de François HOLLANDE « tout ce qu’il n’acceptera pas, mais qu’il gobera probablement ». Il a bel et bien gobé ce que David CAMERON voulait obtenir, à savoir une réduction de 3,7 % du budget européen.
Pour la première fois depuis le début de la construction européenne, le budget est en baisse … autrement dit nous amenons le drapeau … et nous mangeons notre chapeau devant les exigences de la City et de son Guignol (Excusez cette référence d’un Lyonnais).
Cette défaite, qui se traduit par une mise au pain sec de ce qui nous est commun, doit être analysée sur le plan politique. Une fois de plus, c’est « l’économie » qui a vaincu. J’oserai dire « l’économie de bout de chandelle » car, pour le Royaume-Uni, qui fut le fer de lance de ce naufrage, l’enjeu n’est que de cinq cent millions de £ (Je n’ai pas voulu l’exprimer en € pour respecter l’exception britannique). Rapporté au PIB des sujets de sa très gracieuse Majesté Elisabeth the second, cela n’en représente pas plus de trois pour mille, c'est-à-dire l’effet déflationniste de la politique de David CAMERON au dernier trimestre de 2012 ! Y avait-il là matière à se battre bec et ongle en promettant « les larmes et le sang » ? Assurément pas et l’objet de cette triste commedia del arte était avant tout strictement de politique intérieure.
Mais, alors, qui a été vaincu, s’il n’y a pas de véritable vainqueur ? Assurément les premiers qui ont été vaincus, ce sont ceux qui n’ont pas droit au chapitre dans l’Union Européenne comme dans chacun de nos pays, de nos régions, de nos villages … les plus démunis. L’Europe confirme que c’est à chaque pays de se préoccuper des conséquences sociales de ses décisions. Chaque pays en fera de même par rapport à ses composantes territoriales. Et chaque citoyen européen concerné n’aura qu’à s’en prendre à lui-même, sous le regard indifférent de ses voisins.
Par contre et par le miracle des cours en bourse, en quelques heures, beaucoup de patrimoines se sont accrus aujourd’hui de 1,35 % sans avoir rien fait pour cela … au CAC-40.
La désespérance de dizaines de millions d’autres s’est aggravée … et empirera encore lorsque leurs demandes se verront refusées par ceux qui leur diront avec un air compatissant : « Ce n’est pas compatible avec les orientations de l’Europe ».
Pourquoi savoir dire NON au Mali, si c’est pour dire OUI à Bruxelles à ceux qui, de plus en plus enfermés dans leur égoïsme national et parfois nationaliste, n’ont pas levé le petit doigt … ni ouvert leur portefeuille pour aller endiguer le raz de marée djhadiste au Sahel ?
Interrogeons l’ensemble des peuples d’Europe, demandons-leur s’ils se trouvent bien représentés par ces dirigeants dépourvus de vision d’avenir. Et, s’ils disent majoritairement que c’est bien comme ça qu’ils voient l’avenir, une ère s’achèvera et je ne sais ce que sera l’avenir.
Pour moi, dont la jeunesse fut baignée d’espoir et de passion européenne, en arriver là est un séisme moral. Mais, comme je le rappelle souvent, le courage ça commence déjà par le fait de ne pas se mentir à soi-même.
Parlons-nous vrai ! L’Europe est morte ! Si l’on dit oui à cette minablerie qu’est l’accord de Bruxelles visant à rétrécir l’Europe, replions-nous sur notre territoire, nos intérêts immédiats, nos valeurs … parce que nous n’avons plus rien d’intéressant à partager.
Toute la construction européenne a été faite de ces sommets qui avaient peu de chance de se terminer sur un accord et qui, pourtant, se concluaient toujours positivement aux petites heures de la matinée et en ayant « arrêté les pendules ». A cette époque la volonté d’aboutir et « d’en sortir par le haut » l’emportaient sur toute autre considération relevant de la défense raisonnable des intérêts nationaux. Désormais on a fait le choix « d’en sortir par le bas » … nous allons vers la fin. Reconnaissons-le.
Jean-Paul Bourgès 9 février 2013