De qui se moque-t-on ?
Le rapport JOSPIN vient d’être remis à François HOLLANDE, solennellement, tous deux bien assis, face à face à l’Elysée, entourés d’un aréopage de pages heureux de palper ce rapport de cent quarante pages. Beaucoup de papier pour ne pas dire grand-chose et passer sous silence les vérités qui auraient pu fâcher.
Avec la composition qu’avait la Commission … pas une seule personne engagée dans la vie économique, pas un syndicaliste, pas un responsable du monde associatif … juste l’establishment de la haute administration « à la Française » et de la Fac de Droit plus une ancienne Ministre de SARKOZY en alibi d’ouverture, je n’ose dire en placébo pharmaceutique … et, cerise sur le gâteau, le président de la Fondation des Sciences Politiques qui vient de montrer, simultanément, qu’il se moque comme d’une guigne de ce que la Cour des Comptes dira de la gestion de celui qu’il a propulsé de façon putschique à la tête de Sciences-Po … on ne pouvait guère espérer une pensée un peu audacieuse sur ces maux qui rongent de façon de plus en plus insoutenable notre vie publique.
Quel est donc ce sujet qui n’est pas même évoqué ?
On nous amuse, à juste titre cependant, avec le cumul des mandats. Certes le partage du gâteau est un vrai problème pour ceux qui font la queue à la porte de la pâtisserie.
Mais on se moque de nous. La question n’est pas de savoir comment les postes doivent tourner, toujours entre les mêmes qui appartiennent à une toute petite caste. La question, si l’on veut vraiment rénover notre vie publique, c’est de savoir comment l’on peut fermer les portes du pouvoir à cette caste … et non, même, simplement l’ouvrir à d’autres.
Regardons la composition socio-professionnelle du Parlement et comparons-la à celle de la société française. L’écart est impressionnant. Comment les Français s’y reconnaîtraient-ils ? Comment ces Mandarins représenteraient-ils la France ?
La première chose à faire cesser, c’est l’abolition des privilèges qui firent que Jacques CHABAN-DELMAS, un homme fort respectable au demeurant, devint, à moins de trente ans, un professionnel de la politique … mais fut, cependant, nommé « Inspecteur Général des Finances » à l’ancienneté après avoir été Premier Ministre, sans avoir jamais rien inspecté depuis trente ans. Il faut exclure les fonctionnaires, de quelque rang que ce soit, des fonctions électives. Comment, en effet, faire la Loi et veiller à son application quand on fait partie de ceux qui ont, en principe, choisi d’être aux ordres du souverain qu’est « le peuple » ?
Au-delà de cette contradiction fondamentale, peut-on espérer quelque chose d’un pays où frauder, mentir, magouiller y compris dans les plus hautes sphères de l’Etat parfois-même avec des puissances étrangères … semble être devenu un sport national ?
Je ne suis pas un adepte de l’intrusion du jugement public dans les alcôves, mais on peut quand-même s’interroger sur le fonctionnement des USA, par rapport au nôtre, quand on voit que le patron de la CIA, ancien chef des armées américaines en Irak, vient d’être contraint à la démission pour avoir eu une relation extraconjugale. Chez nous, esprit gaulois en bandoulière, nous sourions du surnom de « cinq minutes douche comprise » d’un ancien président de la République que les Guignols de l’Info avaient, par ailleurs, affublé du titre de « Supermenteur » et qui est, cependant, fort estimé de tous.
Notre morale publique est à repenser totalement, et ce billet ne prétend pas balayer l’ensemble du sujet mais il vise juste à dire à quel point la « Commission JOSPIN » est passée à côté du sujet, même si certains élus, de droite comme de gauche, poussent déjà des cris d’orfraie parce qu’on leur dit que le cumul des mandats ne devrait pas exister.
Jean-Paul Bourgès 10 novembre 2012