Jean-Paul Bourgès (avatar)

Jean-Paul Bourgès

Retraité actif

Abonné·e de Mediapart

1336 Billets

0 Édition

Billet de blog 20 juillet 2013

Jean-Paul Bourgès (avatar)

Jean-Paul Bourgès

Retraité actif

Abonné·e de Mediapart

Bien choisir les portes et les ponts

Un article de Libé daté du 17 juillet, nous rapporte qu’en Argentine l’émission d’un billet de cent pesos, à l’effigie d’Eva PERON, provoque des protestations vigoureuses avec, sous couvert de divers arguments techniques, le déchainement de ceux auxquels l’image d’Evita provoque des éruptions urticantes.

Jean-Paul Bourgès (avatar)

Jean-Paul Bourgès

Retraité actif

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Un article de Libé daté du 17 juillet, nous rapporte qu’en Argentine l’émission d’un billet de cent pesos, à l’effigie d’Eva PERON, provoque des protestations vigoureuses avec, sous couvert de divers arguments techniques, le déchainement de ceux auxquels l’image d’Evita provoque des éruptions urticantes.

A l’époque où notre monnaie était le Franc, nos billets représentaient aussi des personnages de l’Histoire, mais il me semble bien que les plus récents, comme par exemple Victor HUGO, étaient morts depuis presqu’un siècle lorsque nous osions les représenter sur un billet.

Désormais, avec l’euro, seules des portes sur le recto et des ponts sur le verso, ornent ces billets communs à dix huit pays. Ça semble plus consensuel, mais est-ce si vrai ?.

Nous sommes privés, là, d’une belle occasion de nous étriper comme nous aimons tant le faire et je me suis dit qu’il était probablement possible de ne pas voir dans ces portes la marque d’une ouverture des esprits, ni de ces ponts un signe de trait d’union. Il suffirait de bien choisir les uns et les autres pour que nous puissions montrer aux Argentins que, nous aussi, nous savons nous battre à partir des symboles du passé. Je me suis alors efforcé d’imaginer quelques portes et quelques ponts qui seraient bien capables de nous lancer dans de magnifiques guerres picrocholines.

Imaginez, par exemple, que l’on retienne le « Pont Valentré », dont la légende dit qu’il ne fut achevé que par l’aide du diable … qui fut, d’ailleurs roulé, car ayant demandé qu’on lui offre la première personne qui franchirait le pont, les Cadurciens eurent l’astuce d’y faire d’abord passer un renard. Cet ouvrage d’art si élégant ne déclencherait-il pas de fortes contestations, en raison de cette image de pacte avec le diable et de la duplicité qu’il illustre ?

 Si nous choisissions le pont Saint Bénézé, autrement dit « le pont d’Avignon », qui n’est bon qu’à danser dessus, certains n’y verraient-ils pas la marque d’esprit futiles représentatifs de ce pays des cigales où l’on danse tout l’été … au lieu de travailler toujours plus dur à l’édification d’un monde où le SMIC ne devrait plus être qu’une vieille lune passée ? A propos de ce célèbre pont, il ne serait pas surprenant que sa proximité du Château des Papes puisse aussi déclencher l’ire de quelques adeptes d’une laïcité intransigeante réagissant à ce qu’ils considéreraient comme un symbole de papisme caché.

Paris comprend toujours, non à sa périphérie mais bien proche de son cœur historique, quelques portes, comme la porte Saint Martin. Mauvaise pioche à coup sûr car si ce militaire romain est un des personnages majeurs de notre Histoire, il est surtout le symbole du partage avec les plus démunis qui n’est pas particulièrement dans la ligne du néo-ultra-libéralisme qui tient le haut du pavé en Europe.

Pendant que je réfléchissais à ce que l’on pourrait bien mettre sur les billets d’euros, j’apprends qu’à Chypre, "la troïka" est contente. Ses représentants étaient venus vérifier le redressement du pays … autrement dit le massacre du niveau de vie des Chypriotes et la préservation des intérêts de ceux qui ont prêté de l’argent à l’Etat chypriote. Tout va bien. Les premiers sont désespérés, les seconds sont rassurés. C’est peut-être surtout pour ça qu’il n’est pas imaginable de faire figurer la porte Saint Martin sur les billets d’euro. Le partage façon "troïka" et le partage vu par Saint Martin c’est trop différent.

Finalement les billets prêtant le moins à contestation sont ceux qui ne représentent que des abstractions, ou éventuellement comme dans certains pays, des animaux ou des fleurs. Ça n’est pas moi qui m’en plaindrais, mais est-ce que nous ne nous ennuierions pas, si nous n’avions plus de sujets mineurs pour nous battre ?

 Jean-Paul Bourgès, le 20 juillet 2013

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.