… ou plutôt précarité de nos réponses ?
En soirée j’ai participé à une réunion de la « Commission Solidarité et Cohésion Sociale » du « Conseil de Développement du Grand Lyon ». Nous réfléchissons actuellement à l’évolution, quantitative et qualitative, de la précarité dans l’Agglomération lyonnaise afin d’enrichir la vision que les élus en ont et leur proposer des actions à conduire.
Ce soir nous rencontrions le vice-Président du Conseil Général du Rhône en charge de l’intégration sociale et l’adjoint au maire de Lyon qui anime le Centre Communal d’Action Sociale (CCAS) de la ville de Lyon.
L’assistance était composée pour l’essentiel de responsables d’associations qui agissent dans différents domaines (Le logement, l’aide alimentaire, l’insertion par l’emploi, la culture, l’accès des plus défavorisés aux droits …) qui les mettent au contact permanent avec ceux que les Institutions identifient comme des personnes précarisées.
Loin de moi l’idée de dévaloriser l’action conduite par nos structures publiques qui, grâce à des dispositifs comme le RSA et avec un dévouement réel, évitent à de très, trop, nombreuses personnes de plonger plus bas encore dans une misère totale. Leur volonté de faire face aux situations dramatiques de ceux qui vivent avec la moitié de ce qui est le seuil de pauvreté n’est pas douteuse. Mais, même dans un dialogue avec des « spécialistes de la précarité » (J’ai mis des guillemets tellement je trouve atroce qu’on puisse être spécialiste de ces sujets sans les vivre soi-même … car le seul spécialiste qui devrait être autorisé à en parler, c’est celui qui vit dans ce contexte), la coupure entre leurs préoccupations strictement organisationnelles et la réalité vécue est apparue flagrante.
Or l’un des points majeurs de leurs propos est, pourtant, la mise en évidence de la coïncidence entre précarité et isolement ou solitude. Certes, ils ne savent pas dire où fut la poule ou l’œuf, mais ils constatent tous la présence des deux faits chez « les précaires ».
Du coup, à côté des dispositifs financiers destinés à apporter à ceux qui, à la suite de parcours fort divers, se sont retrouvés dans la précarité (Ou, ce qui me semble moins langue de bois, dans la misère) des moyens et des aides pour en sortir, il me semblerait tout aussi important et utile de s’interroger sur les solutions à mettre en œuvre pour briser cet isolement qui constitue une prison où le manque d’argent est une double peine.
Se poser la question sous cette forme n’est-ce pas se demander comment notre société peut être ou redevenir une société de solidarité entre les personnes et non seulement entre les personnes et des institutions ?
Bien évidemment je n’imagine même pas qu’une solidarité et une proximité humaines puissent exonérer la collectivité de mettre en œuvre les moyens matériels indispensables pour ne laisser tomber personne. Mais je me demande s’il n’est pas également indispensable de trouver le moyen de renouer les fils d’un tissu social qui part en lambeaux avec des personnes qui sont dans la misère sans que leur voisin s’en rende compte, s’en préoccupe, n’y apporte une présence attentive … pour ne pas dire amicale.
Jean-Paul Bourgès 22 janvier 2013