En ce jour de Noël, Maly est partie au cinéma avec sa sœur et je flemmarde tranquillement, en rêvassant un peu. Et je repense au billet d’hier, aux réactions qu’il a provoquées, à ma vie quotidienne après dix années de retraite.
Je suis physiquement en bonne forme, malgré un trop grand nombre de kilos à tirer. La tête fonctionne correctement malgré un ralentissement évident de certaines aptitudes, comme ma vitesse de lecture qui a beaucoup baissé. Je suis un peu plus vite fatigué qu’une dizaine d’années auparavant, mais, au total, je serais sûrement en état, au prix de plus gros efforts, d’avoir une activité professionnelle et, sauf pépin de santé, je ne pense pas changer de rythme avant plusieurs années.
Du coup je me mettais à réfléhir à la question de « l’âge de la retraite », à partir de mon cas personnel, mais en ayant la conviction de n’être ni en bien meilleure forme ni en moins bonne que beaucoup de personnes venant, comme moi, de passer le cap des soixante dix ans.
Si l’âge de la retraite devait être déterminé par l’âge auquel on n’a plus la force de travailler, on pourrait probablement le fixer aux environs de soixante dix ans et ceci n’a rien de bien étonnant puisque, dans notre pays, la durée moyenne de la vie s’est allongée de presque dix ans depuis 1981 où, sous François MITTERRAND, la retraite avait été ramenée à soixante ans. Sur cette base les personnes qui pensent impossible d’assurer des retraites convenables en maintenant l’âge de la retraite aux alentours de soixante ans prônent l’adoption de la fin de l’activité professionnelle vers soixante cinq ou même soixante sept ans. C’est un raisonnement qui peut se comprendre et qui s’exprime par le fait de dire : si on vit dix ans de plus partageons le surplus en travaillant sept ans de plus et en ayant trois ans de retraite de plus.
Mais ce raisonnement, strictement démographique et économique, passe à côté de quelque chose de beaucoup plus important qui fait la suite de mon billet d’hier.
Toute la vie active n’a pas besoin d’être consacrée à gagner de l’argent. Il est sain, pour la société comme pour chaque individu, de donner de son temps au profit des autres sans aucun rapport marchand. Pourquoi pas deux tiers pour assurer la subsistance de sa famille, y compris en finançant la retraite des plus anciens et donc la sienne dans le futur par un bon système de retraite par répartition, et un tiers dédié gratuitement à la vie collective.
L’idéal ça serait, tout au long de la vie de travailler six ans puis de s’arrêter trois ans pour s’investir bénévolement dans le social, les activités culturelles ou sportives. Mais ça semble bien difficile à gérer, tandis qu’en étant en retraite à soixante ans, puis en ayant des activités associatives jusque vers soixante quinze ou quatre vingts ans, on préserve cet équilibre d’un tiers au profit des autres.
Repousser l’âge de la retraite ça n’est pas qu’assurer le financement de celle-ci, c’est aussi faire le choix d’une société du « chacun pour soi ».
Jean-Paul Bourgès 25 décembre 2014