Il y a dix-huit mois, « être de gauche », c’était s’apprêter à voter au premier tour de l’élection présidentielle pour François HOLLANDE, Jean-Luc MÉLENCHON ou Eva JOLY en étant sûr de se reporter au deuxième tour sur François HOLLANDE.
C’était simple comme bonjour. Mais ça s’est bien compliqué depuis.
Ce que Ségolène ROYAL avait, à l’époque de la campagne présidentielle précédente de 2007, appelé « l’ordre juste » s’est-il incarné dans le vallsisme, dont la différence avec l’hortefeuxisme est difficile à déterminer sans être un expert en « sodomie de drosophiles » ?
Ne plus saturer, très au-delà des limites humaines, les prisons, est-ce une politique pragmatique contraire à la récidive des petits et primo-délinquants ? Ou est-ce l’expression d’une intolérable reculade devant une voyoucratie envahissante ?
Dire que l’impôt a atteint une limite supérieure à partir de laquelle il ne peut que baisser, alors que les finances publiques sont encore loin d’être assainies … tandis que l’évasion fiscale reste un sport national, c'est-à-dire alors que nous avons toujours besoin de dépenser plus que ce que l’Etat et les collectivités locales encaissent, est-ce faire preuve de réalisme politique ou est-ce espérer trouver des imbéciles qui y croiront ?
Tout l’été fut rempli de débats sur ces thèmes … et on ne peut pas dire que le mois de septembre arrive dans un contexte bien éclairci. On peut même penser que la confusion a rarement été aussi forte.
Le PS se réunit à La Rochelle, mais son faible désir de clarification semblerait nécessiter qu’un nouvel Henri DUNANT s’émeuve comme au spectacle de la bataille de Solférino pour créer une« Croix Rose ».
Le Front de Gauche, après avoir puissamment divisé l’ensemble de la gauche avec une belle réussite, retourne son talent vers l’interne de ses composantes et les noms d’oiseaux volent désormais entre ses différents leaders.
Quant à Europe Ecologie les Verts, on ne sait même plus si ce parti existe encore, entre ceux qui sont au gouvernement et la bouclent, ceux qui ne sont pas au gouvernement et ne voudraient pas imprudemment compromettre une possibilité de l’intégrer et ceux qui, comme Eva JOLY, n’auraient guère de mal à changer ses lunettes vertes pour des lunettes rouges … à condition d’être sûre d’avoir une position éligible aux prochaines élections européennes.
Alors, dans ce contexte, que veut dire : « rester de gauche » ?
A titre d’exemple, il me semble que c’est croire encore à la primauté du collectif sur l’individualisme et ne pas considérer que la financer par l’impôt soit une hérésie. C’est refuser fondamentalement le nationalisme et ne pas avoir peur de l’internationalisme. C’est opter fermement pour la protection des plus faibles, qu’ils soient Français ou non, au lieu de dire plus ou moins franchement « Les Français d’abord ». C’est préférer l’équipement des cités en centres sociaux et en pédagogues, plutôt qu’en prisons et en policiers. Et bien d’autres choses.
Manifestement, au sein de la « gauche de gouvernement » il n’y a pas que des gens de gauche.
L’automne arrive, les cèpes aussi.
Sera-t-il aussi simple de faire la différence entre les diverses tendances internes à « la gauche » à l’apparence parfois trompeuse qu’entre un cèpe délicieux et un cèpe immangeable (Certains peuvent être aussi amers qu’un réveil politique douloureux) ? Sur le plateau ci-dessus, je vous l’assure, il n’y a que du très bon (Au moment où vous verrez cette photo nous aurons tout mangé, avec un beau civet de lapin à la crème) !
Je doute que le régalant et l’infect soit aussi facile à repérer sur le terrain politique. Faisons quand-même l’effort de déterminer qui représente quoi, cela nous évitera quelques amertumes.
Jean-Paul Bourgès 26 août 2013