Briser partout l’égoïsme
La principale caractéristique d’un égoïste c’est la certitude qu’il a de ne pas l’être.
Regardez autour de vous et écoutez ceux que vous considérez égoïstes. Ils vous diront, avec une parfaite bonne foi, qu’ils sont généreux et que, s’ils refusent d’aider tel ou tel, c’est uniquement parce que ceux-ci ont des comportements qui ne méritent pas qu’on leur donne un coup de main. A défaut de coup de main, un bon coup de pied de l’âne fera l’affaire. Ceci est particulièrement vrai à l’intérieur des familles.
La famille européenne n’échappe pas à cette loi.
Je sais bien qu’éradiquer l’égoïsme est une complète utopie. Mais j’ai quand-même besoin de me convaincre que nous pouvons sortir de cet affreux enfermement dans l’égoïsme.
C’est, bien sûr, en pensant à la Grèce que j’écris ces lignes.
Ce petit pays, par la population, par la superficie, par le poids économique … mais qui est le principal creuset philosophique à partir duquel nous sommes devenus ce que nous sommes, est « dans la merde » (Que l’on veuille bien m’excuser mais je n’ai rien trouvé de plus clair).
En pensant à la Grèce, il me revient l’image de cette fillette Colombienne prisonnière d’un trou se remplissant d’eau où le niveau du liquide monta inexorablement devant les caméras du monde entier … jusqu’à sa fin.
Il faut que cesse ce voyeurisme du téléspectateur qui assiste en direct à une agonie et que nous manifestions clairement, à la manière de John KENNEDY disant « Ich bin ein berliner », que nous sommes tous Grecs, comme l’a si clairement proclamé Edwy PLENEL il y a deux jours. A Bruxelles, en ce moment même, les ordinateurs ronflent pour calculer combien ça pourrait coûter de lâcher la Grèce. Il faut exiger la fin de ces calculs putrides et indécents. Ce n’est pas le sujet. Ce qu’il faut calculer et répartir en fonction des états de fortune des pays, c’est uniquement ce qu’il faut payer pour rétablir la Grèce dans sa dignité.
L’Histoire de ce pays depuis la seconde guerre mondiale est un long martyre. Sortons de ce regard débile qui cherche à déterminer si c’est « la faute à la droite » ou « la faute à la gauche ».
La Grèce se bat pour construire un Etat; ce pays a connu la dictature militaire (Rappelons-nous « Z »); deux composantes essentielles ne paient pas leur contribution aux charges communes, l’église orthodoxe et les armateurs; un stupide conflit entre deux pays membres de l’OTAN, la Turquie et la Grèce, ont conduit les Grecs à se sur-armer … les Egyptiens, il y a trois mille ans, avaient déjà un cadastre efficace, la Grèce n’en est pas encore dotée.
Avec l’ensemble des Grecs, dans le respect de leur volonté politique, il faut aider le plus vieux membre de la famille à se rétablir en se partageant sa charge et en aidant ce pays à se doter d’une administration moderne. J’aimerais que ceux qui ont tant profité des îles paradisiaques de la mer Egée soient maintenant les premiers à s’interposer entre les vautours de la « Finance internationale » et ceux qui les avaient ravis par leur légendaire gentillesse.
Et si cet appel démodé au refus de l’égoïsme ne fait pas changer de point de vue, je me permets de rappeler qu’en famille, comme au niveau international, laisser libre cours à l’égoïsme n’est que la plus sûre façon de se casser tous la figure.
Jean-Paul Bourgès 26 mai 2012