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Billet de blog 23 novembre 2022

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Le voile qui dévoile... la radicalité du capitalisme

Ce livre propose un dépaysement intérieur. Mettre momentanément à distance ses sentiments et ses convictions pour éviter les pièges du scandale, de la condamnation et du rejet. Laisser de côté les principes (laïcité) et les croyances (religieuses) pour tenter de comprendre un fait social têtu à l’aide de l’anthropologie : le port du voile islamique.

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Le voile qui dévoile...

la radicalité du capitalisme

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Editions l'Harmattan

Paris, 2022

156p.

Ce livre propose un dépaysement intérieur. Mettre momentanément à distance ses sentiments et ses convictions pour éviter les pièges du scandale, de la condamnation et du rejet. Laisser de côté les principes (laïcité) et les croyances (religieuses) pour tenter de comprendre un fait social têtu à l’aide de l’anthropologie : le port du voile islamique.

Cette pratique religieuse se banalise. Et, à entendre les témoignages d’un bon nombre de jeunes filles françaises et musulmanes, il est impossible de la réduire à un instrument de domination machiste et archaïque comme c’est le cas en Iran aujourd’hui. 

Elle apparaît aussi comme l’expression d’une liberté individuelle et collective à travers laquelle s’affirment des racines culturelles, dans un pays anciennement colonisateur. Il en va comme si les troisième et quatrième générations issues des immigrations postcoloniales n’avaient plus honte de vivre leurs traditions publiquement. Mettant un terme à la colonisation symbolique des esprits.

Dans les années 1970, lorsque le communisme et le marxisme offraient l’espérance d’un monde plus juste, les têtes se dénudaient en Afrique du Nord. Avec l’effondrement du mur de Berlin, l’hégémonie du capitalisme n’offre plus d’autres utopies que l’enrichissement à court terme. Cette faillite de l’esprit engendre un renouveau des espérances religieuses. Les têtes se redressent en se voilant. Passant des utopies aux eschatologies.

De l’exhibition publicitaire des corps dénudés aux cheveux cachés sous le voile, nous pressentons une contestation frontale du corps fait marchandise. De l’intuition que le système est pourri — celui dans lequel nous vivons au retour à une interprétation littérale du texte sacré, un cheminement se dessine. Qui ne touche pas simplement l’Islam, mais toutes les religions. Un durcissement des pratiques et des croyances à l’œuvre aussi dans les courants politiques. Ainsi, en France, peut-on voir s’opposer le béret et le voile, le saucisson et la viande halal, Jeanne d’Arc et le Prophète.

Une question se pose alors : quelle violence provoque ce développement des fondamentalismes ?

Nous sommes conduits, étape par étape, à découvrir le moteur — le paradigme — de la culture occidentale dont la traite négrière, les empires coloniaux, la révolution industrielle et aujourd’hui la mondialisation libérale sont des éléments structurels. Une histoire de l’Occident en prise avec les sociétés traditionnelles. Une violence qui repose sur une pulsion qui ne rencontre plus de limites. Qui ouvre sur une ère culturelle : celle de la prédation de l’homme et de la nature. Le voile islamique serait le symptôme d'une radicalité inavouée logée au cœur de la culture occidentale. Si les religions peuvent se radicaliser, le capitalisme ne le peut pas, car il se découvre radical en son essence.

Youtube: Jean-Paul Sauzet. Film "Le voile qui dévoile".

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