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Billet de blog 26 mars 2020

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Madame de Villedieu: Les annales galantes de la Grèce, 1687!

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Les Annales galantes de Grèce, 1687.

Illustration 1
Les Annales galantes de Grèce. © Jean-Pierre Boudet

La princesse Phronine.

En 1687, Madame de Villedieu publie Les Annales galantes de Grèce : « Assez d’auteurs célèbres ont pris soin d’écrire des actions mémorables des anciens Grecs, de les faire passer jusqu’à nous ; mais aucun ne s’est avisé de parler des Grecques fameuses. Les Nations étant composées de deux Sexes, on ne peint la Grèce qu’à demi, quand on ne peint que les grands Hommes. Disons aujourd’hui quelque chose des Dames. Commençons nos Annales de Grèce par les malheurs de la Princesse Phronine.

Elle vivait dans la trentième Olympiade, ce qui reviendrait environ à l’an 1400 de la Création du monde. Cette Princesse Grecque était belle, ce qui, de tout temps, fut le partage singulier de cette Nation. Phronine, fille d’Etéarque, Roi de Crète, fut aussi plus exposée que les beautés ordinaires. Elle était fort jeune quand sa mère mourut ; et le Roi son père s’était marié en secondes noces à une Personne nommée Aristie, qui passait pour une des plus belles femmes de Grèce.

A mesure que la beauté de Phronine devenait plus parfaite, Aristie en devenait plus jalouse et plus envieuse. Comme les passions qui se laissent connaître ont des effets moins dangereux que celles qu’on a l’art de déguiser, la haine secrète de la Reine était cachée sous les apparences d’une bonté qui, hors la Princesse, trompait toute la Cour.

On n’entendait sortir de la bouche d’Aristie que des louanges de Phronine, ou des prières au Roi de donner à sa fille des parures plus magnifiques. Elle poussait souvent la patience de ce Prince à bout.

Il y avait alors en Crète, un Marchand Etranger qui trafiquait au Levant, et qui s’était acquis beaucoup d’estime à la Cour d’Etéarque. Il avait de la bonne mine, de l’esprit, et de la libéralité. On mettait le prix à ses pierreries, et souvent il faisait autant de présents que de ventes. L’Histoire le nomme Themison et je le nomme Themiste… La Reine envoya quérir ce Marchand et lui dit. Je voudrais faire un présent de pierreries à la Princesse, et ne puis sur cela faire convenir au Roi de mes sentiments. Portez à la Princesse les plus beaux Diamants que vous avez et vous lui laisserez une Garniture…

Elle le fit mener chez la Princesse. Le Marchand fut introduit jusques à la ruelle du lit de Phronine… Quand elles sont naturellement belles et propres, l’habit le plus magnifique ne leur est point si avantageux que la négligence du lit… Quand il la vit dans cette fraîcheur, les bras nus, la gorge à demi découverte, sur laquelle tombaient deux ou trois boucles de cheveux noirs, il fut si surpris de cet objet, qu’il en demeura comme immobile…

En sortant de chez Phronine, il alla rendre compte à la Reine. Je n’ai pu encore exécuter vos ordres, la Princesse s’est contentée de voir ; mais si vous me donnez la liberté de retourner souvent à son appartement… Vous direz que c’est un présent du Prince d’Erice, Père de la défunte Reine ajouta Aristie. Aristande, premier Ministre, entra dans la chambre. La Reine fit signe qu’on les laissât seuls. Madame, lui dit-il, notre feint Marchand est Megabise, Prince des Myniens, qui pour éviter la fureur du Sénat de Lacedemone, se déguise. L’Esclave Phrygienne que j’ai donné à la Princesse l’a vu mille fois, quand elle servait la fille du Roi Praxoras..."

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