Certains politiques, notamment M. Ciotti à l'occasion des événements du 1er mai à Paris ont dénoncé la radicalité intellectuelle, radicalité intellectuelle qui mènerai directement aux violences "toutes symboliques"des black-bloc. J'ai eu à ce moment là le vague sentiment de voir émerger chez les petits procureurs de la pensée un désir, une volonté de contrôler, voire d'étouffer la pensée, ou plutôt la pensée "dite" radicale et classée à l'ultra gauche.
Il est inhérent à une pensée radicale remettant en cause un ordre établit, qu'elle puisse effectivement amener certaines personnes à agir en conséquence, surtout lorsque l'ordre dominant est à ce point aveugle et sourd à ses idées. Aveugles et sourd non pas forcement au regard de la pensée radicale elle-même car il faudrait à minima qu'ils soient à même de la comprendre, voire de la partager, mais par exemple aux simples revendications des corps sociaux intermédiaires que sont les syndicats.
Il ne s'agit pas de se cacher derrière son petit doigt, c'est bien évidemment à une remise en cause de fond que s'attache toute pensée véritablement radicale et pas seulement celle des black-bloc. La radicalité, cette sensibilité particulière, s’appuie et prend ces racines sur l'expérience, l'existant et en particulier pour ce qui me concerne sur les conséquences du capitalisme sur le social, le vivant, le biologique.
La soumission muette des individus aux rapports sociaux particulier du capitalisme est aussi une forme de radicalité à l'intérieur de laquelle les intellectuels, philosophes, politiques et autres managers du supermarché global tentent de maintenir les humains faisant preuve ainsi d'un aveuglement, d'une surdité toute radicale. Les extinctions de masses d'espèces animales et végétales atteignent une radicalité jamais vu auparavant et le climat est en passe d'être radicalement transformé lui aussi. Si nous écoutions les vents dominants nous devrions donc assister stoïquement, benoîtement, silencieusement et religieusement au spectacle de la catastrophe qui vient, radicalement cloués devant notre télévision, une bière dans une main et l'autre dans le paquet de ships.
Deux radicalités s'affrontent aujourd'hui, l'une installée, fonctionnarisée, dont la pensée semble avoir atteint son apogée et se contente de pantoufler en tentant de gérer doctement les affaires courantes, et une autre se libérant des poncifs libéraux les plus éculés, une pensée plus libre dénonçant avec courage et persévérance les ravages et la morbidité des mécanismes capitalistique qui nous enchaînent et nous entraînent vers le désastre collectif.
Quelques nuances toutefois, contrairement à celle de M. Ciotti et consort, la pensée radicale "de l'ultra gauche" ne s'abaisse pas forcement à tenter d’opposer une partie de la population à une autre pour conserver un ordre des choses qui serait aussi immuable que ne l'a été à son époque la royauté divine avec ses petits avantages en nature ou symbolique (1). D'ailleurs qui serait aujourd'hui M. Ciotti et consort sans les révolutions intellectuelles qui nous ont fait naître et devenir ce que nous sommes, un petit marquis, un roitelet, un esclavagiste, un courtisan, un grand prêtre, un colonisateur massacreur...un révolutionnaire...voir un pourfendeur des idées reçues ?
La pensée radicale est une pensée qui tente de dénoncer l’inanité et la dangerosité des postulats, des postures, des comportements qui font et participent à l'ordre des choses et parfois elle se donne les moyens d’apparaître brusquement pour ce qu'elle n'est pas forcement en s'en prenant violemment à de modestes symboles.
Le fascisme et l’extrême droite ont toujours été les garants des ordres établis et c'est le rôle dévolue au fascisme à l'intérieur de la grande démocratie libérale de supermarché que de servir ces maîtres. Mais M. Ciotti semble moins ennuyé par cette radicalité là, tout comme M. Colomb par ailleurs. En hommes d'intérieur ils n'aiment pas le désordre que leurs idées génèrent et les promoteurs d'un d'ordre d’extrême droite valent beaucoup mieux pour eux que les promoteurs de nouveaux rapports sociaux qu'ils dénoncent alors comme fauteurs de troubles.
Que M. Ciotti et consort rejettent leur propre radicalité et inconsistance sur ce qui n'est en fait qu'une réponse du berger à la bergère ne nous fera pas oublier la légitimité des peuples à remettre en cause l'ordre établi. La démocratie, l'échange intellectuel n'existent pas pour administrer un quotidien congelé, réifié par le capital automate, c'est aussi un moyen, un outil pour penser les évolutions, les émancipations et donc les bifurcations. Bifurcations non pas seulement désirables, souhaitables, mais également aujourd'hui indispensables à la préservation d'une certaine idée de l'éthique et de l'intelligence et la préservation d'un environnement qui puisse maintenir la vie en vie.
Les Réactions méticuleusement outrées faisant suite à la manifestation du 1er mai à Paris relèvent-elles du syndrome du pompier pyromane ? ou d'un problème de logique, de compréhension et donc de sens.