Rien de tel qu’un politicien pour barbouiller un discours de grandes phrases. Samedi dernier, François Hollande, candidat aux primaires socialistes, n’a décidemment pas lésiné sur la sauce…
L’ancien premier secrétaire, à défaut de poursuivre sa campagne en pente douce comme à son habitude, est passé du stade «d’humble personnage» à celui de «plus grand que nature». Comme s’il fallait soudain se prendre pour un être d’exception pour devenir Président de la République…
Enfin. Pour reprendre cette métaphore culinaire (fort pauvre, j’en conviens), Hollande a décidemment mis trop de beurre dans son émulsion, rendant son discours lourd, gras et à la limite de provoquer une crise de foie chez votre humble écrivaillon. Pourquoi donc mes jolis ? Grâce à ce bijou discursif, plutôt étonnant de la part du conseiller général.
Un devoir supérieur
J’ai, par la position qui est la mienne aujourd’hui, un devoir supérieur...à celui d’autres…Qui est de me tourner vers les français.
Ce devoir supérieur qu’invoque ce -fort crédible- candidat incombe à tous les politiciens, sans exception de niveau hiérarchique et de mandat. Se tourner vers la population doit être une notion imbriquée dans la conscience et les modus operandi des élus.
Loin de moi l’idée d’affirmer que François Hollande se sent investi d’une mission qui le distinguerait nettement de ses concitoyens. Cependant, l’homme devrait faire attention à son choix de formule.
La «clip»
Dans un contexte où les «communicants» prennent de plus en plus de place au sein d’un paysage électoral déjà surchargé, la première impression fait souvent office de portrait d’ensemble. Le député de Corrèze l’a fort bien compris, de par sa transformation physique, premier signe d’un renouvellement d’image nécessaire à sa course électorale. Mais à La Rochelle il a négligé cette fâcheuse habitude de certains médias de citer les politiciens en petits traits abrégés.
La «clip», comme on l’appelle au Québec, domine les journaux télévisés et réduit malheureusement les déclarations des acteurs sociaux à des formules raccourcies, souvent prises hors de leur contexte.
Dans cette phrase de M. Hollande cependant, point de doute. Son devoir est, de ses propres paroles, supérieur «à celui d’autres». Or pour moi, un candidat à une élection, primaire, présidentielle, française, provinciale, fédérale ou québécoise a le droit de se présenter mais surtout le devoir de débattre des idées. Sur un pied d’égalité. Malgré l’expérience, il doit continuer à se comporter en citoyen. Ce qu’il n’a pas fait ce jour là, à mon humble avis.
Une petite pincée…
Martine Aubry déclarait samedi dernier qu’elle n’était pas à La Rochelle pour un «concours de popularité». Grand bien lui en fasse. Car son principal adversaire a visiblement décidé de se présidentialiser afin de se montrer dans toute sa «grandeur».
François Hollande a-t-il reçu un appel de l’au-delà ? Si on se fie à ses paroles de samedi dernier, il aurait passé la nuit en conciliabule avec Jean Jaurès et Léon Blum, qui lui ont vivement suggéré d’invoquer ses hauts devoirs. Au grand malheur de la substance de son discours, plus fade que jamais.
Pour redonner goût aux socialistes de le choisir comme candidat à la présidentielle,il eut fallu qu’il ajoute à son discours une petite pincée…d’humilité.
À moins qu'il ait été mal cité, bien sûr.