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Billet de blog 20 avril 2024

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L'avenir de l'au revoir (Au revoir les enfants)

Le tableau Au revoir les enfants est exposé au Musée de la résistance à Vassieux-en-Vercors. Peint en 2013 pour faire contrepoint à l'actualité du pire oublié le lendemain. Il s'agissait alors du fait que des policiers soient rentrés dans des classes de maternelles pour en extraire les enfants de "sans-papiers". Deux textes ont été écrits à l'époque. Celui-ci est un état des lieux.

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L’AVENIR DE L’AU REVOIR*

Il y a onze ans que j’ai peint ce tableau. Onze années pour qu’il arrive ici, dans le Musée de la Résistance de Vassieux-en-Vercors. Onze années pour qu’aujourd’hui vous puissiez le voir. A cette place. À sa place. Non pas que ce soit ici sa place définitive, mais que sa place soit, ici comme ailleurs, d’être accessible au regard de celles et de ceux qui le supporteront.

Un ici comme ailleurs livré à l’engagement et au courage de celles et de ceux qui l’accueilleront.

***

Illustration 1
Au revoir les enfants © Jean-Thibaut Fouletier

Nous sommes aujourd’hui en 2024. À reparcourir la lettre adressée aux enfants (que nous fûmes) et la lettre adressée aux parents (et aux autres), lettres écrites en 2013, ce qui me frappe c’est combien le statut des quelques personnages** extraits de l’actualité d’alors a changé. Et combien au final leurs destinées se confondent puisque, quels qu’aient été leurs discours et leurs actes, ils ont été inexorablement rattrapés puis effacés par la vanité de ce qui les aura en leur temps animés.

Effacés par leur propre inanité donc, mais plus encore dépassés par celle de ceux qui depuis, dans la mise en œuvre de nouvelles abjections politiques ou terroristes, les auront remplacés dans le temps. En pire. Tous suivent ce circuit court qui, de la lumière illusionnelle des certitudes du présent à la profondeur éternelle des oubliettes qui les absorberont, se révèle n’être qu’un court-circuit.

Un court-circuit qui se renouvelle sans cesse, indéfectiblement, prenant corps à travers les corps et les esprits qu’il mâchure. Insatiable glouton de papier il se donne à terme pour ce qu’il est. À savoir, une source nourricière qui alimente quotidiennement le fantôme anorexique de valeurs évidées.

Je parle là bien entendu des trois couleurs du drapeau français rendues étiques - sans h - et délavées par les effets dénaturants de ce mouvement entropique.

Il n’est pas sûr que la culture de celles et de ceux qui participent activement à ce festin cannibale leur permette de saisir les enjeux du régime qu’ils suivent ainsi. En réalité il est bien certain qu’elle ne le leur permet pas.

En effet, parlant de régime, qu’il soit culinaire ou politique, il s’agit en tous cas de disposer d’une carte. Les alternatives que propose celle-ci doivent alors se résoudre en un choix. La consistance faisant le lest de ce choix dépend entre autres de la perception que chacun peut avoir de l’alternative proposée. Le fait est que celle-ci n’est désormais plus repérable.

Je la rappelle alors en termes surannés, oui, entre aliénation et altérité, l’alternative est irréductible. Et de là, le choix incontournable. Sauf à avoir des yeux pour ne pas voir et des oreilles pour ne pas entendre (La Bible Jérémie 5.21). Soit dit en passant, c’est d’ailleurs ce sur quoi, guidés par l’expérience, nous pouvons désormais accoter la culture dite plus haut.

Le choix contemporain, que nous supportons, est celui d’une aliénation qui se définit de siphonner le moindre accès à l’altérité. Un Pas d’altérité étayé d’un Pas d’alternative justifiant le Pas de choix. Oui, ici l’aliénation se soutient de faire le choix que de choix il n’y en a pas...

Contrairement à cette rebuffade coupable, le choix de l’altérité est autrement plus radical puisqu’il est, lui, un engagement, qui ouvre l’accès - fin du court-circuit - à l’Autre-insu que nous sommes à nous-même (sans « s »!).

C’est là la source sans fin de recherches et de découvertes, condition de l’ouverture à transmettre en héritage afin que Au revoir les enfants puisse soutenir la note claire de l’accueil.

Bon jour les enfants.. À toute heure.

* Les deux autres textes et le tableau sont à découvrir sur le site tybolt.fr, à la rubrique Tableaux. Dans la même veine, voire le tableau "Les bourgeois de Calais".

** Nicolas Sarkozy et Mohamed Merah.

JTF

Die, mars 2024

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