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Billet de blog 17 novembre 2011

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L'explication (la VRAIE !) de l'explosion des dettes ''souveraines'' (2)

Jean TRAMUSET

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Préambule

Entre 2001 et 2008, passant de 3 435,88 à 8 579,28 milliards de $, la dette extérieure du Royaume Uni (RU) s'est accrue de 5 143,40 milliards de $ (source : IMF eLibrary Data et IMF : Balance of Payments Yearbooks). Pendant la même période, le déficit cumulé de la balance des comptes courants du RU a été de 387,12 milliards de $, tandis que l'accroissement de ses réserves a été de 15,68 milliards de $.

L'accroissement justifié de la dette extérieure du RU dans la période considérée est donc égal à 387,12 + 15,68 = 402,80 milliards de $. En résulte que la différence entre l'augmentation effective de la dette et ce dernier montant (différence égale à 5 143,40 - 402,80 = 4 740,06 milliards de $) mesure l'ordre de grandeur du surendettement subi par le Royaume Uni au cours de cette période.

Quelle est la cause de cet énorme écart ? On l'aura compris, c'est à l'explication de cette question que mon billet d'aujourd'hui prétend contribuer.

Ne parlons donc plus des intérêts des emprunts internationaux (cf. L'explication (la VRAIE !) de l'explosion des dettes ''souveraines'' (1)) ; parlons uniquement des emprunts internationaux.

Revenons au pays A dont, ‘'là'', ce qu'on va supposer est qu'il emprunte 100 au pays R (100 en monnaie de R). Ce qu'alors on va dire est que, en monnaie de R, son endettement sur R ‘'est de 100''.

Sauf que voilà... (et sauf qu'à partir d'ici, vraiment navré mais... ‘va falloir que vous vous ‘'accrochiez'' -attention, je ne suis pas en train de jouer au ‘'plus malin'' ; non ! ce que je suis en train de dire est que j'ai beaucoup lu les bons auteurs -je veux dire ceux qui, face aux crises, sont restés et restent lucides, et non pas... ‘'atterrés''- et que, je vous demande de le croire, j'ai beaucoup travaillé).

Mais commençons par le commencement : commençons par la monnaie internationale.

1° De la monnaie
internationale (la vraie !)

La chose est sûre, s'il est quelque chose dont le monde souffre vraiment, c'est de n'avoir pas LA (véritable) monnaie internationale dont la mondialisation a besoin (attention, quand je dis ‘'la mondialisation'', je parle bien entendu de la vraie, pas de celle que -tellement mesquinement, et tellement ‘'irresponsablement''- conçoivent les grands pays prédateurs : aujourd'hui, les Etats-Unis et l'‘'Europe'' ; demain, en agissant alors exactement comme les deux premiers ont agi, agissent et continueront imperturbablement d'agir : la Chine).

Ce que c'est que LA (véritable) monnaie internationale (dont, espérons-le pour lui, le monde saura un jour se doter) ?

Eh bien (impossible évidemment d'en construire ici pas à pas le ‘'modèle''), c'est LA monnaie qui ne doit circuler que dans l'espace ‘'inter-'' national des pays (étant par ailleurs entendu que, 1° ces pays auront conservé ‘'en interne'' leur monnaie nationale ; que, 2° ceci par le biais de leur change fixe avec LA monnaie internationale -ce qui ne veut pas dire leur change non révisable !- toutes les monnaies nationales seront, les unes vis-à-vis des autres, prises dans un système de changes fixes -ce qui à nouveau ne veut pas dire non révisable !), et qui, techniquement c'est-à-dire ‘'comptablement'' sera gérée par une banque ‘'internationale'' (dans la suite ‘'la'' BI), à proprement parler, une banque ‘'supranationale'', cela au sens très précis où la fonction de cette banque ne sera que celle-là : la gestion des relations entre les pays, ces relations ne provenant que de la seule (nécessaire) utilisation de LA monnaie internationale entre ces pays (pas question donc que, sous quelque prétexte que ce soit -par exemple, ‘'la construction européenne'' !...- elle puisse intervenir dans les affaires intérieures des pays ! -ça, ça restera le privilège des citoyens des pays).

Concrètement ?

Eh bien,

1° ceci sous les hypothèses supplémentaires suivantes :

-la monnaie internationale étant, disons le Mi,

-la monnaie de A étant la £, celle de R étant le $,

-1 Mi = 1 £ = 1 $ (à cet égard, ne compliquons pas inutilement les choses !), étant entendu par ailleurs que la détermination de ces taux de change est un préalable dont la ‘'résolution'' ne peut ici qu'être évoquée : ne pouvant à l'origine que renvoyer à ce qui existait (c'est-à-dire à des taux dits, jusqu'à cette origine, par les marchés) pour tout temps postérieur à cette origine, c'est à jamais que cette détermination ne sera plus du ressort des marchés),

2° ceci permettant maintenant de revenir à l'emprunt par A à R de 100 (100 en monnaie de R), voyons donc concrètement, par quoi, sous couvert d'une monnaie internationale qui en soit vraiment une, un tel emprunt se traduira.

2° Emprunter en (vraie) monnaie
internationale

Ce qu'il faut absolument ‘'comprendre'' est que, nécessairement, c'est par la BI que cet emprunt sera ‘'payé''.

Pourquoi ?

Eh bien parce que (cf. 1° la ‘'définition'' de la monnaie internationale donnée plus haut -encore une fois c'est LA monnaie des relations économiques entre les pays ; et cf. 2° la caractérisation de la Banque Internationale -encore une fois, c'est LA banque de LA monnaie
internationale), un emprunt du pays A auprès du pays R étant une opération ‘'inter-‘' nationale (entre le pays A et le pays R), ce qui aurait été totalement incohérent est que cette opération ait été payée par R (ne parlons pas de la ‘'solution'' -ici carrément absurde !- où cette opération aurait été ‘'payée‘'... par A !). Etant bien entendu qu'ici, par-delà ces raisons ‘'de forme'', ce qu'il est cette fois ‘'sur le fond'', parfaitement possible de comprendre, c'est pourquoi, R prêtant 100 en sa monnaie à A, ce qui est impossible (impossible !) est que, dans cette opération, R échangeant avec A un capital de 100 contre une reconnaissance de dette de 100, il puisse en outre se voir (ou être vu) comme le ‘'payeur'' de cette opération.

N'est-ce pas, A et R échangeant (ECHANGEANT !) A et R apportant donc chacun quelque chose à leur échange, ces (deux) ‘'quelque
chose'' faisant précisément que, par l'un ET par l'autre, cet échange se trouve également payé, oui ou non (oui ou non !) n'aurait-il pas été totalement abusif qu'à propos de R, ce qui eût pu être dit fût qu'au motif que, des deux échangistes, il était celui qui prête, alors, R
était plus (PLUS !) qu'un échangiste, savoir... un ‘'payeur'' (!!!!) ?

D'où cette vérité :

-le monde étant doté d'une vraie monnaie internationale (la Mi), cette monnaie étant gérée (émise, reprise, comptabilisée) pour le compte des pays par une Banque Internationale (BI), R prêtant 100 (en sa monnaie, c'est-à-dire en $ ; étant entendu que 1 $ = 1 Mi) à A (dont la
monnaie est la £ ; étant cette fois entendu que 1 £ = 1 Mi ; et donc que 1 $ = 1 £), ce prêt s'analysant comme ce que R donne en échange à A contre la remise par A à R d'une reconnaissance de dette d'une valeur de 100 $,

-alors la ‘'comptabilité'' de cette opération (l'échange entre les pays A et R d'un prêt de 100 Mi = 100 $ = 100 £ contre une reconnaissance de dette de la même valeur) sera conforme au ‘'schéma'' (simplifié !) suivant (ces trois opérations -et les trois ‘'écritures'' qui en rendent compte- étant simultanées) :

1ère écriture : pour 100 Mi (= 100 $ = 100 £) : crédit du pays A par le débit du compte de A dans les livres de BI ; pour BI, ce sera donc une créance de 100 Mi sur A ;

2ème écriture : pour 100 Mi (= 100 $ = 100 £) : débit du pays A par le crédit du pays R,

3ème écriture : pour 100 Mi (= 100 $ = 100 £) : débit du pays R par le crédit du compte de R dans les livres de BI ; pour BI, ce sera donc une dette de 100 Mi sur R.

Et d'où ces deux ‘'résultats'' :

1° au niveau de BI : une créance de 100 Mi (sur A) à son crédit, une dette de 100 Mi (sur R) à son débit ; son bilan sera donc (‘'automatiquement'') parfaitement équilibré ;

2° au niveau de A et de R : une dette de 100 Mi sur BI du côté de A, une créance de 100 Mi sur BI du côté de R ; et donc (ceci par l'intermédiaire de BI)... une dette de 100 Mi (= 100 $ = 100 £) de A sur R, étant entendu que, pour sortir de son endettement de 100 Mi sur R consigné dans les livres de BI (la banques des relations ‘'inter-‘' nationales), A, vis-à-vis de R, devra agir de telle manière que, vis-à-vis de lui, R se retrouve dans la position où, cette fois, ce sera lui (R) qui empruntera à A (pour un montant de 100 £ = 100 Mi = 100 $).

Sauf qu'aujourd'hui (très, très -très !- loin s'en faut, voyez par exemple la manière dont la zone euro ‘'fonctionne''-!!!!) le monde ne vit pas sous le régime de LA (vraie) monnaie internationale. Le système fonctionnant sans BI, de fait alors, c'est... le pays prêteur qui joue son
rôle (celui de la BI).

Ainsi, R prêtant 100 $ à A, et ces 100 $ qu'il a prêtés lui revenant instantanément (ceci pour fermer le ‘'cercle'' de la comptabilisation de l'échange conclu entre A et R -voyez supra), ce qui ne souffre pas la moindre contestation est que les 3 (trois) ‘'écritures'' de cette comptabilisation se trouvent réduites à 2 (deux) :

1ère écriture : pour 100 $ (= 100 £) : crédit du pays A par le débit du pays R ;

2ème écriture : pour 100 $ (= 100 £) : débit du pays A par le crédit du pays R (‘'point/barre'' !).

Aussitôt, et ceci en dépit des apparences (comme dans le schéma avec BI, en effet, les apparences disent que R gagne ce qu'il perd), en réalité, ceci du fait de l'absence de BI, R va gagner (ceci au sens de ‘'faire l'économie de'') ‘'la 3ème écriture'' du schéma avec BI, savoir l'écriture de son débit (de son débit !) par le crédit de son compte dans les livres de la BI.

D'où (imparable !) la conclusion selon laquelle, R prêtant 100 à A sans BI, aussitôt, dans l'opération même de ce prêt, R gagne 100 (100 qu'évidemment -il n'est pas d'autre solution possible !) il gagne sur A (sur qui d'autre pourrait-il bien le faire ?).

C'est là où ce que l'on va dire c'est : ‘'quoi, A empruntant 100 à R, l'endettement de A vis-à-vis de R sera de... 200 ! Mais vous voulez rire !''

Sauf qu'une fois de plus, si le réel était vraiment tel qu'il semble être, certes, l'humanité n'en serait pas là où elle est, c'est-à-dire...‘'dans le mur'' !

Comment peut-on dire que A étant endetté de 100 vis-à-vis de R, en réalité, son endettement est de 200 ? Cela, eh bien c'est ce que dit le ‘'résumé'' qui suit.

3° Résumé

‘'- Pourquoi y a-t-il double endettement ?''

La bonne réponse est : ‘'parce que, quand il y a <<endettement>>, ce qui est dit est qu' il y a... <<endettement>>'' !!!!

Ceci n'est qu'une (inadmissible) plaisanterie ?

Or si ce que l'on ‘'comprend'' c'est que, là où tout le monde ‘'voit'' de l'endettement, en fait... il n'y a pas d'endettement ! ; ceci (petit rappel de ce qui précède)

1° parce que, quand un pays A emprunte au pays R, ce qu'il y a en réalité entre eux, c'est un échange (un ECHANGE !) : un prêt de R à A contre une reconnaissance de dette de A à R ; et ceci

2° parce que, s'agissant du ‘'financement'' d'un échange (c'est-à-dire de la contribution de l'un et l'autre des échangistes à cet échange), la vérité INCONTESTABLE est évidemment que cet échange, l'un et l'autre (l'un ET l'autre !), le financent A EGALITE !

Dès lors, si l'on dit qu'à la suite de cet échange, il y a... ‘'endettement'' (!), ce que l'on fait implicitement, c'est cautionner l'idée fausse (archi-fausse !) qu'un prêt international, c'est ‘'quelque chose'' qui se trouve financé par le seul pays prêteur (alors qu'en réalité -et encore une fois- un prêt étant un échange -un échange !- entre un pays prêteur et un pays emprunteur, ce prêt, c'est à égalité que, par l'un et par l'autre, il se trouve financé).

Sauf que, quand il est dit qu'un prêt entre deux pays est financé par le seul pays prêteur, ce qui est dit en même temps est que son remboursement incombera au seul pays emprunteur ! Or que veut dire que le remboursement du prêt souscrit par le pays A auprès du pays R incombera au seul pays A ? Eh bien que quand il remboursera son emprunt à R, A devra aussi rembourser la contribution de R a la mise en place de ce prêt.

Bref, cela voudra dire que le pays A ayant emprunté 100 au pays R, en réalité, c'est bien à hauteur de 200 qu'il sera endetté vis-à-vis de lui !

Maintenant, quant à ce qu'il conviendrait de faire pour mettre un terme à l'explosion des dettes souveraines, ce qui ici est parfaitement clair est qu'AUCUNE des politiques en ce moment concoctées à cet effet par TOUS les ‘'responsables'' (qu'ils soient bleus, rouges, verts, bleus-blancs-rouges, noirs...) n'est adaptée. Le qualificatif qu'alors TOUTES ces politiques (et ceux qui les conçoivent !) méritent ?
La chose ne fait aucun doute, ce qualificatif, c'est celui de ‘'PATHETIQUES''.

Jean Tramuset

PS @ Belange,

En tout cas, cher Belange (vous l'aurez noté, c'est par là que mon billet d'aujourd'hui commence), désormais, vous savez l'essentiel de ce qu'il faut savoir sur le fonctionnement de la monnaie internationale. Vous me direz qu'il manque encore la détermination du change (entre
les monnaies nationales et la monnaie internationale) ? Or si l'on dit que, périodiquement, la comptabilisation (en monnaie internationale) de tous les ‘'crédits'' et ‘'débits'' (dont ceux du fait des intérêts perçus et payés) de tout pays permettra de conclure à la pertinence (ou au contraire à la non pertinence) du change de toutes les monnaies nationales avec la monnaie internationale (et donc à la nécessité de le laisser en l'état ou de le modifier -selon un calendrier arrêté d'avance) ?

Sauf à ce que vous me prouviez en quoi tel n'est pas le cas, à compter d'aujourd'hui, je me considère donc comme quitte de la promesse (solennelle) que je vous avais faite de vous ‘'expliquer'' les ‘'principes'' de la monnaie internationale (pour les ‘'détails'', voyez mon essai :‘'Le marché imaginaire'').

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