Chère Martine Orange,
Bien entendu, je me réfère à votre article abondamment ‘'commenté'' et chaudement ‘'recommandé'' où vous expliquez ‘'comment la zone euro s'est retrouvée face à l'abîme''.
Sauf que pour moi, cet article est loin d'être ‘'clair''(ainsi que le jugent beaucoup de vos commentateurs).
Ainsi,
1° quand vous dites que, vu son statut (celui-ci découlant évidemment directement de la façon dont l'€ a été conçu, savoir comme la monnaie unique d'un espace politiquement non intégré -en effet, ‘'‘fallait le faire !'') la BCE, en réalité, ne pouvait qu'être sans pouvoir (‘'sans bras'').
Mais alors comment expliquez-vous que, quasiment ‘'depuis le début'' (et en tout cas dès l'arrivée de Trichet) pendant de longues années, la BCE s'est sans cesse trouvée en butte à d'incessantes critiques en raison de l'arbitraire (l'ARBITRAIRE !) de sa politique en matière de taux (tout le monde expliquant que si les taux sur l'euro n'avaient pas été ceux que la BCE avait maintenus contre vents et marées, ‘'sans aucun doute'', la croissance en Europe n'aurait pas été ce qu'elle a été) ?
Sachant que, sur ce point, ça n'est pas tout. Vous laissez entendre que si la BCE avait eu les pouvoirs qui sont normalement ceux de toute banque centrale, alors, elle aurait eu la possibilité de s'opposer à tout ce que, depuis l'automne 2008 (comme si, ''avant'' cette date, la ‘'finance'' avait été irréprochable !) avec une belle unanimité, tous les commentateurs dénoncent comme les ‘'dérives'' des financiers. Mais soit, le cas des Etats-Unis : la FED de Greenspan ne jouissait-elle pas de tous les pouvoirs d'une véritable banque centrale ? Or ce que l'on DOIT dire n'est-il pas ceci : que s'il est un pays dont on DOIT dire qu'il est à l'origine de la Crise, ce pays... c'est bien les Etats-Unis !
2° quand vous dites que ce dont nous souffrons aujourd'hui, c'est du ‘'dogme'' de ‘'la préférence des intérêts privés (comprendre ceux des banques) au détriment de l'intérêt général (comprendre celui de l'économie)''.
Mais comment croire que les banques (et les SALARIES des banques ! -sur le ‘'sujet'', voyez par exemple la ‘'lettre ouverte à la direction de la BNP et à ses actionnaires'' de J. Bachèlerie qui, il ya quelques jours, a fait la ‘'une'' de Médiapart) n'ont pas souffert de ce qui s'est passé hier et ne vont pas souffrir de ce qui se passe aujourd'hui et de ce qui se passera demain ?
Chère Martine Orange, tout ce que cela veut dire est qu'à mon sens, votre analyse est beaucoup trop... dogmatique pour être pertinente (et donc permettre de concevoir la nécessaire alternative au ‘'système'' -un authentique ‘'n'importe quoi'' !- qui aujourd'hui dysfonctionne).
Quoi ! (une fois encore) tout le mal viendrait du fait qu'aujourd'hui, ce qui se trouve privilégié, c'est l'intérêt des banques (contre celui de l'économie) ? Mais... et les contradictions (‘'structurelles'' comme le disait Marx) du capitalisme (dont les crises ‘'financières'' ne sont évidemment que le révélateur) ? ; par exemple celle ‘'fonctionnelle'' de la ‘'guerre économique'' que se livrent les capitalistes ENTRE EUX pour la captation de la plus grosse part des profits produits par eux à l'échelle de la planète ; d'où cette fois, dans toutes les entreprises de la planète, la guerre des capitalistes CONTRE les salariés (ceci pour faire que, sur le marché mondial, les coûts de production des marchandises proposées à la vente soient les plus bas et donc les plus compétitifs) ; d'où... la ‘'construction'' européenne (celle-ci -non sans à son tour générer d'autres... ‘'contradictions'' !- ayant pour objet d'avantager les capitalistes européens dans leur combat contre leurs homologues américains, asiatiques, et africains).
Sauf que, logiquement, avant toutes les contradictions ‘'fonctionnelles'' du capitalisme, il y a sa contradiction ‘'SYSTEMIQUE'' : pour qu'il y ait partage d'un profit, d'abord il faut qu'un produit (en effet, quelque chose qui sera partagé entre des salaires et des profits) ait été... formé.
Bien entendu, s'agissant du capitalisme arrivé à maturité, cette ‘'contradiction'' est (voyez en particulier Keynes) celle de la limitation ‘'systémique'' de l'emploi ; pour moi, c'est LA contradiction à laquelle aujourd'hui, de proche en proche, TOUS les problèmes du capitalisme renvoient ; en particulier l'inextinguible crise ‘'financière'' dans laquelle le monde se débat depuis l'automne 2008 et dont, vous, Martine Orange, vous voyez fautivement l'origine dans ‘'le privilège des banques''.
Reste ici à remonter la ‘'logique'' qui, dans le capitalisme ‘'d'aujourd'hui'', a conduit du sous-emploi à la crise financière.
Rassurez-vous chère Martine Orange, c'est ici que je cesse de vous importuner avec ma prose. A moins que ce que vous souhaitiez soit d'en savoir plus. Alors pourrez-vous allez voir du côté de l'''Edition'' que je viens de lancer : ‘'Ressourcer la révolution'' (à la date d'aujourd'hui, 3 articles sur les 6 programmés).
Bonne lecture !
Jean Tramuset