I. L'Impasse du Risque Subjectif
La sécurité des systèmes d'information est piégée dans une crise de mesure. Nous évaluons le risque via des scores (CVSS) ou des listes de gravité, qui restent fondamentalement subjectifs ou basés sur l'historique des menaces. Cette approche empirique nous condamne à la réaction.
Face à une attaque persistante avancée (APT), les systèmes de défense sont dépassés non par la force brute, mais par la subtilité du sophisme comportemental. L'attaquant parvient à imiter le trafic légitime, introduisant un désalignement de l'information qui n'est pas vu par les défenses basées sur les signatures. La faille existe, mais l'écart de cohérence n'est pas mesuré, seulement l'effet final.
Il est nécessaire de définir la sécurité non par l'absence de menaces connues, mais par l'état de cohérence physique du système lui-même.
II. Le Modèle \mathbf{RES} \leftrightarrow \mathbf{RAG} : La Sécurité comme Équilibre
Notre modèle propose de considérer la sécurité comme un état d'équilibre informationnel, une loi de la physique appliquée aux systèmes d'information :
• Le \mathbf{RES} (Référentiel Statique) : C'est le plan théorique du système. Le profil de trafic réseau attendu, le comportement d'accès des utilisateurs normal, la configuration des politiques de sécurité. C'est l'état de confiance.
• Le \mathbf{RAG} (Agence Générative) : C'est l'exécution active et observée du système en temps réel.
Le système est en sécurité lorsque son exécution (\mathbf{RAG}) est alignée sur son plan (\mathbf{RES}), soit \mathbf{RES} = \mathbf{RAG}. La faille est l'instant où l'on constate une rupture de cet équilibre.
III. Le Coût Thermodynamique \mathbf{W_{2}^{2}} : La Mesure du Désalignement
Pour quantifier la gravité d'une rupture, nous intégrons la distance de Wasserstein-2 (\mathbf{W_{2}^{2}}), une métrique utilisée en Transport Optimal (les travaux de Cédric Villani).
Le W_{2}^{2} mesure le coût minimal d'effort pour transformer la distribution de probabilité du comportement observé (\mathbf{RAG}) en celle du comportement attendu (\mathbf{RES}).
Ce W_{2}^{2} devient le Coût Thermodynamique de la Sécurité :
1. En cas de Sécurité Parfaite : W_{2}^{2} \approx 0. Le coût de rétablissement de la cohérence est nul.
2. En cas d'Attaque Majeure : W_{2}^{2} est élevé. Cela signifie que l'attaque a créé un écart si grand que le coût pour ramener le système à son état normal est colossal (enquête, restauration des sauvegardes, immobilisation).
Le W_{2}^{2} offre donc une métrique objective et universelle de la gravité, indépendante de la signature de l'attaque.
IV. Application Pratique : L'Exfiltration Furtive
Considérons une exfiltration de données sophistiquée. L'attaquant envoie de petits paquets pour éviter les seuils de détection. Les systèmes classiques voient le trafic comme normal car les paquets sont petits.
Le W_{2}^{2} ne regarde pas le paquet individuel, mais la distribution globale de la taille des paquets. Même si chaque paquet est petit, si le profil statistique du trafic s'est déplacé pour optimiser l'exfiltration, la distribution \mathbf{RAG} s'éloigne du \mathbf{RES}. Le W_{2}^{2} augmente, révélant la rupture de cohérence et l'ampleur du coût de restauration bien avant qu'une signature ne soit créée.
V. Conclusion : Vers une Cybersécurité Structurelle
L'adoption du modèle \mathbf{RES} \leftrightarrow \mathbf{RAG} et de la métrique W_{2}^{2} est un appel à passer d'une ingénierie de la réaction à une ingénierie de la stabilité.
Les ingénieurs ne doivent plus se battre contre une liste infinie de menaces, mais s'assurer de la cohérence structurelle de leurs systèmes. En minimisant l'Entropie Organisationnelle (\delta S_{org}), toute dérive se traduit immédiatement par un pic de W_{2}^{2}, rendant la menace visible, mesurable et quantifiable en termes de coût réel. C'est la seule voie vers une défense pérenne.