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Billet de blog 10 septembre 2013

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Décentralisation : tranchons enfin dans le vif du millefeuille !

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Entre sentences parisiennes, débats provinciaux et réflexes corporatistes, le débat sur la réforme des collectivités locales va proposer un sentiment de lassitude ; et ce à quelques mois du scrutin municipal. Après avoir entendu les Présidents de la République – Nicolas Sarkozy en son temps et François Hollande juste avant le scrutin de 2012 – afficher leur volontarisme en la matière, il nous faudrait encore attendre la fin de la session parlementaire d’automne pour connaître non pas le dénouement mais seulement la fin du premier des trois textes sur la décentralisation annoncés. Excusez de la confusion… (cf. Décentralisation 2013 - Vivre et laisser mourir)

Forts d’un nombre de pages plus que respectable, les projets actuels sèment la confusion dans les territoires. Même si depuis plus de dix ans, les rapports se sont multipliés. Citons en effet le rapport « Refonder l’action publique locale », rendu en 2000 par la Commission pour l’Avenir de la Décentralisation (présidée par Pierre Mauroy), le rapport « Fiscalité et finances publiques locales : à la recherche d’une nouvelle donne », présenté en 2006 au Conseil Economique, Social et environnemental par Philippe Valletoux, le rapport « Les relations entre l’Etat et les collectivités locales » rendu en décembre 2007 par Alain Lambert dans le cadre de la Révision générale des politiques publiques. Au début du mandat de Nicolas Sarkozy, la publicité tapageuse qui a entouré la parution du rapport « 300 décisions pour changer la France », de la Commission pour la libération de la croissance française présidée par Jacques Attali (en janvier), est retombée dans l’oubli. (cf. Réforme des Collectivités Locales)

Car le diagnostic est partagé par tous : il faut remédier à l’enchevêtrement des compétences et à la généralisation des financements croisés, qui ont des conséquences lourdes en termes de complexité, de coût et au final d’illisibilité du système institutionnel pour les citoyens. En un mot : clarifier, simplifier, économiser. Mais ne peut-on pas envisager quelques propositions simples pour trancher dans le vif de l’épais millefeuille territorial, tant décrié ? Tel Gaston Defferre en 1982, s’inspirant de son expérience de ministre de la décolonisation pour imposer sa vision claire et déterminée de la décentralisation, il est temps de se jeter à l’eau, en formulant trois propositions simples qui embrassent l’ensemble des enjeux actuels.

  • Supprimons la fiscalité locale

On a tant vilipendé la fiscalité locale depuis trente ans : lourde, injuste,  sujette à un nombre incalculable de dégrèvements et d’exonérations. Rappelons que la moitié des foyers fiscaux ne paient pas la taxe d’habitation ! Répartissons, à la place, des recettes de fiscalité indirecte, moins douloureuse car prélevée à la source, sur des bases larges et à faible taux. L’Etat, qui se fait fort de promouvoir la fiscalité écologique, devrait abandonner sa fraction de la Taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) au profit des départements et des régions, auxquels il a transféré l’essentiel du réseau routier, et qui financent les transports de voyageurs urbains, interurbains et régionaux. Et on peut imaginer que les collectivités locales perçoivent une fraction de la TVA, pour solde de tout compte avec l’Etat qui, à travers ses dotations est devenu le premier contribuable local ! On mettra fin, à cette occasion, à l’hypocrisie qui consiste à rendre plus rigide chaque année l’encadrement des dotations de l’Etat au travers de l’enveloppe normée, sans visibilité de long terme. Cf  Institut Montaigne - Taxe professionnelle et finances locales)

  • Limitons strictement les cofinancements

Il est inutile de revenir ou de supprimer la « clause générale de compétences » : on limiterait alors la capacité des collectivités locales à innover et à expérimenter sur leur territoire, à l’heure où les administrés se montrent toujours plus exigeants en termes de sécurité, d’accessibilité et de qualité. Pour clarifier le système et remédier à l’enchevêtrement actuel, il suffit de limiter le nombre de financeurs d’un projet à deux, voire trois, et encore en comptant l’Union européenne. On anéantit ainsi mathématiquement toute logique de guichet.

  • Inspirons-nous de l’Outre-Mer pour configurer départements et régions

Le jardin « à la française » n’a plus lieu d’être. Ce ne sera pas faire injure aux principe d’unité et d’indivisibilité de la République. Il suffit pour s’en convaincre de se pencher sur les possibilités institutionnelles laissées aux territoires ultramarins, pour passer du statut de département et région d’Outre-Mer (DOM-ROM) à celui de « collectivité territoriale d’Outre-Mer » (COM) – et inversement – de sorte à fusionner conseil général et conseil régional en une assemblée unique. La démocratie locale en sortirait renforcée, grâce à la prise en compte de la volonté des habitants lors de référendums locaux. On en oubliera vite de se quereller à propos des numéros figurant sur les plaques d’immatriculation !

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