Nettoyer l'Assemblée Nationale au karcher, voilà la solution que je propose... Je suis tout-à-fait conscient qu'elle ne peut pas convenir à tout le monde, raison pour laquelle j'ai laissé à d'autres la profession politique. La profession politique, c'est à cela que je veux consacrer ce billet. Il n'est, en réalité, qu'une prolongation du très intéressant débat qui a accompagné l'article de Fabrice Arfi, en date du 20 avril, intitulé "Comment les députés oublient la loi pour leurs collaborateurs". Je ne veux pas le prolonger indéfiniment ni me répandre dans ce qui paraîtra à d'autres des imprécations; aussi je résumerai ci-dessous les trois réactions que j'y ai publiées", mais auparavant, je veux les compléter par quelques indications.
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D'abord, je veux dire combien je m'étonne d'autres réactions de plusieurs lecteurs. Comment peuvent-ils continuer à considérer que l'affaire se limite à telle décision d'un conseil de prudhomme (même s'il y a eu appel, cassation, retour à l'appel). Il y a des milliers de cas semblables par semaine, en France. Pourquoi serait-ce passionnant, du seul fait que l'affaire impliquerait Ségolène Royale ? Comment et pourquoi tant de gens se refusent-ils à voir que ce qui est en cause c'est un système qui s'est constitué au fil du temps et qui aboutit à ce que la représentation parlementaire devienne un métier ?
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Ce n'est pas en soi l'horreur pure. L'une des bases de la vie en société est la spécialisation professionnelle et je ne doute pas un instant qu'il n'y ait des professionnels honnêtes dans toutes les corporations. Pourquoi pas en politique ?
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Ce que je voudrais qu'un jour un esprit éclairé m'explique, c'est comment la professionnalisation de la vie politique peut être compatible avec la démocratie dont les deux principes de base sont l'élisibilité de chaque individu et la représentativité du corps des élus. Se professionnalisant, les élus deviennent une caste, le principe de la caste étant, justement, l'inamovibilité. Les élections ne sont là que pour créer l'illusion du renouvellement. Le cumul des mandats n'a probablement pas pour fonction principale le cumul des rémunérations (il y a, d'ailleurs, un plafond à ce cumul). Le cumul des mandats a pour fonction d'éviter, autant que possible, le retour à la condition du citoyen ordinaire. En cas d'échec à une élection, le représentant battu se rabat sur son autre fonction (très souvent conseiller général, ou conseiller régional) et fourbit ses armes pour la prochaine élection.
Tout débat sur le cumul des mandats est lui-même illusoire si, d'entrée, on ne distingue pas le cumul en quantité et le cumul en durée ; pour ce qui est de la fonction de député, la lutte contre le cumul impliquerait de ne pas remplir plus de deux mandats consécutifs, ce qui n'interdirait pas le retour après interruption.
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C'est donc contre la professionnalisation de la fonction représentative que je suis, parce que, justement, elle me semble incompatible avec la représentativité. Je connais, évidemment, l'argument de la compétence, et tout ce qui s'ensuit. Si l'on prend en compte un tel type d'argument, alors, il faut dire que la fonction de député est une profession et faire les lois en conséquence. Nous n'élisons pas nos médecins, nos avocats, nos enseignants, nos boulangers et nos bouchers. Mais ceux-ci ne tiennent pas non plus leur boutique au nom de la démocratie et ne prétendent pas représenter le peuple.
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Je me réjouis, en tous cas, du débat autour de cet article; j'espère que sous une forme ou sous une autre il continuera et qu'il y en aura d'autres; déjà ce 21 avril, l'article de Bastien François, prof de sciences politiques, sur les "fourberies constitutionnelles" de Sarko est bien intéressant également. (Sauf que j'aimerais bien être sûr que Sarko est plus fourbe que les autres, ou les autres plus clairs que lui).
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L'affaire des salariées de Ségo m'a amené à découvrir le site des attachés parlementaires :
http://www.uscpunsa.org/
qui fourmille de renseignements; on y trouve, entre autres, un article sur le livre de Guillaume Courty, "Les groupes d'intérêt", ainsi qu'un lien sur le blog Vincent Nouzille et Hélène Constanty, notamment auteurs de : "Députés sous influence"
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Ces deux journalistes se sont livrés à l'Assemblée Nationale, - il fallait y penser - au jeu des sept familles: des plus influents au plus influençables, tout , tout, tout vous saurez tout sur ce que nos députés ne trouvent pas démocratique que vous sachiez.
jean-paul yves le goff
http://www.lelivrelibre.net
Ci-dessous le résumé de mes trois réactions à l'article de Fabrice Arfi du 20 avril 2008 "Comment les députés oublient la loi pour leurs collaborateurs"
I -- 13 h33 :
C'est tout le métier d'assistant parlementaire qu'il faut examiner de près. Fabrice Arfi note justement que le salaire moyen d'un assistant est de 1.950 €; et que le crédit collaborateurs de chaque député est d'environ 9.000 €.
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Je crois savoir que rien n'oblige le député à dépenser la totalité de cette somme et j'aimerais savoir à quoi est affecté le solde du crédit, s'il n'est pas dépensé en salaire.
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Je sais par ailleurs que rien n'interdit au député d'embaucher comme assistant parlementaire un membre de sa famille et que nombreux sont ceux qui ne s'en privent pas.
De toutes façons, ce n'est pas seulement le métier d'assistant parlementaire qu'il faut examiner, mais avant tout celui de député.
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Plus exactement, je souhaite, pour ma part, qu'il ne s'agisse plus d'un métier et je fais même de cette condition la première d'une éventuelle (et improbable) amélioration de la démocratie.
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Non seulement, je préconise le non-cumul des mandats (effectif et non seulement verbal); mais je dis que le revenu du parlementaire élu devrait être exactement calculé sur ce qu'était le revenu professionnel du candidat à la veille de son élection. Il y aurait déjà beaucoup moins de monde à se pousser au portillon et, une fois élu, l'heureux gagnant ne considèrerait plus indispensable pour la démocratie qu'il conserve son siège trente ans.
II 15h57
En me reportant sur le lien découvert dans la rubrique "prolonger" de l'article de Fabrice Arfi, en l'occurrence, http://www.uscpunsa.org/article-17357925.html,
(titre : Scandale du détournement de l'enveloppe collaborateur. A Paris comme à Bruxelles, il faut que ça change... Maintenant !) je m'aperçois que la situation est bien pire que je ne pensais puisque, le Parlement Européen offre à chacun de ses 785 eurodéputés une allocation mensuelle de 15 496 euros utilisée de manière parfaitement discrétionnaire.
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Par conséquent, je pense qu'une information de ce type mérite le maximum de pub
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C'est pourquoi,
1) tout d'abord, j'en fais un billet, (ce sera mon second pour mediapart. Titre: Nettoyer les écuries d'Augias parlementaires)
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2)Ensuite, je fous çà sur mon blog perso, rubrique, revue de presse.
Adresse : http://jeanpaulyveslegoff.over-blog.com/article-18901066.htm... - (même titre.)
(Petit coup de pub pour Mediapart, au passage)
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3)Tertio, je balance l'info sur les deux ou trois forums divers où il arrive que je traîne (mal fréquentés, d'ailleurs.)
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III. 20h04
Le licenciement de deux salariées temporaires de Ségo n'est même pas la partie émergée de l'iceberg; c'en est l'extrême pointe.
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Le vrai problème me semble être la professionnalisation de la fonction de représentant du peuple et, évidemment, la rémunération qui lui est affectée. Laissons tomber, pour simplifier, la question du Parlement européen.
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Il y a lieu, à mon avis, de distinguer la profession d'attaché parlementaire (et sa rémunération) et la fonction de représentant du peuple, tranformée en profession et rémunérée à un niveau très élevé.
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En ce qui concerne les attachés parlementaires, faut-il considéré qu'un député a besoin de trois ou quatre attachés pendant toute la durée de son mandat, alors que, sauf erreur de ma part, l'Assemblée Nationale lui fournit déjà une aide juridico-administrative importante et que, de plus, les députés étant à 90% des maires, ce ne sont pas les aides qui leur manquent, sans parler de celles émanant des partis d'appartenance.
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Quant à la rémunération du député lui-m^me, je ne vois pas pourquoi elle doit être alignée sur celle des plus hauts fonctionnaires de l'Etat (dits "hors catégorie"). Si nos fonctionnaires "hors catégorie" sont bien payés, c'est parce qu'ils ont une compétence rare et qu'ils sont difficiles à trouver.
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Chacun a pu s'apercevoir que ce n'est pas le cas de nos députés. Les candidats ne sont pas vraiment rares et je ne vois pas pourquoi du jour où ils sont élus, leurs revenus doivent nécessairement être multipliés par 4, 5 ou 6.
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Je crains que leur compétence ne soit pas augmentée dans les mêmes proportions.
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J'attends qu'on m'explique.
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En tous cas, leur appétit, lui, augmente. Peut-on me rappeler les dernières mesures qu'ils ont votées en leur propre faveur ?