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Billet de blog 2 septembre 2025

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La gauche cul-par-dessus-tête

Les "insoumis" traitent le PS de traître, en feignant d'oublier que ce sont eux/elles (ou lui) qui l'ont sauvé du naufrage des 1,75%

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Aujourd’hui, à en croire n’importe quelle figure de la France Insoumise, les socialistes sont des « traîtres », des vendus ou quelque chose dans ce goût. Alors, oui. Après la présidence de François Hollande (et bien avant aussi, d’ailleurs), que le PS soit l’ennemi le plus retors de la gauche, c’est entendu. Personne ne discute le fait que le PS a toujours été élu à gauche et gouvernait à droite. Mitterrand appelait cela le « tournant de la rigueur » (plus de quarante ans plus tard, nous y sommes encore) ; quant à Jospin, on oublie trop souvent de signaler que son gouvernement privatisait à tout-va.
Donc, du point de vue de la gauche, « traître » est le moindre des épithètes pour le PS. Là où ça ne va pas, c’est quand LFI parle ainsi. Les « insoumis » feignent d’oublier que ce sont eux qui ont sauvé le PS.

Petit rappel : en 2022, la candidate socialiste, Anne Hidalgo, obtenait 1,75 % des suffrages. Elle avait moins de crédit que Jean Lassalle.
Alors, pourquoi intégrer ce parti moribond à l’alliance de gauche, Nupes ? Qui a décidé de ne pas l’achever ou, tout le moins, de le laisser périr ? Voilà les questions auxquelles les « insoumis » devraient d’abord répondre avant de crier à la trahison. On ne s’étonne pas du loup dans la bergerie quand on lui a ouvert la porte.

Raconter l’histoire à l’envers
Si on écoute une Raquel Garrido (une fidèle lieutenante de « JonLuk » jusqu’à une brouille et un revirement jamais expliqués aux militants, encore moins au reste de la population), l’alliance avec le PS fut une grande victoire de la gôôôche. Car, dit-elle en substance [chez David Dufresne], l’alliance a été obtenue grâce à la victoire du secteur de gauche à l’intérieur du PS, contre sa droite ne voulant rien savoir d’une telle coalition.

Il y aurait donc des personnes de gauche au PS. Dommage qu’elles ne se soient pas manifestées quand ce parti dirigeait la Présidence, le Parlement et le Sénat, sans parler des pouvoirs locaux. Si ça se trouve, il aurait pu mener une politique de gauche. Elles ont préféré se manifester quand leur parti se battait pour devancer les trotskystes (LO et NPA, respectivement 0,56 % et 0,77 %).

Surtout, ce n’est pas la question : si un secteur du PS a considéré que, pour ne pas disparaître (1,75 %, insistons), il devait rejoindre une alliance portée par une dynamique électorale, ce n’était pas lui qui décidait. Ce choix revenait à LFI (21,95%). Garrido raconte l’histoire à l’envers, ou d’un point de vue insignifiant – celui du PS.

Le plus curieux dans cette histoire est que l’un des alliés actuels de Garrido, François Ruffin, était précisément celui qui, dix ans auparavant, plaidait pour la disparition du Parti socialiste, rêvait de la fin de ce cauchemar. Aujourd’hui, s’il en devenait le candidat, personne ne s’en étonnerait.

Mélenchon, toujours au PS

Une explication du sauvetage du PS au moment de la noyade provient du comptoir, c’est-à-dire de la psychologie de comptoir. Pour Mélenchon, le PS c’est sa vie. Il n’a jamais renié Mitterrand et s’il avait eu la moindre chance d’en prendre la tête face aux autres éléphants, il eut été « l’homme de la synthèse » comme ils aiment à dire dans leur jargon de baltringues. Aussi, pour Mélenchon, quinze ans après avoir quitté son parti, le revanche était trop belle.

Mélenchon conversait avec les siens, les autres membres du PS de sa génération d’arrivistes (Fabius, Hollande, Strauss-Kahn, Royal… tous entrés au PS quand celui-ci était l’ascenseur express pour le pouvoir). Hollande a ruiné le parti, Mélenchon l’a sauvé… au détriment de la gauche.

Illustration 1

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