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Billet de blog 6 novembre 2023

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L’identité juive vers un tout autre sionisme

L'identité juive est malheureuse: sa seule unité est le génocide perpétré par l’État allemand. Si le sionisme veut représenter cette identité, alors il doit lier son pays à l'histoire du génocide. Ce pays doit être la réparation du crime. Aussi, le sionisme doit prélever son territoire dans celui de l'Allemagne actuel.

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Lorsqu’on voit « identité juive », on s’attend à quelque chose de très compliquée. Multiple, diverse, voire inventée, elle semble devoir remplir d’épais volumes de littérature érudite et talmudique.

Rien de tel chez moi. L’identité juive existe et elle est malheureuse : liée au génocide des juifs orchestré par les nazis. Vous pouvez être croyant, athée, religieux, non-religieux, agnostique, marxiste, fasciste, Argentin, New-yorkais, Israélien, Français ou ce que vous voudrez ; si vous êtes juif, la mémoire du génocide vous habite forcément. C’est même la seule unité de la judaïté depuis 1945. En tant que juif, vous pouvez être faussaire de l’histoire, à l’instar d’un Netanyahu (pour qui Hitler ne voulait pas exterminer les juifs) ou d’un Zemmour (pour qui Pétain a sauvé des juifs) mais pas un négationniste, de ce génocide du moins.

Par ailleurs, le sionisme est indissociable de la judaïté puisque son idée directrice est celle d’une nation pour les juifs. Idée de son temps et de son lieu, surgie dans une Europe des nationalismes et des nations à la fin du XIXème siècle, mais dont la réalité territoriale ne s’est concrétisée qu’après le génocide. Aussi, les nations qui votent sa reconnaissance à l’ONU en 1947, de même que beaucoup de juifs à travers le monde, ainsi que de nombreuses opinions publiques, lient le nouvel État à la récente catastrophe constituante de l’identité juive.

Dès lors, il y a une arnaque au fondement d’Israël en Palestine : un génocide perpétré en Europe par l’Allemagne nazie et ses alliés est payé par des Arabes au Moyen-Orient. On ne sort jamais d’une telle escroquerie. Soit l’État d’Israël n’a rien à voir avec le génocide, donc pas grand-chose avec l’identité juive, et alors il cesse son OPA permanente sur cette identité. Soit il a tout à voir, et alors l’État sioniste doit être territorialement situé en cohérence avec le génocide.

Le principe de justice veut donc que ce territoire soit prélevé à l’État allemand, principal responsable et organisateur du génocide. Les réparations payées dans les années 1950 et 60 par l’État ouest-allemand à l’État d’Israël en Palestine sont une plaisanterie de très mauvais goût, elles délèguent l’essentiel du prix à un peuple qui n’a strictement rien à voir avec le crime. La RFA s’en sort avec des Deutsch mark, tandis que les Palestiniens sont spoliés de leurs terres pour le crime allemand. Ça n’a pas de sens.

On ne paye pas le sang d’un peuple avec la terre d’un autre peuple. Et tout le fameux travail de mémoire de l’Allemagne, salué par « le monde entier » (occidental), ne changera rien à l’affaire.

L’identité juive est liée à son génocide. C’est malheureux mais c’est ainsi, rien d’autre nous rassemble. Si le sionisme veut représenter au moins une partie de cette identité, alors il doit lier son pays au génocide des juifs. Ce pays doit être une réparation. Celle-ci ne peut provenir que de qui a perpétué le génocide : l’État allemand.

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