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Billet de blog 29 juin 2014

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Ressusciter la gauche ? Quelle potion magique ?

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Front national en forme, socialisme en berne, gauche de la gauche en panne, la période est au « rassemblement ». Mais, de qui ? De quoi ? Pour quoi faire ? La lutte contre le « F Haine » ne peut être un programme ni même un but en soi. Comment sortir les esprits de la confusion dans laquelle ils baignent, terreau fertile pour l'impuissance institutionnalisée ?

 Essayons de résumer.

Le PS a perdu son rôle historique d' « intellectuel collectif ». Ses dirigeants persistent à appliquer des schémas de pensée obsolètes : emploi = croissance, Europe = marché concurrentiel, écologie = luxe pour pays riches...

Des organisations de la gauche de la gauche s'élèvent des voix toujours plus nombreuses pour la création d'un pôle d'idée et d'action dont le but stratégique à moyen terme serait de faire sauter le couvercle que la cocotte-minute socialiste impose à toute velléité de retour aux fondamentaux de la gauche : justice, démocratie, progrès. La convergence nécessaire et impérieuse doit être celle de ceux qui ont pris conscience de la finitude de la planète, de ceux qui veulent redonner la première place au pouvoir politique contre le pouvoir économique, et de ceux qui considèrent comme inacceptable de voir dans nos pays riches des gens dans la misère matérielle et morale. En termes électoraux, faire sauter ce couvercle, c'est constituer une force susceptible de s'imposer comme gagnante du premier tour dans toutes les élections non proportionnelles, à commencer par l'Assemblée Nationale.

Mais, bien sûr, chacun y va de sa petite initiative ; chacun son rassemblement, en quelque sorte !

Le vrai rassemblement d'une telle force suppose un minimum d'accord sur les grandes orientations pertinentes pour la résolution des problèmes du siècle : le défi climatique et environnemental, la sauvegarde et le développement des solidarités, le rétablissement et le développement d'une démocratie concrète et exigeante.

Beaucoup d'organisations partagent ces principes, au-delà des mots (car évidemment, je ne compte pas pour ce grand'œuvre sur les bonimenteurs style UMP qui osent chanter qu'ils veulent « changer le monde » !!)

Ces organisations (ATTAC, EELV, PG, PC, NPA, autres composantes du Fdg, associations naturalistes, collectifs de luttes locales...) sont des partis, des mouvements, des ONG, des associations locales ou nationales... Elles ont leurs thèmes favoris, leurs types de fonctionnement, leurs manies, leurs obsessions, leurs exclusives... Elles se retrouvent sur les grands principes et devraient se serrer les coudes mais sont friandes de petites querelles de voisinage, sur le mode du « racisme des petites différences » : « Commençons par étriper ceux qui nous sont les plus proches ; nous serons plus à l'aise pour nous affronter à l'adversaire principal ! » Ce comportement identitaire, humain trop humain, est particulièrement nuisible et désole les non militants, et aussi, heureusement, une bonne partie des militants.

Les chances de réussite d'un rassemblement de tous ceux qui ne se retrouvent pas dans ce gouvernement prétendument « de gauche » et veulent mettre fin à la dérive « socialiste » sont donc liées à la capacité des uns et des autres à adopter un comportement responsable et à accepter un certain nombre d'entorses à leur vision du monde, forcément la plus éclairée et la plus pertinente !

 Les conditions d'un rassemblement

En premier lieu, il faudrait commencer par signer un pacte de non agression entre partenaires « naturels » : non, tout n'est pas de la faute de Mélenchon ; non, EELV n'est pas « néo libéral » ; non, tous les communistes ne sont pas des productivistes forcenés ; non, Nouvelle Donne n'est pas composée d'anciens consultants mal repentis et les adhérents d'ATTAC de gens qui cherchent une tribune ... Tous ces gens cherchent des solutions aux problèmes du moment et des stratégies pour mettre en œuvre ces solutions. Respectons-les ; respectons-nous.

 En second lieu, il serait voué à l'échec de commencer à poser des exigences programmatiques précises, excellent moyen de torpiller l'opération. Des divergences existent entre les futurs partenaires ; inutile de les nier. En revanche, mettons en place une dynamique et des structures de travail intellectuel sur toutes les questions en débat. Ces débats ne devraient pas être limités aux seuls organisations mais largement ouverts à la population, sous des formes à inventer. A terme, les compromis seront trouvés soit par évolution des mentalités soit par négociation d'échéanciers plus ou moins serrés selon la qualité des convergences de points de vue. Laissons ensuite les élus, dans les institutions de la République, débattre et décider, comme c'est leur rôle, en fonction des majorités qui pourront être réunies.

 En troisième lieu, il conviendrait – et ce sera dur – d'accepter et de faire accepter à chacun de voter éventuellement pour le partenaire dont on est le moins proche, prix à payer pour faire gagner des positions (et des élus) au rassemblement tout entier. Les « Tu ne me feras jamais voter pour Mélenchon ! » , les « Pas les arrivistes d'EELV » et les « Le PC nucléocrate jamais ! » sont les plus sûrs adjuvants du Front National et des sociaux-libéraux.

Enfin, il ne faudrait pas non plus ajouter à la confusion en élargissant trop le périmètre des convergences possibles. Les positions économiques d'un Modem ou d'un Parti Radical (fût-il « de gauche ») ne sont guère compatibles avec un rassemblement dont l'objectif est de remplacer la concurrence par la coopération, et la charité par la justice. Ce qui n'exclut pas d'en faire des alliés pour le volet « démocratie » du projet...

Jean-François Schneider

Adhérent EELV – Membre du « Piment Rouge » Trièves (38)

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