Il est dans le silence de lui-même. Ce qu'il dit n'est que traversée d'eaux. Ces mots ne sont pas sa bouche. Par ses lèvres, l'animal, la roche, l'arbre, l'avant de son cerveau ou le reptile. Le legs universel de tant de chaos. Comme autant d'erreurs sur qui compter. Ça le franchit. Aussi son corps un pont. Il n'est qu'arches, travées de rive, suspentes, haubans et tablier. Un pont pour son fleuve. Les flots immémoriaux. Il ne laisse rien de lui que le limon du doute pour enfanter l'éclair. Et il coule sans cesse pourtant c'est un instant.
Il est dans le silence de lui-même. C'est une autre gorge qui portera sa voix. Un autre sein qui versera son lait et sa vie, son désir. Un autre sexe éjaculant l'absurde comme seule preuve du sens que l'on donne à "tout ça". Il est dans l'éphémère plaisir d'un cri, d'un râle. Il permet les amants. Mais jouir comme le début d'un soleil ou la mort d'une étoile.
Il est dans le silence de lui-même.
Un au-delà des mots.
Ma main ne fait rien d'autre que ce que fait l'esclave à qui l'on dit "va-t'en".
Si j'écris c'est par lui et ce n'est pas par moi. Je reste minéral, par son glaive, fendu. Et je n'ai rien à dire.