Les matins sont difficiles, n'est-ce pas ? Le café est noir. Le reste suit dans la même tonalité. S'il pleut, c'est encore pire. Le flux informatif nous déverse tant de noirceurs que la moindre nuance de gris a toutes les chances de nous ravir. Le feu est éteint. Le chat est parti. C'est difficile, il faut l'effort de passer outre le constat. La Palestine, la Colombie, la Birmanie, le Nigeria ... tant d'autres pays. Ici de même, dans un chaos latent. La guerre est permanente. Confusion dans les esprits. Ce qu'il va advenir, le funambule peut-il tenir sur un fil invisible ?
Je vais citer Peter Handke dans " Par les villages ". Ceci avant de faire du feu. Il fait froid en mai. J'ai ma conscience assise tout à côté de moi. Elle attend que je l'enlace.
" Joue le jeu. Menace le travail encore plus. Ne sois pas le personnage principal. Cherche la confrontation. Mais n'aie pas d'intention. Évite les arrière-pensées. Ne tais rien. Sois doux et fort. Sois malin, interviens et méprise la victoire. N'observe pas, n'examine pas, mais reste prêt pour les signes, vigilant. Sois ébranlable. Montre tes yeux, entraîne les autres dans ce qui est profond, prends soin de l'espace et considère chacun dans son image. Ne décide qu'enthousiasmé. Échoue avec tranquillité. Surtout aie du temps et fais des détours. Laisse-toi distraire. Mets-toi pour ainsi dire en congé. Ne néglige la voix d'aucun arbre, d'aucune eau. Entre où tu as envie et accorde-toi le soleil. Oublie ta famille, donne des forces aux inconnus, penche-toi sur les détails, pars où il n'y a personne, fous-toi du drame du destin, dédaigne le malheur, apaise le conflit de ton rire. Mets-toi dans tes couleurs, sois dans ton droit, et que le bruit des feuilles devienne doux. Passe par les villages, je te suis. "