"-Par contre, je connais un resto pas triste dans le coin, si ça vous chante, je vous attends dans le bar d'à côté.
- Et bien , pourquoi pas... Je ne crois pas que cela dure plus d'une heure et demie.
-Ok , à tout à l'heure"...
Assis devant une bière "intelligente", le Jo se vote, à l'unanimité de grands coups de pieds au train. (Coquin de sort, faut il être benêt!!! Dépanner une caisseuse, normal, la ramener en pays civilisé, normal aussi, mais inviter à dîner une bourgeoise issue du troupeau bêlant des "adorateurs de l'asticot", faut vraiment être un couillon endogène et pathologique...)
Le temps passe inexorablement. Le Jo essaie de s'occuper l'esprit en feuilletant le canard local, s'attarde sur les résultats du Top 14 de rugby. La victoire du RCT (Rugby Club Toulonnais), son club préféré, ne parvient pas à le sortir d'un considérable marasme mental. (Et qu'est ce que je vais pouvoir lui raconter à cette nana? Comment ne pas éclater de rire si elle essaie de me fourguer les théories de l'asticot).
Une bouffée d'air frais lui fait lever la tête. Elle est là, recoiffée, remaquillée, arborant un sourire à vous faire bronzer les neurones.
Le Jo se lève, tel un ours en fin d'hibernation, renverse son verre, imprime à la table un mouvement d'oscillation qui frôle le désastre, remet tout en place, va payer ses consos , jette un oeil féroce au patron hilare. Se tournant vers son invitée, il réalise qu'elle aussi se marre, ce qui n'améliore pas son humeur...Il enfile son cuir et , ce faisant, se goinfre deux appliques murales pseudo rustiques.
- Quand vous aurez fini de vous foutre de ma poire, vous pourrez me dire si votre affaire c'est bien passée.
- Pourquoi, cela vous intéresse vraiment?
- Non, pas vraiment, mais faut bien causer de quelque chose...
- Le meeting s'est bien passé, ils ont été un peu surpris que je m'esquive si tôt.
- Moi aussi.
- J'ai vu! Et elle se remet à rire...
Le Jo se referme comme une huitre. Ils avancent en silence dans les rues grisâtres de Die.
Die est une ville triste, comme si elle portait le deuil des nombreux drames qui émaillèrent son histoire...
Au détour d'une ruelle, ils débouchent sur un établissement discret, aux rideaux rouges et blancs... Le Jo pousse la porte. Ils entrent au coeur d'une seule voûte qui paraît s'enfoncer loin dans la roche. Lumières tranquilles, musique baroque (suite pour mandolines de Vivaldi).
Quelques tables, nappes blanches, bougeoirs en argent. Plusieurs couples dînent, public varié de vrais amateurs..
Soudain cette harmonie est déchirée par une gueulante éléphantesque...
(à suivre)