Le Jo, lui, profite largement de cet intermède gustatif pour éviter d'avoir à faire les frais de la conversation...
Fin du repas, la voûte s'est vidée, ne restent que quelques dineurs tardifs...
Le Claude revient, encombré (encore!) de bouteilles et d'une guitare, pose les flacons, trois verres ballons et sert: Liqueur de myrthe du Jo, 10 ans d'âge, Calvados du Christian, 30 ans d'âge, Génépy du Papé, âge inconnu..."
Il avait, auparavant, tendu la guitare au JO:
- Fais moi plaisir!
- Et basta! J'ai passé l'âge de jouer les troubadours!
- Allez , fais pas ta coquette!!!
Le Jo accorde la guitare puis laisse ses doigts partir en balade sur les cordes: "Santa Fe" , un vieux Blues de Lightning Hopkins, de l'émotion à l'état pur. Le Claude hoche la tête en rythme, les yeux brillant de quelque joie interne et définitive...Les clients encore présents se sont approchés sans faire de bruit et ont formé un cercle autour du trio. Du Blues, le Jo passe au Country , Doc Watson, puis à des ballades corses.. Sa voix lui vient des tripes, parfois il ferme les yeux, sans oublier de s'humecter les cordes vocales à la gnôle de qualité...
Marie Sophie s'endort quelques part entre l'alcool de poire et la liqueur d'estragon...
La désagréable sensation d'avoir la cervelle mastiquée par une bête monstrueuse la réveille. Ouvrir les yeux est une exercice pénible. Elle est couchée sous une couette en plume dans une chambre petite mais coquette. Sur la table de nuit, une carafe, deux cachets et un bouquet de fleurs des champs. Elle avale les cachets, assèche la carafe puis referme les yeux en attendant que le concert de percutions cesse dans son crâne...
Elle réalise , quelques instants plus tard, que ses valises ont été portées dans la chambre. Un peu perdue, elle a la mémoire qui flageole. Après une longue douche, habillée, pomponnée, elle s'engage dans d'antiques escaliers en bois qui la conduisent dans la cuisine . Les deux hommes sont attablée autour le la table devant de solides bocks de bière ...
Le Claude la salue d'un immense sourire puis va lui préparer un petit déjeuner..Marie Sophie s'assoit en face du Jo.
- ça va? Lui demande ce dernier, souriant de l'oeil gauche.
- Cela pourrait aller mieux, j'ai peur d'avoir un peu forcé sur les alcools.
Sur ce le Claude s'en revient avec un plateau chargé de croissants, d'un grand verre de jus d'orange et d'un bol de café...
- On a récupéré votre caisse. Un pote garagiste s'en occupe, il y en a pour trois jours dans le meilleur des cas. Si vous êtes pressées, on peut vous conduire à Valence, au TGV...
- J'ai quelques jours devant moi et Paris ne me manque pas particulièrement.
- Bonne affaire, sourit le Claude, vous ne sauriez trouver meilleur guide que le Jo , pour visiter le coin. Ne vous fiez pas à son allure de gorille décadent (violents coups de pied sous la table), il a , comme il dit "un rapport privilégié avec l'insolite"...
Le Jo se déploie lentement.
- Mais ce n'est pas vrai, je le crois pas, ce niffle!!!
(à suivre)