Même sur Mediapart on s’obstine à traduire « Protective edge » par « Haie protectrice » ou « Bordure de protection ». À la suite des US, le gouvernement israélien donne des noms à ses opérations militaires, des noms faussement poétiques trempés dans le sarcasme et ce qui se veut sans doute un humour noir, et qui est souvent une manière pour l’inconscient militaire de parler tonitruant.
L’opération a un titre anglais, « Protective edge », et un titre hébreu, « Tzouk eitan ».
Les deux titres s’éclairent réciproquement sans se traduire l’un dans l’autre.
En anglais il y a la notion de protection, bon. En hébreu, celle d’aplomb et d’immutabilité, de ténacité, d’intransigeance, d’opacité formidable. « Tsouk », c’est une falaise, un rocher surplombant.
Mais de toutes façons, même si on veut traduire de l’anglais, ce qui est légitime puisqu’il y a un titre spécifiquement en anglais, destiné à la presse et à la diplomatie internationales, tandis que le titre hébreu est destiné à la communication interne, à la propagande intérieure, « edge », ça ne veut pas dire « bordure », ni « haie ».
« Haie », c’est « hedge ». Et bordure, c’est une plate-bande, ça n’a rien à faire ici. Une « plate-bande protectrice », je vous demande un peu ?
Un bord, ce n’est pas une bordure ni une haie
Un bord c’est un bord
comme le bord de la folie
le bord du gouffre
celui de l’évanouissement
le bord de l'anéantissement
ou celui de l’avilissement
Une falaise c’est un bord
si tu la regardes d’en haut
c’est le bord de la mort
si tu la regardes d’en bas
c’est le bord déchiqueté
de l’horizon
les restes des matériaux de la création du monde
abandonnés par Dieu
où la mer vient se heurter
où les bateaux les marins les chats vont se fracasser
dans l’affolante allégresse des vagues
où les mouettes
seules
sont indifférentes au fracas