Tuer moins pour réprimer plus, telle est l'équation policière qui permet une politique sécuritaire d'extrême-droite.
On se souvient du temps où les policiers fêtaient l'arrivé d'un ministre de l'Intérieur aimé. En 1993, le retour de Charles Pasqua parmi les siens avait été l'occasion d'une explosion de joie, avec pas moins de trois adolescents abattus en une semaine par les perdreaux en extase. Makomé M'Bowolé, 17 ans, Eric Simonté, 18 ans et Rachid Ardjouni de 17 ans. On se souvient aussi que les assassins n'ont pas été déchus de la nationalité fr. L'inspecteur Pascal Compain qui a descendu Makomé d'une balle dans la tête, à l'intérieur du commissariat des Grandes Carrières, a pris 8 ans de prison. C'était un "accident" selon la Justice, qui s'est montré particulièrement sévère puisque son collègue, le sous-brigadier Fournier, a été condamné à 8 mois pour avoir descendu Rachid à terre et à bout pourtant. Encore un accident.
A l'époque il était très difficile de ne pas faire le rapprochement entre ces "accidents" à répétition et le retour de Pasqua, le ministre qui protégeait ses poussins contre de méchants Malik Oussekine en 1986 -les assassins ont eut du sursis cette fois-ci, comme quoi ça sert un ministre engagé auprès des siens.
Cependant, il faut bien le dire, flinguer les adolescents, même s'ils sont noirs ou arabes, n'avait pas très bonne presse. Disons que l'image de la police s'en ressentait un peu. Quelques doutes traversaient la population : "notre police serait-elle plus raciste que nous?" s'inquiétait-on dans les chaumières.
Or, cette image n'est pas sans conséquence politique, elle gênait la mise en place du système répressif devant protéger les centres-villes des pauvres, des classes dangereuses. Un grand effort fut donc mis en oeuvre pour limiter un peu les assassinats policiers. Cela est particulièrement visible lors des mouvements sociaux, les manifestations sont réprimées, et même fortement, mais il n'y a pas de mort. En 2006, l'efficacité de la répression des manifestations anti-CPE s'est mesuré par l'absence de mort, malgré un degré relativement élevé d'affrontement. Sarkozy jouait alors gros, et il a gagné car ses troupes sont restés en laisse.
Quand la police ne tue pas, le politique au-dessus à les mains-libres et la répression est plus forte. C'est grâce à cet effort des policiers qu'aujourd'hui ils peuvent avoir un ministre ouvertement raciste (condamné pour cela) et le premier flic de France comme président. Quand ce dernier annonce des lois discrimantes, il ne cherche qu'à formaliser une politique déjà appliquée. Et encore une fois, c'est tout l'art du système repressif français que d'avoir su s'installer par à-coups et sans souffrance -sauf, bien entendu, pour ses cibles et victimes, mais justement celles-ci ont été invisibilisées.
Billet de blog 3 août 2010
Loués soient nos poulets
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